LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 avril 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 342 F-D
Pourvoi n° C 22-12.947
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 AVRIL 2024
La caisse primaire d'assurance maladie du Gard, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 22-12.947 contre l'arrêt rendu le 11 janvier 2022 par la cour d'appel de Nîmes (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société [3], dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Reveneau, conseiller, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société [3], et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 5 mars 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Reveneau, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 11 janvier 2022) et les productions, la caisse primaire d'assurance maladie du Gard (la caisse) ayant décidé, le 1er juin 2017, de prendre en charge au titre de la législation professionnelle la maladie déclarée le 6 janvier 2017 par M. [X] (la victime), salarié de la société [3] (l'employeur), ce dernier a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen des moyens
Sur le second moyen
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches
Enoncé du moyen
3. La caisse fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de péremption de l'instance opposée par la caisse à l'employeur, alors :
« 1°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en se fondant, pour rejeter l'exception de péremption de l'instance soulevée par la caisse, sur les dispositions de R.142-10-10 du code de la sécurité sociale, exclusivement applicables aux procédures introduites devant les juridictions de première instance, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile et l'article R 142.10.10 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que même dans les procédure orales, l'ordonnance de radiation qui sanctionne le défaut de diligence des parties est sans effet sur le délai de péremption de l'instance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le président de la chambre sociale de la cour d'appel de Nîmes avait d'abord rendu une ordonnance portant injonction de conclure le 11 mai 2018, puis une ordonnance de radiation le 7 février 2020 ; qu'en affirmant, pour juger que le délai de péremption expirait le 7 février 2022 et rejeter l'exception de péremption de l'instance soulevée par la caisse, qu'en matière de procédure orale, la notification de l'ordonnance de radiation interrompait le délai de péremption, la cour d'appel a violé les articles 381 et 386 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'article 2 du code civil, la loi nouvelle ne peut remettre en cause une situation juridique régulièrement constituée à la date de son entrée en vigueur.
5. Selon l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
6. Selon l'article R. 142-22, dernier alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2011-2119 du 30 décembre 2011, abrogé à compter du 1er janvier 2019 par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, l'instance devant le juge du contentieux général de la sécurité sociale est périmée lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article précédent, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
7. Il résulte de la combinaison de ces textes que si les dispositions de l'article 386 du code de procédure civile étaient applicables dans le contentieux de la sécurité sociale dès le 1er janvier 2019, le juge ne pouvait fixer le point de départ du délai de péremption dans les conditions qu'elles prévoient à une date antérieure, correspondant à la période durant laquelle le délai ne pouvait courir en l'absence de diligences expressément mises à la charge des parties par la juridiction.
8. L'arrêt constate que l'employeur a interjeté appel le 9 mai 2018 et qu'un courrier du président de chambre, daté du 11 mai suivant, a été adressé au conseil de l'appelant pour l'informer qu'il disposait d'un délai de 4 mois pour conclure.
9. Ce courrier, qui ne comportait aucune injonction, n'a pu constituer le point de départ du délai de péremption prévu à l'article R. 142-22 précité, alors applicable.
10. Dès lors, l'employeur n'ayant eu l'obligation d'accomplir des diligences pour échapper à la péremption de l'instance qu'il avait engagée qu'à compter du 1er janvier 2019, le délai fixé à l'article 386 du code de procédure civile, qui expirait le 1er janvier 2021, n'était pas expiré lorsqu'il a déposé ses conclusions aux fins de rétablissement au rôle le 28 août 2020, de sorte que la péremption n'était pas acquise à cette date.
11. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Gard aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille vingt-quatre.