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07/03/2024 | FRANCE | N°32400138

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 mars 2024, 32400138


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3


JL




COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 7 mars 2024








Cassation partielle




Mme TEILLER, président






Arrêt n° 138 F-D


Pourvoi n° K 22-15.415










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
______________________

___




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 MARS 2024


La société Quarta, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 22-15.415 contre deux ar...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 mars 2024

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 138 F-D

Pourvoi n° K 22-15.415

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 MARS 2024

La société Quarta, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 22-15.415 contre deux arrêts rendus les 20 janvier 2022 et 27 janvier 2022 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la compagnie d'assurance Amtrust International Underwriters Ltd, dont le siège est [Adresse 13] (Irlande), société d'assurances de droit irlandais, ayant un établissement en France, domicilié [Adresse 16],

2°/ à Mme [L] [N], domiciliée [Adresse 7],

3°/ à M. [U] [K], domicilié [Adresse 9],

4°/ à M. [I] [GT], domicilié [Adresse 12],

5°/ à M. [R] [Y], domicilié [Adresse 22],

6°/ à Mme [FY] [D], domiciliée [Adresse 1],

7°/ à Mme [W] [S], domiciliée [Adresse 18],

8°/ à Mme [GY] [M], domiciliée [Adresse 3],

9°/ à Mme [J] [O], domiciliée [Adresse 21],

10°/ à M. [C] [H], domicilié [Adresse 8],

11°/ à M. [A] [H], domicilié [Adresse 14],

12°/ à Mme [T] [B], domiciliée [Adresse 5],

13°/ à Mme [E] [V], domiciliée [Adresse 19],

14°/ à M. [X] [F], domicilié [Adresse 20],

15°/ à M. [GN] [Z], domicilié [Adresse 17],

16°/ à la société BTSG², société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 4], prise en sa qualité de liquidateur des sociétés Artisanat de France et Compagnonnage de France,

17°/ à la société AA-ingénierie.com, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 10],

18°/ à la Mutuelle des architectes français, société d'assurance à forme mutuelle, dont le siège est [Adresse 6],

19°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 15], prise en sa qualité d'assureur de la société AA-Ingénierie.com,

20°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 15], prise en sa qualité d'assureur de M. [P],

21°/ à l'Office du carré - notaires, dont le siège est [Adresse 11],

défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société Quarta, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'Office du carré - notaires, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la Mutuelle des architectes français, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de MM. [K] et [Y], de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de Mme [D], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mmes [S], [M], [O], [B] et [V] et de MM. [C] et [A] [H], [F] et [Z], après débats en l'audience publique du 23 janvier 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Quarta du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société BTSG².

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 janvier 2022, rectifié le 27 janvier 2022), en 2009, la société Artisanat de France, dirigée par Mme [D], a entrepris la construction de sept maisons d'habitation.

3. Mme [N], architecte, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), a été chargée de l'obtention du permis de construire. La société D2L Betali, devenue Quarta, a été chargée d'établir le plan d'implantation des constructions et d'effectuer le contrôle d'implantation des dalles. La société AA ingénierie.com, gérée par M. [K] et M. [Y] et assurée auprès de la SMABTP, a été chargée de la maîtrise d'oeuvre. Sont également intervenus M. [GT] et M. [P], ce dernier assuré auprès de la SMABTP.

4. Un contrat d'assurance dommages-ouvrage a été souscrit auprès de la société Amtrust International Underwriters Ltd.

5. Par actes reçus par M. [G], exerçant au sein d'une société civile professionnelle de notaires, aux droits de laquelle vient la société Office du carré - notaires, les maisons ont été vendues en l'état futur d'achèvement à :
- Mme [V] pour le lot n° 1,
- M. [Z] pour le lot n° 2,
- M. [F] pour le lot n° 3,
- Mme [O] pour le lot n° 4,
- Mmes [M] et [S] pour le lot n° 5,
- Mme [B] pour le n° 6,
- MM. [A] et [C] [H] pour le lot n° 7.

