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29/02/2024 | FRANCE | N°22400159

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 29 février 2024, 22400159


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 2


FD






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 29 février 2024








Rejet




Mme MARTINEL, président






Arrêt n° 159 F-D


Pourvoi n° G 22-19.944








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 FÉVRIER 2024


La caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 22-19.944 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2022 pa...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 février 2024

Rejet

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 159 F-D

Pourvoi n° G 22-19.944

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 FÉVRIER 2024

La caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 22-19.944 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2022 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre sécurité sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société [5], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la société [4], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés [5] et [4], et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 janvier 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 juin 2022), la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe (la caisse) a notifié, le 17 mai 2017, à la société [5] (l'employeur) une décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle, après avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, de la maladie déclarée par l'un de ses salariés (la victime).

2. L'employeur a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie de son salarié, alors :

« 1°/ que selon l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019, applicable au litige, en cas de saisine par la caisse primaire d'assurance maladie d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en application de l'article L. 461-1, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur demande l'avis motivé du médecin du travail et la communication du rapport établi par le service du contrôle médical visés aux 2° et 5° de l'article D. 461-29, il appartient à la caisse d'effectuer les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit, étant précisé que seules les conclusions administratives auxquelles ces documents ont pu aboutir sont communicables de plein droit à son employeur ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe justifie avoir effectué les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime dès lors qu'elle a adressé à celle-ci, le 7 décembre 2016, un courrier recommandé avec accusé de réception en ce sens, peu important que cette demande ait été faite en même temps que la notification de la consultation du dossier avant sa transmission au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et avant que l'employeur n'ait formulé une demande de consultation ; qu'en jugeant inopposable à la société [5] la décision de prise en charge de la maladie de M. [I] [O] [P] aux motifs que « La caisse ne peut soutenir avoir rempli ses obligations en adressant à l'assuré le 7 décembre 2016, dans sa lettre à l'occasion de la notification de la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la demande suivante rédigée ainsi : Votre employeur peut demander à consulter les pièces du dossier. Toutefois, je ne pourrais lui transmettre l'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par le service médical que par l'intermédiaire d'un médecin que vous aurez désigné à cet effet. Aussi il vous appartient de me communiquer les coordonnées de ce praticien dès réception du présent courrier, que contrairement à ce que la caisse soutient, le caractère impératif de cette lettre n'est qu'apparent dès lors qu'il est atténué par la mention selon laquelle l'employeur peut demander à consulter les pièces du dossier, ce qui n'est qu'une hypothèse » et que « faute pour la caisse, après réception de la lettre de l'employeur du 16 décembre 2016 sollicitant la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, d'avoir demandé à l'assuré de désigner un praticien pour prendre connaissance de ces deux avis médicaux, il y a lieu de retenir que la caisse a manqué à son obligation d'informer la société des éléments susceptibles de lui faire grief, de sorte que la décision de prise en charge de la pathologie de l'assuré doit lui être déclarée inopposable », la cour d'appel a violé les articles L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, et D. 461-29 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019 ;

2°/ que le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que dans son courrier du 16 décembre 2016 , la société [5] avait seulement demandé une copie des pièces consultatives du dossier et, s'agissant des documents médicaux (avis motivé du médecin du travail et rapport établi par le service médical), une transmission de leur copie au médecin conseil qu'elle avait mandaté, le docteur [G] ; qu'elle n'avait donc nullement demandé à la caisse de mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale afin d'obtenir la désignation par la victime d'un praticien qui prendrait connaissance du contenu de l'avis motivé du médecin du travail et du rapport établi par les services du contrôle médical ; qu'en affirmant que « faute pour la caisse, après réception de la lettre de l'employeur du 16 décembre 2016 sollicitant la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, d'avoir demandé à l'assuré de désigner un praticien pour prendre connaissance de ces deux avis médicaux, il y a lieu de retenir que la caisse a manqué à son obligation d'informer la société des éléments susceptibles de lui faire grief, de sorte que la décision de prise en charge de la pathologie de l'assuré doit lui être déclarée inopposable », la cour a dénaturé les termes clairs et précis du courrier du 16 décembre 2016 sur lequel elle s'est fondée, en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

