LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
IT2
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 janvier 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 58 F-D
Pourvoi n° U 21-22.204
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 18 JANVIER 2024
M. [E] [D], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 21-22.204 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1 (sur renvoi de cassation)), dans le litige l'opposant à M. [Y] [V], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [D], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [V], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 novembre 2023 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 juillet 2021), statuant sur renvoi après cassation (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 19-17.721), et les productions, M. [V] a été condamné, le 3 avril 2006, par un jugement assorti de l'exécution provisoire et confirmé par un arrêt du 23 février 2010, à payer une certaine somme à M. [D] qui a fait procéder, le 12 septembre 2006, à la saisie d'un véhicule automobile appartenant à M. [V].
2. Auparavant, par jugement du 2 septembre 2007, un juge de l'exécution a rejeté la demande de mainlevée formée par M. [V] qui soutenait que le véhicule saisi, nécessaire à son activité professionnelle, était insaisissable. Ce jugement a été infirmé par un arrêt du 29 juin 2009 qui a ordonné la mainlevée de la saisie.
3. Le véhicule ayant, entre-temps, été vendu aux enchères publiques, M. [V] a saisi un tribunal de grande instance aux fins d'indemnisation de divers préjudices.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
5. M. [D] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. [V] la somme de 29 500 euros, correspondant à la contre-valeur du véhicule Mercédès saisi au mois de septembre 2006 et, y ajoutant, de le condamner à payer à M. [V] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens d'appel, alors :
« 1°/ que, selon l'article L. 111-10 du Code des procédures civiles d'exécution, « sous réserve des dispositions de l'article L. 311-4, l'exécution forcée peut être poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire à titre provisoire. L'exécution est poursuivie aux risques du créancier. Celui-ci rétablit le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent si le titre est ultérieurement modifié » ; qu'en l'espèce, la saisie litigieuse avait pour objet le paiement d'une dette définitivement due par le débiteur, ce dont il résultait que le paiement n'était pas indu au moment de l'exécution de la saisie et qu'il ne l'est pas devenu après l'annulation de la saisie litigieuse ; qu'en condamnant néanmoins Monsieur [D] à payer à Monsieur [Y] [V] la somme de 29.500 €, la Cour d'appel, qui n'a pas rétabli « le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent » avant la saisie litigieuse, a violé les dispositions de l'article L. 111-10 du Code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que le paiement d'une dette définitivement due ne peut constituer un préjudice réparable pour le débiteur ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel (p. 11 et 12), Monsieur [D] avait fait valoir que « seules les conséquences dommageables peuvent être réparées sur le fondement de l'article L.110 du code des procédures civiles d'exécution » et qu'en l'espèce, l'acte litigieux avait permis à Monsieur [V] d'apurer une partie de sa dette ; qu'en énonçant que Monsieur [D] « doit assumer la réparation intégrale des conséquences dommageables qui en découlent, ce indépendamment de la créance dont il peut disposer par ailleurs à l'égard de Monsieur [V] », cependant que ne pouvaient être qualifié de dommageable l'acte qui avait permis au débiteur d'apurer une partie de sa dette, la Cour d'appel a violé l'article L. 111-10 du Code des procédures civiles d'exécution ;
3°/ qu'en énonçant que Monsieur [D] « doit assumer la réparation intégrale des conséquences dommageables qui en découlent, ce indépendamment de la créance dont il peut disposer par ailleurs à l'égard de Monsieur [V] », sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, quelle aurait été la situation de Monsieur [V] si la saisie litigieuse n'avait pas eu lieu, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de la réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime. »
Réponse de la Cour
6. Ayant retenu à bon droit, après avoir relevé que par arrêt du 29 juin 2009, une cour d'appel avait estimé que la saisie avait été pratiquée en violation de l'article 39 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 qui prohibe la saisie des véhicules à usage professionnel et ordonné sa mainlevée, que M. [D] devait assumer la réparation intégrale des conséquences dommageables découlant de la vente du véhicule, indépendamment de la créance dont il peut disposer par ailleurs à l'égard de M. [V], le fait que la vente forcée du véhicule ait contribué au paiement de la somme due par M. [V] à M. [D] n'étant pas incompatible avec l'existence d'un préjudice dommageable, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche inopérante visée à la troisième branche, a légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-quatre.