LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 décembre 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 813 F-D
Pourvoi n° F 22-15.871
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 DÉCEMBRE 2023
1°/ M. [L] [M], domicilié [Adresse 2],
2°/ M. [N] [M], domicilié [Adresse 3],
3°/ M. [Y] [M], domicilié [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° F 22-15.871 contre l'arrêt rendu, le 24 mars 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige les opposant à M. [X] [G], domicilié [Adresse 4], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Grandjean, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de MM. [L], [N] et [Y] [M], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [G], après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grandjean, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mars 2022), le 29 juin 1978, [E] et [I] [M], aux droits desquels viennent désormais MM. [L], [Y] et [N] [M] (les bailleurs), ont donné à bail commercial à M. [G] (le locataire), un hangar pour y exercer l'activité de réparation de véhicules automobiles et vente.
2. Le 22 mars 2018, le locataire a assigné les bailleurs en contestation du commandement de payer des loyers échus, notifié par eux le 8 février 2018 et en remboursement d'un trop-payé de loyers.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Les bailleurs font grief à l'arrêt d'annuler le commandement visant la clause résolutoire insérée au bail et de les condamner solidairement à restituer à M. [G] la somme de 64 548 euros au titre du trop-perçu de loyers, alors « que le caractère consensuel d'un contrat n'impose pas que les volontés contractuelles soient formulées de manière expresse, de sorte que si le silence ne vaut pas à lui seul acceptation, il n'en est pas de même lorsque les circonstances permettent de donner à ce silence la signification d'une acceptation ; qu'en l'espèce, les consorts [M] faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel, qu'ils avaient « hérité du bien immobilier au décès de leur deuxième parent, au mois de septembre 2017. C'est dans le cadre du règlement de cette succession que ces derniers ont récupéré les documents conservés par leurs parents dans leurs affaires personnelles, depuis des années, notamment concernant la location du local commercial à M. [G] »,mais que « dans ce contexte », ils n'avaient pas « retrouvé les justificatifs d'envoi et/ou les accusés de réception des courriers datant de 2004, 2007, 2010 et 2013 » ; qu'ils ajoutaient que « M. [X] [G] a parfaitement réceptionné les lettres recommandées et a accepté l'indexation appliquée », dès lors qu'il avait «toujours payé le montant exact des loyers révisés. En effet, aucune règle de forme n'est requise s'agissant des modalités d'acceptation de la révision du loyer, de sorte que cette acceptation peut résulter du règlement du loyer indexé » ; que la cour d'appel a elle-même relevé que les consorts [M] produisaient « plusieurs courriers datés respectivement du 14 décembre 2004, du 12 décembre 2007, du 21 décembre 2010, du 15 décembre 2013 et un dernier non daté qui évoque une prise d'effet au mois de juillet 2014 » ; qu'il résultait nécessairement du paiement exact, par M. [G], du montant des loyers révisés depuis la signature du bail en 1978, l'acceptation tacite, par ce dernier, des indexations successives appliquées par les bailleurs ; qu'en retenant au contraire que « le fait que le preneur ait payé le montant du loyer révisé selon l'indice du coût de la construction ne saurait valoir acceptation tacite de cette révision et ne peut dispenser les bailleurs de respecter la forme requise », la cour d'appel a violé les articles 1108 et 1134 (devenu 1103) du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
4. Pour condamner les bailleurs à restituer un trop-perçu de loyers correspondant aux révisions triennales, la cour d'appel a relevé que le bail prévoyait que la demande de révision devait être faite par les bailleurs par lettre recommandée avec demande d'avis de réception trois mois au moins avant l'expiration de la période triennale.
5. Ayant constaté, par une appréciation souveraine des éléments produits, que la preuve du respect de cette exigence formelle n'était pas rapportée, elle a pu en déduire que le seul paiement par le preneur du montant du loyer révisé selon l'indice du coût de la construction ne valait ni renonciation à cette disposition contractuelle ni acceptation tacite de cette révision.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. [L], [Y] et [N] [M] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. [L], [Y] et [N] [M] et les condamne à payer à M. [G] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-trois.