6. Les travaux n'ont pas été achevés.

7. Les acquéreurs ont assigné l'assureur dommages-ouvrage, le notaire, le vendeur représenté par son liquidateur, ainsi que les constructeurs et leurs assureurs, en réparation de leurs préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur les deuxième et troisième moyens, réunis

Enoncé des moyens

9. Par son deuxième moyen, la société Quarta fait grief à l'arrêt du 20 janvier 2022 de la condamner, in solidum avec la société Amtrust International Underwriters Ltd, Mme [N] et la société AA ingénierie.com, à payer aux acquéreurs la somme de 814 182,58 euros TTC à raison de 20 % à la charge de la société Quarta, 20 % à la charge de Mme [N] et 60 % à la charge de la société AA ingénierie.com, et, en conséquence, de la condamner, avec la société AA ingénierie.com, à garantir Mme [N] au titre de cette condamnation dans ces limites, alors « que seul ouvre droit à réparation le dommage en lien causal direct et certain avec la faute contractuelle ; que la cour d'appel a retenu une faute de la société Quarta consistant à ne pas avoir transmis au maître de l'ouvrage les plans de contrôle de l'implantation de ces pavillons, mal positionnés par l'entreprise de gros oeuvre ; qu'en considérant que cette faute avait contribué à hauteur de 20 % à l'obligation de démolir tous les travaux exécutés et à l'impossibilité de respecter les délais de livraison, et en condamnant en conséquence dans cette proportion la société Quarta à payer aux acquéreurs le coût de démolition/reconstruction de l'ensemble des sept pavillons composant le hameau, sans rechercher si, ainsi que le faisait valoir la société Quarta, le plan d'implantation qu'elle avait réalisé n'avait pas été respecté pour quatre des sept pavillons, de sorte que la faute du géomètre était en toute hypothèse sans lien avec la nécessité de démolir ces trois pavillons, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil. »

10. Par son troisième moyen, la société Quarta fait grief à l'arrêt du 20 janvier 2022 de la condamner in solidum avec Mme [N], Mme [D], la société AA ingénierie.com, et la société Office du carré - notaires, à verser tant aux différents acquéreurs la somme de 53 000 euros au titre du préjudice de jouissance et celle de 6 000 euros au titre du préjudice moral, à raison de 17 % à la charge de la société Quarta et de Mme [N] chacune, de 10 % à la charge de Mme [D] et de la société Office du carré - notaires chacune, et de 46 % à la charge de la société AA ingénierie.com, de la condamner, avec la société Office du carré - notaires, la société AA ingénierie.com et Mme [D], à garantir Mme [N] des condamnations à sa charge dans ces limites, de la condamner, avec Mme [N], la société AA ingénierie.com et Mme [D], à garantir la société Office du carré - notaires, des condamnations dans ces limites, et de la condamner, avec Mme [N], la société AA ingénierie.com et la société Office du carré à garantir Mme [D] de cette condamnation dans ces limites, alors « que seul ouvre droit à réparation le dommage en lien causal direct et certain avec la faute contractuelle ; que la cour d'appel a retenu une faute de la société Quarta consistant à ne pas avoir transmis au maître de l'ouvrage les plans de contrôle de l'implantation de ces pavillons, mal positionnés par l'entreprise de gros oeuvre ; qu'en condamnant la société Quarta, in solidum avec Mme [N], la société AA Ingénierie.com, Mme [D] et la société Office du Carré, à payer aux propriétaires de chaque immeuble la somme de 53 000 euros au titre de leur préjudice de jouissance et celle de 6 000 euros au titre de leur préjudice moral, sans rechercher si, ainsi que le faisait valoir la société Quarta, le plan d'implantation qu'elle avait réalisé n'avait pas été respecté pour quatre des sept pavillons, de sorte que la faute du géomètre était en toute hypothèse sans lien avec les préjudices moraux et de jouissance des propriétaires de ces trois pavillons, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

