LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 septembre 2023
Cassation
Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 949 F-B
Pourvoi n° U 21-22.020
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 SEPTEMBRE 2023
L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Limousin, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-22.020 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association [3], dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Labaune, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF du Limousin, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de l'association [3], et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 juin 2023 où étaient présents Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Labaune, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 1er juillet 2021), l'association [3] (l'association) a sollicité de l'URSSAF du Limousin (l'URSSAF), le remboursement d'une certaine somme au titre de l'exonération des charges patronales prévue par l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, au bénéfice de son service d'accompagnement à la gestion financière, pour la période de décembre 2011 à septembre 2014.
2. L'URSSAF ayant rejeté cette demande, l'association a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
3. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'accueillir ce recours, alors « que seules peuvent bénéficier de l'exonération des cotisations patronales prévue à l'article L. 241-10, III du code de la sécurité sociale les rémunérations versées aux aides à domicile qui exécutent des missions d'aide à domicile, c'est-à-dire des activités de services à la personne à domicile prévues à l'article D. 7231-1 du code du travail ; que les structures qui, comme l'association, mettent en oeuvre les mesures de protection des majeurs ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure d'accompagnement judiciaire, n'exécutent pas des activités d'assistance administrative à domicile au sens de l'article D. 7231-1 du code du travail et n'ont pas une mission d'aide à domicile, peu important qu'elles contribuent à la gestion financière et administrative de personnes protégées ; que les rémunérations versées aux salariés de ces services ne peuvent donc bénéficier de l'exonération précitée ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 241-10, III du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 applicable au litige, ensemble l'article D. 7231-1 du code du travail, les articles L. 471-1 à L. 471-4 du code l'action sociale et des familles et les articles 425, 433 et 440 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses :
4. Selon ce texte, sont exonérées de cotisations patronales d'assurances sociales et d'allocations familiales, les rémunérations versées aux aides à domicile employées, dans les conditions qu'il fixe, par les organismes habilités au titre de l'aide sociale ou ayant passé convention avec un organisme de sécurité sociale.
5. La mise en oeuvre, d'une part, de mesures de protection des majeurs ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure d'accompagnement judiciaire et, d'autre part, de mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial, mentionnées à l'article L. 312-1, 14° et 15°, du code de l'action sociale et des familles, ne revêt pas le caractère de tâches d'aide à domicile au sens du I de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, de sorte que la rémunération de ceux qui y procèdent n'ouvre pas droit, pour l'employeur, à l'exonération prévue par le III du même texte.
6. Pour dire que l'association peut bénéficier de l'exonération litigieuse, l'arrêt constate que celle-ci a reçu l'autorisation visée à l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles pour la création d'un service de mandataires judiciaires à la protection des majeurs et d'un service délégué aux prestations familiales en vue d'exercer des mesures d'aide à la gestion du budget familial. Il en déduit que l'association est habilitée au titre de l'aide sociale. Il ajoute qu'elle gère un service de protection des majeurs ayant pour vocation de contribuer à la gestion financière et administrative en proposant un accompagnement adapté et un soutien aux personnes reconnues fragiles ou en perte d'autonomie qui occupent leur propre logement, les bénéficiaires étant soit des personnes en perte d'autonomie ou en situation de handicap et des personnes âgées de plus de 70 ans, dépendantes ou non.
7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans.
Condamne l'association [3] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association [3] et la condamne à payer à l'URSSAF du Limousin la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-trois par Mme Renault-Malignac, conseiller, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.