LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 septembre 2023
Cassation partielle
Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 939 F-D
Pourvoi n° U 21-14.752
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 SEPTEMBRE 2023
La caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-14.752 contre l'arrêt n° RG : 20/00314 rendu le 9 février 2021 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à la société [2], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [2], et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 juin 2023 où étaient présentes Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 9 février 2021), M. [X] (la victime), salarié de la société [2] (l'employeur) a déclaré le 18 avril 2018 une pathologie que la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale (la caisse) a prise en charge, après instruction, par décision du 24 août 2018, au titre d'une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite, tableau n° 57 A des maladies professionnelles.
2. L'employeur a contesté l'opposabilité de cette décision devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
3. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie déclarée par la victime, alors « que la première constatation médicale de la maladie professionnelle concerne toute manifestation de nature à révéler l'existence de cette maladie ; qu'en retenant, pour déclarer la décision de prise en charge inopposable à l'employeur, que le certificat médical du 15 septembre 2017 n'est conforté par aucun document médical, sans prendre en considération l'avis favorable du médecin-conseil, qui fixait à la date du 15 septembre 2017 la première constatation médicale de l'affection déclarée en se fondant sur ledit certificat, et alors que la première constatation médicale de la maladie professionnelle n'est pas soumise aux mêmes exigences de forme que le certificat médical accompagnant la déclaration de cette maladie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 461-1 et L. 461-2 du Code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 461-1, L. 461-2 et D. 461-1-1 du code de la sécurité sociale :
4. Il résulte de la combinaison de ces textes que la première constatation médicale de la maladie professionnelle exigée au cours du délai de prise en charge écoulé depuis la fin de l'exposition au risque concerne toute manifestation de nature à révéler l'existence de cette maladie, que la date de la première constatation médicale est celle à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin avant même que le diagnostic soit établi et qu'elle est fixée par le médecin conseil.
5. Pour juger inopposable à l'employeur la décision de prise en charge, l'arrêt relève que la pathologie déclarée sur la base d'un certificat médical initial fixant la date de première constatation médicale au 28 février 2018 a été prise en charge au titre du tableau n° 57 A des maladies professionnelles qui prévoit un délai de prise en charge d'un an, et que le salarié a cessé d'être exposé le 10 janvier 2017. Il observe que selon la caisse, le délai de prise en charge est respecté, dès lors que le colloque médico-administratif se réfère à un certificat médical du 15 septembre 2009 [lire 2017]. Il retient que ce dernier n'est cependant conforté par aucun élément médical, de sorte que la déclaration de maladie professionnelle a été effectuée sur la base d'un certificat médical établi au delà du délai de prise en charge.
6. En se déterminant ainsi, sans prendre en considération l'avis favorable du médecin conseil qui fixait à la date du 15 septembre 2017 la première constatation médicale de l'affection déclarée en se fondant sur le certificat médical établi à cette date, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare le recours de la société [2] recevable, l'arrêt rendu le 9 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne la société [2] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [2] et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-trois par Mme Renault-Malignac, conseiller, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.