LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 février 2024
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 76 F-D
Pourvoi n° U 22-21.219
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 FÉVRIER 2024
La société Le Train touristique de [Localité 3], société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 22-21.219 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2022 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige l'opposant à Mme [B] [P], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. David, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Le Train touristique de [Localité 3], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme [P], après débats en l'audience publique du 19 décembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. David, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 15 juin 2022), soutenant que Mme [P] lui avait, le 1er décembre 2018, consenti un bail commercial verbal sur un entrepôt et un local annexe, la société Le Train touristique de [Localité 3] a, le 18 juin 2020, assigné la susnommée en reconnaissance de l'existence d'un bail statutaire de neuf ans.
2. Exposant ne pas être propriétaire du bien loué, appartenant à la société civile immobilière Jonathan dont son mari était le gérant, Mme [P] a conclu à l'irrecevabilité des demandes de la société Le Train touristique de [Localité 3].
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen
4. La société Le Train touristique de [Localité 3] fait grief à l'arrêt de déclarer toutes ses demandes irrecevables, alors :
« 1°/ que le bail de la chose d'autrui produit ses effets entre bailleur et preneur tant que celui-ci en a la jouissance paisible de la part du propriétaire à qui il est inopposable ; qu'en disant irrecevables les demandes de la société Le train touristique de [Localité 3] formées contre Mme [P] au prétexte inopérant qu'elle n'était pas propriétaire du bien immobilier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1709 et 1713 du code civil ;
2°/ que le bail de la chose d'autrui produit ses effets entre bailleur et preneur tant que celui-ci en a la jouissance paisible de la part du propriétaire à qui il est inopposable ; qu'en disant irrecevables les demandes de la société Le train touristique de [Localité 3] formées contre Mme [P] au prétexte inopérant que le preneur aurait dû vérifier l'identité du propriétaire des lieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1709 et 1713 du code civil. » Réponse de la Cour
Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile :
5. Il résulte de ces textes que tout jugement doit être motivé à peine de nullité. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
6. Pour déclarer irrecevables les demandes de la société Le Train touristique de [Localité 3], l'arrêt retient qu'une action en reconnaissance d'un droit au bail sur des immeubles ne peut être engagée qu'à l'encontre du propriétaire desdits immeubles.
7. En statuant ainsi, en laissant sans réponse les conclusions de la société Le Train touristique de [Localité 3] qui soutenait que le bail de la chose d'autrui était valable dans les rapports entre le locataire et le bailleur non-propriétaire du bien loué, de sorte qu'elle était recevable à agir à l'encontre de Mme [P] et avait un intérêt et légitime au succès de sa prétention, la cour d'appel a méconnu les exigences du premier des textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse autrement composée ;
Condamne Mme [P] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [P] et la condamne à payer à la société Le Train touristique de [Localité 3] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille vingt-quatre.