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10/01/2024 | FRANCE | N°42400007

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 janvier 2024, 42400007


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


SH






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 10 janvier 2024








Cassation partielle




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 7 F-D


Pourvoi n° C 22-19.847








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________>



ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 JANVIER 2024


La société Campotrading, société de droit espagnol, dont le siège est [Adresse 1] (Espagne), a formé le pourvoi n° C 22-19.847 co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

SH

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 janvier 2024

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 7 F-D

Pourvoi n° C 22-19.847

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 JANVIER 2024

La société Campotrading, société de droit espagnol, dont le siège est [Adresse 1] (Espagne), a formé le pourvoi n° C 22-19.847 contre l'arrêt rendu le 24 mars 2022 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société Valsoleil, société civile agricole, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Regis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Campotrading, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Valsoleil, après débats en l'audience publique du 14 novembre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Regis, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 24 mars 2022), la société Valsoleil et la société Campotrading ont conclu un contrat de partenariat, pour une durée de trois ans à effet du 1er juin 2014, avec tacite reconduction.

2. Par un courriel du 11 avril 2016, la société Valsoleil a mis fin au contrat de manière anticipée.

3. La société Campotrading l'a assignée en indemnisation du fait de la rupture du contrat.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

5. La société Campotrading fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation du préjudice résultant de la perte de chance de voir le contrat de partenariat reconduit, alors « que constitue une perte de chance réparable, la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que les ventes opérées grâce à l'intervention du courtier ont représenté un chiffre d'affaires important pour la coopérative de l'ordre de plusieurs centaines de milliers d'euros, que cette dernière qui avait rompu brutalement les relations contractuelles, n'avait pas alerté le courtier, préalablement à la rupture du contrat, d'un manquement à ses obligations et que la rupture du contrat n'était pas justifiée par une faute de la société Campotrading, a néanmoins, pour débouter cette dernière de sa demande en réparation du préjudice résultant de la perte de chance de voir reconduit le contrat de partenariat après 2017, retenu qu'aucun élément ne permettait de retenir que ce partenariat aurait été reconduit, en raison de la spécificité de la production de la société Valsoleil et de ses difficultés à pouvoir opérer à l'exportation, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait qu'en l'absence de toute faute de la société Campotrading et compte tenu du succès du contrat de partenariat pour la société Valsoleil, la rupture brutale des relations contractuelles par cette dernière a fait perdre à la société Campotrading une chance de voir reconduire le contrat de partenariat après 2017, violant ainsi les articles 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

6. Ayant relevé que la société Valsoleil avait mis fin au contrat de manière anticipée, ce dont il résultait son intention de ne pas le reconduire au terme initialement fixé, la cour d'appel en a exactement déduit que le caractère fautif de cette résiliation ne pouvait pas être à l'origine d'une perte de chance de voir ce contrat reconduit.

7. Le moyen n'est pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La société Campotrading fait grief à l'arrêt de condamner la coopérative Valsoleil à ne lui payer que la seule somme de 9 000 euros au titre du préjudice subi du fait de la rupture abusive du contrat de partenariat, alors « que la rupture anticipée d'un contrat de partenariat, à durée déterminée, donne droit à réparation du préjudice résultant de la perte de commissions jusqu'à la date de fin de contrat originellement prévue ; qu'en se fondant, pour évaluer le préjudice subi par la société Campotrading résultant de la rupture anticipée du contrat de partenariat, sur la marge retirée des commissions qu'elle n'a pu encaisser en raison de la rupture anticipée du contrat, et non sur la perte de ses commissions, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article L. 134-12 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

9. La société Valsoleil conteste la recevabilité du moyen, en ce qu'il est nouveau, faute pour la société Campotrading d'avoir critiqué à ce titre les motifs des premiers juges devant la cour d'appel.

10. Cependant, le moyen n'est pas nouveau dès lors que, dans ses conclusions d'appel, la société Campotrading demandait le paiement d'une indemnité équivalente au montant des commissions qu'elle aurait dû percevoir jusqu'au 1er juin 2017 et l'infirmation à ce titre du jugement entrepris.

11. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

12. Pour fixer le montant des dommages et intérêts au paiement duquel la société Valsoleil est condamnée, pour rupture abusive du contrat à durée déterminée, l'arrêt retient que le préjudice de la société Campotrading doit être évalué en appliquant sur la moyenne des commissions que cette société aurait dû percevoir sur deux années, le taux de marge réalisé par les entreprises du même secteur.

13. En statuant ainsi, alors que la rupture anticipée du contrat donnait droit à réparation du préjudice résultant de la perte des commissions que la société Campotrading aurait dû percevoir jusqu'au terme du contrat initialement prévu, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

14. La cassation porte uniquement sur le montant des dommages et intérêts alloués par l'arrêt censuré en réparation du préjudice né de la rupture anticipée du contrat et non sur la responsabilité de la société Valsoleil.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à la somme de 9 000 euros la condamnation de la société Valsoleil à réparer le préjudice subi par la société Campotrading du fait de la rupture anticipée du contrat de partenariat, l'arrêt rendu le 24 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société Valsoleil aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Valsoleil et la condamne à payer à la société Campotrading la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400007
Date de la décision : 10/01/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 24 mars 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jan. 2024, pourvoi n°42400007


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400007
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