3°/ en toute hypothèse, qu'il résulte des articles R. 441-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-756 du 7 juin 2016 et antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019, L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, et D. 461-29 et D. 461-30 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019, que ces textes prévoient l'information du salarié, de ses ayants droit et de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief avant la transmission du dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles mais nullement l'envoi d'une copie de la procédure en remplacement de la consultation sur place ; que le contradictoire est respecté dès lors que l'employeur a été informé par courrier de la possibilité de consulter le dossier et de faire valoir ses observations avant la fin de l'instruction et la décision de la CPAM, peu important l'envoi d'une copie incomplète du dossier dès lors que l'employeur n'a nullement invoqué l'absence de communication d'une pièce avant la saisine du CRRMP ; qu'en déclarant inopposable à la société [5] la décision de prise en charge de la maladie « radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 inscrite au tableau n° 98 : affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes, de M. [I] [O] [P] », aux motifs éventuellement adoptés que « le rapport du médecin conseil et de l'avis du service médical doivent figurer au dossier, constitué par la caisse et communicable à l'employeur, ou au médecin qu'il aura désigné, s'agissant des pièces médicales », la cour d'appel a violé les articles R. 441-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-756 du 7 juin 2016, L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, et D. 461-29 et D. 461-30 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019,

4°/ plus subsidiairement, que selon l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019, applicable au litige, en cas de saisine par la caisse primaire d'assurance maladie d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en application de l'article L. 461-1, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur demande l'avis motivé du médecin du travail et la communication du rapport établi par le service du contrôle médical visés aux 2° et 5° de l'article D. 461-29, il appartient à la caisse d'effectuer les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit, étant précisé que le rapport du médecin conseil et de l'avis du service médical ne sont pas communicables directement à l'employeur ou au médecin qu'il aura désigné, s'agissant des pièces médicales ; qu'en décidant le contraire, aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges, qu' : « Il résulte du dossier qu'une réponse partielle a été apportée par la caisse le 20 décembre 2016 au courrier en date du 16 décembre 2016 de la société [5] demandant l'envoi par voie postale des pièces constitutives du dossier de l'assuré [I] [O] [P] et désignant le docteur [G] pour recevoir la copie des documents médicaux de l'assuré (avis motivé du médecin du travail et rapport établi par le service médical) », la cour d'appel a violé les articles L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, et D. 461-29 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019. »

Réponse de la Cour

4. Le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par la cour d'appel, hors de toute dénaturation, du caractère suffisant des démarches effectuées par la caisse pour obtenir la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit, en vue de la communication au médecin désigné par l'employeur de l'avis motivé du médecin du travail et la communication du rapport établi par le service du contrôle médical visés aux 2° et 5° de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale.

5. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le second moyen

6. La caisse fait le même grief à l'arrêt, alors « que selon application de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles s'impose à la CPAM qui ne peut que notifier à l'employeur une décision de prise en charge ; qu'en application de l'article R. 142-24-2 du même code dans sa version en vigueur du 11 septembre 1996 au 1er janvier 2019 (devenu R. 142-17-2), lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1 le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1 ; qu'en déclarant inopposable à la société [5] la décision de prise en charge de la maladie « radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 inscrite au tableau n° 98 : affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes, de M. [I] [O] [P] », quand la caisse avait suivi l'avis d'un comité régional, que le différend portait sur l'origine professionnelle de la maladie et qu'il incombait à la juridiction, avant de statuer, de recueillir l'avis d'un autre comité régional, la cour d'appel a violé les articles L. 461-1, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, et R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 11 septembre 1996 au 1er janvier 2019, devenu R. 142-17-2. »

Réponse de la Cour

7. Selon l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, en cas de saisine par la caisse primaire d'assurance maladie d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en application de l'article L. 461-1, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur demande l'avis motivé du médecin du travail et la communication du rapport établi par le service du contrôle médical visés aux 2° et 5° de l'article D. 461-29, il appartient à la caisse d'effectuer les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit.

8. Ayant souverainement constaté que l'employeur avait demandé la transmission d'une copie des documents médicaux de consultation du dossier de l'assuré (avis motivé du médecin du travail et rapport établi par le service médical) à son médecin de recours et que la caisse n'avait pas satisfait aux prescriptions de l' article précité, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, exactement déduit que la décision de reconnaissance du caractère professionnel de l'affection déclarée par la victime devait être déclarée inopposable à l'employeur.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe et la condamne à payer à la société [5] et à la société [4] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf février deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22400159
Date de la décision : 29/02/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 08 juin 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 29 fév. 2024, pourvoi n°22400159


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (président)
Avocat(s) : SARL Delvolvé et Trichet, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 12/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:22400159
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