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04/04/2024 | FRANCE | N°42400194

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 avril 2024, 42400194


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


MB






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 4 avril 2024








Rejet




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 194 F-D


Pourvoi n° R 22-16.708














R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
___________________

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 AVRIL 2024


La société Suez RR IWS Chemicals France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 avril 2024

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 194 F-D

Pourvoi n° R 22-16.708

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 AVRIL 2024

La société Suez RR IWS Chemicals France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 22-16.708 contre l'arrêt rendu le 22 mars 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant à l'administration des douanes et droits indirects, représentée par son directeur général, agissant par le directeur régional des douanes et des droits indirects de Nice, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Suez RR IWS Chemicals France, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'administration des douanes et droits indirects, après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 mars 2022), la société Suez RR IWS Chemicals France (la société) exploite une installation de traitement thermique de déchets dangereux.

2. Le 29 avril 2016, soutenant avoir acquitté à tort la taxe générale sur les activités polluantes (la TGAP) au titre des années 2012 à 2014 sur les déchets industriels spéciaux soumis à une opération de pré-traitement par un procédé d'évapo-concentration, la société en a demandé le remboursement à l'administration des douanes et droits indirects.

3. Le 29 juillet 2017, l'administration des douanes et droits indirects a rejeté la demande de la société.

4. La société a assigné l'administration des douanes et droits indirects en annulation de la décision de rejet et en remboursement de la somme de 635 414 euros au titre de la TGAP correspondante.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter l'intégralité des demandes visant à l'annulation de la décision de l'administration des douanes et droits indirects du 29 juillet 2017 pour ce qui concerne la taxe due pour 2014

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de rejeter l'intégralité de ses demandes visant à l'annulation de la décision de l'administration des douanes et droits indirects du 29 juillet 2017 et au remboursement de la somme de 635 414 euros, alors :

« 1°/ que la TGAP est due par tout exploitant d'une installation d'élimination par stockage ou par incinération de déchets ménagers et assimilés, tout exploitant d'une installation d'élimination des déchets industriels spéciaux par incinération, co-incinération, stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisée pour les déchets que l'entreprise produit ou toute personne qui transfère ou fait transférer des déchets vers un autre Etat en application du règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets ; que les installations de stabilisation des déchets industriels avant stockage, les installations spécifiques de traitement des sites et sols pollués ainsi que les installations de transit, de regroupement et de pré-traitement des déchets industriels spéciaux - sous réserve qu'il ne s'agisse pas d'installations de stockage, de traitement physico-chimique, de traitement biologique, d'incinération ou de co-incinération - ne sont pas visées par la taxe ; que l'installation qui procède au mécanisme d'évapo-concentration, qui ne conduit à aucune élimination de déchets dès lors que l'intégralité des déchets traités se retrouve à la sortie de cette installation, sous forme distincte de résidus organiques, d'une part, et d'eaux résiduaires, d'autre part, est une installation de pré-traitement qui n'est pas soumise à la taxe ; qu'en considérant néanmoins, pour rejeter les demandes de la société, que "l'évapo concentration (?) participe de l'élimination de ces déchets", quand il s'agit d'une opération de pré-traitement qui ne conduit à aucune élimination de déchets, la cour d'appel a violé l'article 266 sexies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2011 ;

2°/ que la TGAP est due par tout exploitant d'une installation d'élimination par stockage ou par incinération de déchets ménagers et assimilés, tout exploitant d'une installation d'élimination des déchets industriels spéciaux par incinération, co-incinération, stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisée pour les déchets que l'entreprise produit ou toute personne qui transfère ou fait transférer des déchets vers un autre Etat en application du règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets ; que la taxe est due en considération de l'exploitation d'une "installation" répondant à certains critères, en sorte que si une même société exploite plusieurs installations dissociables sur un site, l'application de la taxe doit être appréciée séparément pour chacune de ces installations ; qu'en considérant néanmoins, pour rejeter les demandes de la société, que "la circonstance que l'évapo-concentrateur soit une installation physiquement autonome du reste des installations d'incinération et encore qu'il soit constitué de machines spécifiques à son fonctionnement" est "indifférente", la cour d'appel a violé l'article 266 sexies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2011. »

Réponse de la Cour

6. L'article 266 sexies du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011, n'est pas applicable à la demande de remboursement de la TGAP de l'année 2014.

7. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter l'intégralité des demandes visant à l'annulation de la décision de l'administration des douanes et droits indirects du 29 juillet 2017 pour ce qui concerne les taxes dues pour 2012 et 2013

Enoncé du moyen

8. La société fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que la TGAP est due par tout exploitant d'une installation d'élimination par stockage ou par incinération de déchets ménagers et assimilés, tout exploitant d'une installation d'élimination des déchets industriels spéciaux par incinération, co-incinération, stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisée pour les déchets que l'entreprise produit ou toute personne qui transfère ou fait transférer des déchets vers un autre Etat en application du règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets ; que les installations de stabilisation des déchets industriels avant stockage, les installations spécifiques de traitement des sites et sols pollués ainsi que les installations de transit, de regroupement et de pré-traitement des déchets industriels spéciaux - sous réserve qu'il ne s'agisse pas d'installations de stockage, de traitement physico-chimique, de traitement biologique, d'incinération ou de co-incinération - ne sont pas visées par la taxe ; que l'installation qui procède au mécanisme d'évapo-concentration, qui ne conduit à aucune élimination de déchets dès lors que l'intégralité des déchets traités se retrouve à la sortie de cette installation, sous forme distincte de résidus organiques, d'une part, et d'eaux résiduaires, d'autre part, est une installation de pré-traitement qui n'est pas soumise à la taxe ; qu'en considérant néanmoins, pour rejeter les demandes de la société, que "l'évapo concentration (?) participe de l'élimination de ces déchets", quand il s'agit d'une opération de pré-traitement qui ne conduit à aucune élimination de déchets, la cour d'appel a violé l'article 266 sexies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2011 ;

2°/ que la TGAP est due par tout exploitant d'une installation d'élimination par stockage ou par incinération de déchets ménagers et assimilés, tout exploitant d'une installation d'élimination des déchets industriels spéciaux par incinération, co-incinération, stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisée pour les déchets que l'entreprise produit ou toute personne qui transfère ou fait transférer des déchets vers un autre Etat en application du règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets ; que la taxe est due en considération de l'exploitation d'une "installation" répondant à certains critères, en sorte que si une même société exploite plusieurs installations dissociables sur un site, l'application de la taxe doit être appréciée séparément pour chacune de ces installations ; qu'en considérant néanmoins, pour rejeter les demandes de la société, que "la circonstance que l'évapo-concentrateur soit une installation physiquement autonome du reste des installations d'incinération et encore qu'il soit constitué de machines spécifiques à son fonctionnement" est "indifférente", la cour d'appel a violé l'article 266 sexies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2011. »

Réponse de la Cour

9. Selon l'article 266 sexies, I, 1, du code des douanes dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011, la TGAP est due par tout exploitant d'une installation d'élimination des déchets industriels spéciaux par incinération, co-incinération, stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisée pour les déchets que l'entreprise produit.

10. Il en résulte que, si plusieurs installations peuvent coexister sur un même site industriel de traitement des déchets, les unités qui concourent à l'élimination des déchets par l'un des procédés énumérés par ce texte font partie de l'installation taxable, laquelle est alors considérée comme unique.

11. Il en résulte par ailleurs que l'élimination des déchets industriels spéciaux s'entend de toute opération de collecte, transport, stockage, tri et traitement nécessaire à la récupération des éléments et matériaux réutilisables ou de l'énergie, ainsi qu'au dépôt ou au rejet dans le milieu naturel de tous autres produits dans des conditions propres à éviter de porter atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement.

