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09/11/2023 | FRANCE | N°22-11570

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 novembre 2023, 22-11570


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 novembre 2023

Cassation

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 1106 F-D

Pourvoi n° F 22-11.570

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2023

La société Elevage de l'Est, société civile d'exploitati

on agricole, dont le siège est[Adresse 1]l, [Localité 4], a formé le pourvoi n° F 22-11.570 contre l'arrêt rendu le 24 septembre 2021 par la cour ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 novembre 2023

Cassation

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 1106 F-D

Pourvoi n° F 22-11.570

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2023

La société Elevage de l'Est, société civile d'exploitation agricole, dont le siège est[Adresse 1]l, [Localité 4], a formé le pourvoi n° F 22-11.570 contre l'arrêt rendu le 24 septembre 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile TGI), dans le litige l'opposant à la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole (CRAMA) de la Réunion - Groupama Océan Indien, société d'assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 3], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Chauve, conseiller, les observations de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Elevage de l'Est, de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Réunion - Groupama Océan Indien, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 septembre 2023 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chauve, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 24 septembre 2021),
la société Elevage de l'Est, spécialisée dans l'élevage cunicole, assurée auprès de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Réunion - Groupama Océan Indien (l'assureur), a été confrontée courant janvier 2017 à l'infertilité des animaux reproducteurs de son élevage.

2. Une déclaration de sinistre a été enregistrée le 1er septembre 2017.

3. L'assureur ayant refusé sa garantie en invoquant la tardiveté de la déclaration de sinistre et l'absence de prise en charge des décès d'animaux causés par la maladie, la société Elevage de l'Est l'a assigné devant un tribunal à fin d'indemnisation de ses préjudices.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Elevage de l'Est fait grief à l'arrêt de la débouter de toutes ses demandes, alors « que le juge ne doit pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en retenant, pour exclure toute garantie en tant que le sinistre avait été déclaré tardivement et qu'il n'était justifié d'aucun cas de force majeure ou cas fortuit, qu'il résultait de l'article 4 du fascicule 4, relatif à la « Garantie G : Accidents d'élevage des volailles », que le sinistre devait être déclaré au plus tard dans les 24 heures « sous peine de perte du bénéfice des garanties du contrat sauf cas de force majeure ou cas fortuit », quand cet article, s'il prévoyait que la « déclaration doit être faite dès que vous avez connaissance du sinistre et au plus tard dans les 24 heures », stipulait que « si vous ne vous conformez pas aux obligations de cet article, sauf en cas de force majeure ou fortuit, nous pouvons vous réclamer une indemnité proportionnée aux dommages que ce manquement nous a causé », la cour d'appel, qui a dénaturé ce fascicule 4, a violé le principe susvisé » ;

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

5. Pour rejeter la demande de l'assurée, l'arrêt retient que l'article 4 du fascicule 4 indique que la déclaration de sinistre doit intervenir par tout moyen dans les 24 heures sous peine de perte du bénéfice du contrat sauf cas de force majeure ou cas fortuit, de sorte que la déclaration datée du 1er septembre 2017 apparaît tardive pour un sinistre survenu en début d'année 2017.

6. En statuant ainsi, alors que l'article 4 précité stipulait dans son dernier paragraphe que « si vous ne vous conformez pas aux obligations de cet article, sauf en cas de force majeure ou fortuit, nous pouvons vous réclamer une indemnité proportionnée aux dommages que ce manquement nous a causé », la cour d'appel qui a dénaturé ce document, a violé le principe susvisé.

Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

7. La société Elevage de l'Est fait le même grief à l'arrêt alors « que l'assureur qui oppose une exclusion de garantie doit rapporter la preuve de la réunion des conditions de fait de celle-ci ; qu'en ajoutant, pour exclure toute garantie de l'assureur, que le fascicule 4, relatif à la garantie G sur les accidents d'élevage des volailles, excluait les dommages consécutifs à la maladie et que la société Elevage de l'Est avait déclaré une infertilité sur la totalité des reproducteurs, soit sur 40 lapins, outre qu'elle indiquait avoir fait des analyses vétérinaires, qui n'étaient pas produites, et ce alors qu'il résultait des attestations de son vétérinaire en date du 21 avril 2017 et 8 octobre 2016 qu'un vide sanitaire était nécessaire pour désinfecter les lieux et limiter « le microbisme des élevages » avec élimination de toute femelle à problème, ce qui laissait présumer l'existence d'une maladie, aucune pièce contraire n'étant produite venant infirmer cette présomption, quand il n'en ressortait pas que l'assureur avait rapporté la preuve des conditions de fait de l'exclusion qu'il invoquait, la cour a violé les articles 1315, devenu 1353, du code civil, et L. 113-1 du code des assurances »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

8. L'assureur conteste la recevabilité du moyen en raison de sa nouveauté.

9. Le moyen tiré de l'inversion de la charge de la preuve en matière de clause d'exclusion de garantie, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations de l'arrêt attaqué, est recevable comme étant de pur droit.

10. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 1353 du code civil et l'article L. 113-1 du code des assurances :

11. Il résulte de ces textes que c'est à l'assureur qui oppose une exclusion de garantie de rapporter la preuve de la réunion des conditions de fait de celle-ci.

12. Pour rejeter les demandes de la société Elevage de l'Est, après avoir relevé que le fascicule 4 relatif à la garantie G sur les accidents d'élevage des volailles, exclut les dommages consécutifs à la maladie, l'arrêt relève que cette société a déclaré une infertilité sur la totalité des reproducteurs soit sur 40 lapins, et a indiqué avoir fait des analyses vétérinaires qui ne sont toujours pas produites en cause d'appel, alors qu'il résulte des attestations de son vétérinaire, qu'un vide sanitaire était nécessaire pour désinfecter les lieux et limiter « le microbisme des élevages » avec élimination de toute femelle à problème, ce qui laisse présumer l'existence d'une maladie, et qu'aucune pièce contraire n'est produite.

13. En statuant ainsi, alors que les conclusions de l'assureur se bornaient à affirmer sans autre démonstration et offre de preuve que, même s'il n'a pas été possible d'identifier la cause de l'infertilité, les lapins concernés n'étaient pas en bonne santé, de sorte que l'assureur ne démontrait pas que les dommages étaient survenus du fait d'une maladie, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée ;

Condamne la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Réunion - Groupama Océan Indien aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole de la Réunion - Groupama Océan Indien et la condamne à payer à la société Elevage de l'Est la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22-11570
Date de la décision : 09/11/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint Denis de la Réunion, 24 septembre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 nov. 2023, pourvoi n°22-11570


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet François Pinet, SCP Jean-Philippe Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.11570
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