LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 27 septembre 2023
Cassation partielle
Mme GUIHAL, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 549 F-D
Pourvoi n° Z 22-18.372
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 27 SEPTEMBRE 2023
M. [P] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 22-18.372 contre l'arrêt rendu le 31 mars 2022 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [Z] [L], notaire, domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [H], après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents Mme Guihal, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 31 mars 2022), le 12 septembre 2019, par un acte sous seing privé stipulant la constitution d'un séquestre entre les mains de M. [L] (le notaire), M. [H] (le vendeur) a vendu à M. [U] (l'acquéreur) une maison individuelle sous diverses conditions suspensives.
2. La somme prévue à titre de séquestre n'a pas été remise par l'acquéreur au notaire.
3. Après vaine mise en demeure de réitérer la vente, le vendeur a assigné l'acquéreur en résolution de la vente et le notaire en responsabilité et indemnisation.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
4. Le vendeur fait grief à l'arrêt de dire que le notaire n'a commis aucune faute dans l'exercice de sa mission et de rejeter les demandes formées contre celui-ci, alors « qu'en tant que notaire rédacteur de l'acte, Me [L] pouvait, en application de l'alinéa 2 de l'article L. 271 du code de la construction et de l'habitation, recevoir un versement de l'acquéreur avant l'expiration du délai de rétractation, étant un professionnel disposant d'une garantie financière affectée au remboursement des fonds déposés ; qu'en énonçant que, quand bien même, il serait à l'origine de la rédaction de la clause litigieuse, il n'en demeure pas moins que compte tenu de l'objet de la promesse de vente et de la qualité de non professionnel de l'acquéreur, il ne pouvait exiger de ce dernier un versement anticipé antérieur à la signature de l'acte sous seing privé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 271, alinéa 2, du code de la construction et de l'habitation :
5. Il résulte de ce texte que, lorsqu'un acte ayant pour objet l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation est conclu par l'intermédiaire d'un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, un versement peut être reçu de l'acquéreur s'il est effectué entre les mains d'un professionnel disposant d'une garantie financière affectée au remboursement des fonds déposés.
6. Pour rejeter la demande formée contre le notaire, l'arrêt retient, d'abord, que ce dernier n'est intervenu à l'acte qu'en qualité d'intermédiaire, ensuite,
que, quand bien même il serait à l'origine de la rédaction de la clause de séquestre le désignant, aucun versement ne pouvait être exigé de l'acquéreur avant le jour de l'établissement de l'acte sous seing privé.
7. En statuant ainsi, alors qu'il incombait au notaire de s'assurer de la remise des fonds prévus à titre de séquestre lors de la signature de l'acte sous seing privé, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. [L] n'a commis aucune faute dans l'exercice de sa mission et rejette les demandes formées contre celui-ci, l'arrêt rendu le 31 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre autrement composée ;
Condamne M. [L] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [L] à payer à M. [H] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois.