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26/03/2024 | FRANCE | N°C2400369

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 mars 2024, C2400369


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° M 23-81.499 F-B


N° 00369




GM
26 MARS 2024




REJET




M. BONNAL président,














R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 MARS 2024






La préfète du Loiret a

formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 20 février 2023, qui, statuant sur la requête en incident contentieux de M. [O] [V], a annulé, notamment, un titre de perception l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° M 23-81.499 F-B

N° 00369

GM
26 MARS 2024

REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 MARS 2024

La préfète du Loiret a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 20 février 2023, qui, statuant sur la requête en incident contentieux de M. [O] [V], a annulé, notamment, un titre de perception liquidant une astreinte.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la société Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la préfète du Loiret, les observations de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [O] [V] et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 février 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Joly, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 17 mai 2013, le tribunal correctionnel a déclaré M. [O] [V] coupable d'infraction au code de l'urbanisme et a ordonné la mise en conformité des lieux, assortie d'une astreinte d'un montant de 50 euros par jour de retard.

3. Le 21 septembre 2015, un titre exécutoire en liquidation de l'astreinte a été émis.

4. Le 18 octobre 2017, le Trésor public a adressé à M. [V] une lettre de mise en demeure valant commandement de payer la somme de 11 450 euros au titre de l'astreinte.

5. M. [V] a formé opposition à la mise en demeure et adressé un recours gracieux à l'autorité administrative, qui a rejeté ses demandes.

6. Il a saisi le tribunal correctionnel d'une requête en annulation du titre de perception liquidant l'astreinte et de décisions prises sur le fondement de cette dernière.

7. Le 7 juin 2019, le tribunal a déclaré la requête irrecevable.

8. M. [V] et le procureur de la République ont relevé appel de ce jugement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a annulé le titre de perception de liquidation de l'astreinte de 11 450 euros du 21 septembre 2015, la décision de rejet de la réclamation du 1er décembre 2015, la mise en demeure du 18 octobre 2017 valant commandement de payer, la décision du préfet du Loiret du 19 juin 2018 et la décision de rejet du directeur des finances publiques du Loir-et-Cher du 21 juin 2018, alors :

« 1°/ que l'astreinte court nécessairement du jour où la condamnation pénale devient définitive, peu importe que la décision la prononçant ne précise pas son point de départ ; qu'en affirmant que l'astreinte fixée par le tribunal correctionnel n'a jamais commencé à courir, faute pour le tribunal d'en avoir fixé le point de départ, la cour d'appel a méconnu l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme ;

2°/ qu'il ne revient pas au juge pénal, lorsqu'il statue sur un incident contentieux d'exécution, de supprimer l'astreinte préalablement ordonnée en application de l'article L. 480-7, alinéa 1er, du code de l'urbanisme ; qu'en différant le point de départ de l'astreinte prononcée par le tribunal correctionnel d'Orléans le 17 mai 2013 à une date postérieure à l'exécution par le condamné de son obligation de mise en conformité, la cour d'appel, qui a remis en cause cette mesure, a excédé ses pouvoirs en méconnaissance des dispositions de l'article 710 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

10. Pour annuler le titre de perception liquidant l'astreinte à hauteur de 11 450 euros et les décisions prises sur le fondement de cette dernière, l'arrêt attaqué énonce qu'aux termes de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme, le juge répressif qui, après avoir condamné le bénéficiaire d'une construction irrégulièrement édifiée, le condamne à procéder à des travaux de mise en conformité, doit lui impartir un délai pour l'exécution de l'ordre de démolition et fixer en conséquence le point de départ de ce délai en assortissant, le cas échéant, sa décision d'une astreinte.

11. Le juge ajoute que le tribunal correctionnel a ordonné à l'encontre de M. [V] la mise en conformité des lieux ou des ouvrages sous astreinte d'un montant de 50 euros par jour de retard, sans fixer ni le point de départ, ni la durée du délai qu'elle lui impartissait pour procéder aux travaux.

12. Il considère que l'astreinte fixée par le tribunal correctionnel n'a jamais commencé à courir, faute pour ce dernier d'en avoir fixé le point de départ.

13. Il en déduit qu'il convient de faire droit aux demandes en annulation présentées par M. [V], en l'absence de support juridique fondant une créance de liquidation d'astreinte.

14. En l'état de ces seules énonciations, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

15. En effet, d'une part, l'astreinte ayant été ordonnée sans fixer le délai imparti pour la mise en conformité des lieux, exigé par les dispositions de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme pour décider d'une telle mesure, cette dernière ne pouvait pas être complétée par la fixation d'un tel délai sur le fondement de l'article 710 du code de procédure pénale, qui donne compétence à la juridiction pour connaître des incidents relatifs à l'exécution d'une décision, mais non pour y ajouter ou retrancher.

16. D'autre part, l'astreinte ne pouvant être exécutée en l'absence de fixation d'un tel délai, la cour d'appel ne pouvait que constater que les mesures prises en application de celle-ci étaient dénuées de fondement juridique et prononcer leur annulation.

17. Ainsi, le moyen, qui en sa seconde branche manque en fait dès lors que la cour d'appel n'a pas supprimé l'astreinte mais a constaté qu'elle n'était pas exécutable, doit être écarté.

18. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

FIXE à 2 500 euros la somme que la préfète du Loiret devra payer à M. [V] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2400369
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

URBANISME - Permis de construire - Construction non conforme - Démolition, mise en conformité ou réaffectation du sol - Astreinte - Délai pour exécuter la décision - Défaut - Application de la procédure prévue à l'article 710 du code de procédure pénale - Exclusion - Effet - Annulation des mesures de liquidation

L'astreinte ayant été ordonnée sans fixer le délai imparti pour la mise en conformité des lieux exigé, pour décider d'une telle mesure, par les dispositions de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme, cette dernière ne peut pas être complétée par la fixation d'un tel délai sur le fondement de l'article 710 du code de procédure pénale, qui donne compétence à la juridiction pour connaître des incidents relatifs à l'exécution d'une décision, mais non pour y ajouter ou retrancher. Une telle astreinte ne pouvant être exécutée en l'absence de fixation d'un tel délai, la cour d'appel ne pouvait que constater que les mesures de liquidation prises par l'administration en application de celle-ci étaient dénuées de fondement juridique et prononcer leur annulation


Références :

Article L. 480-7 du code de l'urbanisme

article 710 du code de procédure pénale.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 20 février 2023

Sur le fait que la juridiction correctionnelle, saisie en application de l'article 710 du code de procédure pénale, ne peut ajouter à une mesure de démolition un délai sous astreinte que la décision ne prévoyait pas : Crim., 7 février 1996, pourvoi n° 94-83869, Bull. crim. 1996, n° 66 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 mar. 2024, pourvoi n°C2400369


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:C2400369
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