11. Aux termes de ce texte, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

12. Pour condamner la société Quarta à indemniser l'ensemble des acquéreurs du coût des travaux de démolition-reconstruction des sept maisons, de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral, l'arrêt retient qu'en ne communiquant pas au maître de l'ouvrage le plan de contrôle du positionnement des dalles, le géomètre a privé celui-ci d'une information essentielle relative aux irrégularités du chantier par rapport à l'autorisation administrative et aux contrats de vente et que cette faute a contribué à l'obligation de démolir les travaux exécutés et à l'impossibilité de respecter le délai de livraison, de sorte qu'il doit être tenu des préjudices qui en découlent.

13. En se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le plan de contrôle des implantations ne révélait un décalage par rapport au plan d'implantation que pour certaines maisons, sans s'expliquer sur le lien de causalité entre la faute commise par la société Quarta et le préjudice subi par les acquéreurs dont la maison avait été implantée conformément aux plans du géomètre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant la société Quarta à payer diverses sommes au titre des préjudices des acquéreurs entraîne la cassation de tous les chefs de dispositif répartissant la dette entre les co-débiteurs, qui s'y rattachent par un de dépendance nécessaire.

Mise hors de cause

15. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause la MAF, M. [K] et M. [Y], dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour de renvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :

- condamne in solidum la société Amtrust International Underwriters Ltd, Mme [N], la société AA ingénierie.com, la société Quarta à payer aux consorts [S]-[M], aux consorts [H], à Mme [V], Mme [B], Mme [O], M. [F], M. [Z], ensemble, la somme de 814 182,58 euros TTC, indexée sur l'évolution de l'indice BT 01 entre la date du dépôt du rapport d'expertise et le jugement puis avec intérêt au taux légal,
- fixe la contribution à la dette comme suit : 20 % à la charge de la société Quarta, 20% à la charge de Mme [N], 60 % à la charge de la société AA ingénierie.com,
- condamne la société AA ingénierie.com et la société Quarta à garantir Mme [N] au titre de cette condamnation dans ces limites,
- condamne Mme [N] à garantir la société AA ingénierie.com de cette condamnation dans ces limites,
- condamne in solidum Mme [N], Mme [D], la société AA ingénierie.com, la société Quarta, la société Office du carré - notaires, à verser tant aux consorts [S]-[M] et [H], qu'à Mme [V], Mme [B], Mme [O], M. [F], M. [Z] la somme de 53 000 euros au titre du préjudice de jouissance et la somme de 6 000 euros au titre du préjudice moral,
- fixe la contribution à la dette comme suit : Mme [N] et la société Quarta : 17 % chacune, Mme [D] et la société Office du carré : 10% chacune, la société AA ingénierie.com : 46%,
- condamne la société Quarta, la société Office du carré, la société AA ingénierie.com et Mme [D] à garantir Mme [N] des condamnations à sa charge dans ces limites,
- condamne Mme [N], la société AA ingénierie.com, Mme [D] et la société Quarta à garantir la société Office du carré - notaires, des condamnations dans ces limites,
- condamne Mme [D], Mme [N], la société Office du carré à garantir la société AA ingénierie.com de cette condamnation dans ces limites,
- condamne Mme [N], la société AA ingénierie.com, la société Office du carré, la société Quarta à garantir Mme [D] de cette condamnation dans ces limites,
- et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

l'arrêt rendu le 20 janvier 2022 et rectifié le 27 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Met hors de cause la Mutuelle des architectes français, M. [K] et M. [Y] ;

Condamne Mme [V], M. [Z], M. [F], Mme [O], Mme [M], Mme [S], Mme [B], M. [A] [H] et M. [C] [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 32400138
Date de la décision : 07/03/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 20 janvier 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 mar. 2024, pourvoi n°32400138


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Le Prado - Gilbert, SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:32400138
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