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31/01/2024 | FRANCE | N°52400126

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 janvier 2024, 52400126


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


HP






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 31 janvier 2024








Cassation




M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 126 F-D


Pourvoi n° A 22-19.822




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
___________________

______




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 31 JANVIER 2024


Mme [F] [I], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 22-19.822 contre le jugement rendu le 3 juin 2022 par le conseil de prud'hommes ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

HP

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 janvier 2024

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 126 F-D

Pourvoi n° A 22-19.822

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 31 JANVIER 2024

Mme [F] [I], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 22-19.822 contre le jugement rendu le 3 juin 2022 par le conseil de prud'hommes de Montpellier, dans le litige l'opposant à la société Clinique [3], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [I], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Clinique [3], après débats en l'audience publique du 20 décembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu
le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Montpellier, 3 juin 2022), Mme [I] a été engagée en qualité d'infirmière diplômée d'Etat le 1er novembre 2013 par la société Clinique [3] (la société). Elle exerce plusieurs mandats syndicaux.

2. Par lettre du 24 septembre 2021, la société a accepté la demande de la salariée de congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale, sous réserve de pouvoir constater, au préalable et au plus tard avant son départ en formation, le respect de son obligation vaccinale, en se référant à la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire.

3. Soutenant que l'employeur ajoutait une condition injustifiée à l'obtention du congé sollicité, la salariée a saisi le bureau de jugement de la juridiction prud'homale selon la procédure accélérée au fond le 23 novembre 2021 aux fins de condamner la société à lui verser diverses sommes en remboursement des jours pris sur ses congés payés au titre des jours initialement prévus pour le congé de formation, au titre du préjudice moral et matériel subi du fait de l'impossibilité de suivre cette formation, ainsi qu'à titre de dommages-intérêts sur le fondement des articles L. 1132-1 et L. 1121-1 du code du travail. Elle a demandé en outre d'ordonner à la société de faire droit à sa nouvelle demande de congés sous astreinte et, à défaut, de la condamner à lui verser des dommages-intérêts pour perte de chance d'en bénéficier.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief au jugement de juger ses demandes irrecevables et de se déclarer dessaisi, alors « que le congé de formation économique, sociale et environnementale et de formation syndicale est de droit, sauf dans le cas où l'employeur estime, après avis conforme du comité social et économique, que cette absence pourrait avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en cas de différend, le refus de l'employeur peut être directement contesté devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes qui statue en dernier ressort selon la procédure accélérée au fond ; que l'accord donné par l'employeur à une demande de congé de formation économique, sociale et environnementale et de formation syndicale, lorsqu'il est assorti d'une condition, peut, en cas de différend, être contesté par le salarié concerné dans les mêmes conditions qu'un refus pur et simple ; qu'en l'espèce après avoir constaté que la société avait accepté les demandes de congé de formation économique, sociale environnementale et syndicale faites par la salariée sous réserve de pouvoir constater au préalable qu'elle était vaccinée, pour juger irrecevables ses demandes, le conseil de prud'hommes a retenu qu'en l'absence de refus de l'employeur, l'application des articles L. 2145-11 et R. 2145-5 du code du travail était impossible ; qu'en statuant ainsi alors qu'en l'absence d'accord pur et simple de l'employeur, la salariée était fondée à contester sa décision selon la procédure prévue par les articles susvisés du code du travail, le conseil de prud'hommes a violé lesdits articles. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. La société conteste la recevabilité du moyen comme invoquant une thèse incompatible avec celle soutenue devant les juges du fond en ce que la salariée n'aurait pas soutenu que l'accord sous condition qui lui avait été notifié était assimilable à un refus.

6. Cependant la salariée a soutenu devant la juridiction prud'homale que la société ajoutait une condition illégale à l'exercice du congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale et que son refus injustifié l'avait affectée tant moralement que matériellement.

7. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 2145-11 et R. 2145-5 du code du travail :

8. Aux termes de l'article L. 2145-11 du code du travail, le congé de formation économique, sociale et environnementale et de formation syndicale est de droit, sauf dans le cas où l'employeur estime, après avis conforme du comité social et économique, que cette absence pourrait avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l'entreprise. Le refus du congé par l'employeur est motivé. En cas de différend, le refus de l'employeur peut être directement contesté devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

9. L'article R. 2145-5 du même code précise que le refus du congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale par l'employeur est notifié à l'intéressé dans un délai de huit jours à compter de la réception de sa demande. En cas de différend, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes saisi en application de l'article L. 2145-11 statue en dernier ressort, selon la procédure accélérée au fond.

10. Pour juger la salariée irrecevable à saisir directement le bureau de jugement du conseil de prud'hommes du différend l'opposant à son employeur, le jugement retient que par lettre du 24 septembre 2021 l'employeur a indiqué accéder à la demande de la salariée, qu'en janvier 2022 il s'est enquis de son inscription et que la salariée lui a répondu ne pouvoir participer au motif que toutes les places étaient pourvues. Il retient qu'en l'absence de refus de l'employeur, la salariée ne peut user de la procédure prévue par les articles L. 2145-11 et R. 2145-5 et doit saisir le bureau de conciliation.

11. En statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que par lettre du 24 septembre 2021, l'employeur avait accepté la demande de la salariée sous réserve de pouvoir constater au préalable qu'elle était vaccinée contre la covid-19, ce dont il résultait que cette acceptation sous condition équivalait à un refus au sens des articles L. 2145-11 et R. 2145-5 du code du travail, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 juin 2022, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Montpellier ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Béziers ;

Condamne la société Clinique [3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Clinique [3] et la condamne à payer à Mme [I] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400126
Date de la décision : 31/01/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montpellier, 03 juin 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 jan. 2024, pourvoi n°52400126


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 06/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400126
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