LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 23-87.286 F-D
N° 00458
MAS2
13 MARS 2024
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 13 MARS 2024
M. [F] [I] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 5e section, en date du 4 décembre 2023, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de viol, agressions sexuelles, corruption de mineurs et violences, aggravés, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. de Lamy, conseiller, les observations de la SCP Guérin-Gougeon, avocat de M. [F] [I], et les conclusions de M. Petitprez, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mars 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. de Lamy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [F] [I] a été mis en examen des chefs susvisés et placé en détention provisoire.
3. Par une ordonnance du 22 novembre 2023, le juge des libertés et de la détention a rejeté sa demande de mise en liberté.
4. M. [I] a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté en l'état sa demande de mise en liberté du 17 novembre 2023, alors :
« 1°/ que lorsque la durée de la détention provisoire excède un an en matière criminelle, les décisions rejetant les demandes de mise en liberté doivent comporter les indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information, lesquelles ne se confondent pas avec les motifs de prolongation de la détention provisoire ; qu'en rejetant la demande de mise en liberté présentée par M. [I] plus d'un an après son placement en détention provisoire, sans préciser les circonstances particulières justifiant la poursuite de l'information, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 145-3 et 593 du code de procédure pénale ».
Réponse de la Cour
Vu l'article 145-3 du code de procédure pénale :
6. Aux termes de ce texte, lorsque la durée de la détention excède un an en matière criminelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent comporter les indications particulières qui justifient, en l'espèce, la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure.
7. Pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant la demande de mise en liberté de M. [I], l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte des éléments du dossier l'existence d'éléments graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation aux faits qui lui sont reprochés.
8. Les juges relèvent, en s'appuyant sur des éléments du dossier, que la détention provisoire demeure l'unique moyen d'empêcher une pression sur les témoins ou sur les victimes ainsi que leurs familles, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement, de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice causé.
9. Ils énoncent, enfin, que nonobstant les observations présentées au nom de M. [I] et les garanties invoquées à leur soutien, la détention provisoire reste justifiée, au regard des éléments précis et circonstanciés de la procédure, comme étant l'unique moyen de parvenir aux objectifs qui viennent d'être énoncés et qui ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou sous le régime de l'assignation à résidence avec surveillance électronique, de telles mesures ne comportant pas de contrainte suffisante pour prévenir efficacement les risques précités.
10. En prononçant ainsi, par des énonciations qui ne comportent pas les indications particulières justifiant, en l'espèce, la poursuite de l'information, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. La cassation est par conséquent encourue, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre grief.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 4 décembre 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille vingt-quatre.