12. L'arrêt relève que le processus de traitement des déchets reçus par la société est le suivant : les déchets fortement chargés font directement l'objet d'une incinération pour être détruits, tandis que les déchets faiblement chargés sont soumis à l'opération d'évapo-concentration qui consiste à séparer les déchets en deux parties, à savoir les parties organiques qui sont envoyées vers l'incinérateur et la partie aqueuse résiduaire qui est envoyée vers la station d'épuration. Il retient que l'évapo-concentration, préalable nécessaire à l'élimination par incinération des déchets reçus par la société, n'est qu'une étape qui concourt à leur élimination.

13. En l'état de ces seuls motifs, la cour d'appel a retenu à bon droit que l'évapo-concentrateur, bien que physiquement autonome de l'incinérateur, faisait partie de l'installation taxable au sens du texte susvisé.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

15. La société fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 3°/ que le fait générateur de la TGAP intervient et cette taxe est exigible au moment où se produit la réception des déchets dans une installation mentionnée au 1 du I de l'article 266 sexies du code des douanes ; les déchets traités dans une station d'épuration sont exonérés de cette taxe ; que, dans le cadre d'une installation d'évapo-concentration, l'application de la taxe lors de l'entrée des déchets dans l'installation dans laquelle ils sont réceptionnés doivent faire l'objet d'une distinction, pour déterminer la base taxable, entre, d'une part, les résidus lors de leur entrée dans l'installation d'incinération et, d'autre part, les eaux résiduaires lors leur réception dans la station d'épuration ; qu'en considérant néanmoins qu'il n'y a pas lieu de distinguer selon la nature des déchets réceptionnés au sein de l'installation et sans qu'il y ait lieu d'en abstraire la part du condensat aqueux, in fine envoyé en station d'épuration, la cour d'appel a violé l'article 266 septies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2010 ;

4°/ que le fait générateur de la TGAP intervient et cette taxe est exigible au moment où se produit la réception des déchets dans une installation mentionnée au 1 du I de l'article 266 sexies du code des douanes ; les déchets traités dans une station d'épuration sont exonérés de cette taxe ; que, dans le cadre d'une installation d'évapo-concentration, l'application de la taxe lors de l'entrée des déchets dans l'installation dans laquelle ils sont réceptionnés doivent faire l'objet d'une distinction, pour déterminer la base taxable, entre, d'une part, les résidus lors de leur entrée dans l'installation d'incinération et, d'autre part, les eaux résiduaires lors leur réception dans la station d'épuration ; qu'en l'espèce, pour rejeter les demandes de la société, la cour d'appel retient qu'elle ne peut prétendre être exonérée au titre de déchets traités dans le cadre de la station d'épuration, car si la partie aqueuse résultant de l'opération d'évapo-concentration finit dans cette station, ladite opération n'est pas réalisée par la société, mais par le GIE Osiris ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant tiré de l'identité de l'opérateur de la station d'épuration, sans objet pour déterminer l'exigibilité de la taxe dont le fait générateur est l'entrée du déchet dans l'installation taxable, la cour d'appel a violé l'article 266 septies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2010. »

Réponse de la Cour

16. Selon l'article 266 septies du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010, le fait générateur de la TGAP est constitué par la réception des déchets par les exploitants mentionnés au 1 du I de l'article 266 sexies de ce code.

17. Ayant retenu que l'évapo-concentrateur faisait partie de l'installation taxable exploitée par la société, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'ensemble des déchets réceptionnés par celle-ci, qu'ils soient envoyés
directement vers l'incinérateur ou, préalablement, vers l'évapo-concentrateur, entraient dans l'assiette de la TGAP, sans qu'il y ait lieu d'en abstraire la partie aqueuse résiduaire obtenue par évapo-concentration.

18. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Suez RR IWS Chemicals France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Suez RR IWS Chemicals France et la condamne à payer à l'administration des douanes et droits indirects la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400194
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix en Provence, 22 mars 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 avr. 2024, pourvoi n°42400194


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400194
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