LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 septembre 2023
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 648 F-D
Pourvoi n° H 22-14.170
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 SEPTEMBRE 2023
La société Compagnie Chaix II, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 22-14.170 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2022 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la Banque populaire Méditérranée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Banque Chaix ayant fait l'objet d'une fusion absorption par la société Banque Populaire Provençale et Corse, défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations et les plaidoiries de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Compagnie Chaix II, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la Banque populaire Méditérranée, et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, auquel la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret a répliqué, après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, M. Sturlèse, avocat général et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 janvier 2022) et les productions, la société Compagnie financière Chaix, aux droits de laquelle est venue la société Compagnie Chaix II a, par une convention unique, donné à bail commercial à la société Banque Chaix, quarante-cinq locaux distincts, à usage de banque.
2. Le 15 mai 2013, la bailleresse et sa locataire ont conclu un protocole d'accord transactionnel, ayant pour objet d'organiser la résiliation du bail et la restitution des locaux.
3. Contestant la présence de coffres et armoires-coffres non fixés au sol et au mur dans certaines agences, la société Compagnie Chaix II, qui avait refusé la restitution de certains locaux pour ce motif, a assigné la société Banque Chaix, aux droits de laquelle est venue la société Banque populaire Méditerranée (la société BPM), en condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La société Compagnie Chaix II fait grief à l'arrêt de révoquer l'ordonnance de clôture et de fixer la nouvelle clôture de la procédure au 10 décembre 2021, alors « que le juge ne peut révoquer l'ordonnance de clôture après la clôture des débats sans prononcer la réouverture de ceux-ci ; qu'en révoquant, après la clôture des débats, l'ordonnance de clôture en date du 2 décembre 2021, en fixant la nouvelle clôture au 10 décembre 2021, afin d'admettre les conclusions et la nouvelle pièce communiquées par la Banque Chaix le 9 décembre 2021 et en statuant au fond, sans ordonner la réouverture des débats, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 784 du même code, dans sa rédaction applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
5. La société BPM conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que la société Compagnie Chaix II est sans intérêt à critiquer la révocation de l'ordonnance de clôture et la fixation d'une nouvelle clôture qu'elle avait elle-même demandée, l'arrêt ayant relevé, en outre, qu'elle ne s'était pas opposée à l'admission des conclusions et de la pièce déposées après clôture, en sorte que le moyen est également contraire à la position soutenue devant les juges du fond.
6. Cependant, la société Compagnie Chaix II ayant seulement demandé la révocation de l'ordonnance de clôture pour voir admettre ses propres conclusions déposées le 2 décembre 2021, et dès lors qu'il ne résulte pas des motifs de l'arrêt qu'elle aurait accepté à l'audience que l'affaire soit retenue en l'état des pièces et conclusions récapitulatives déposées par la société BPM le 9 décembre 2021, le moyen n'est pas contraire à sa position et celle-ci dispose d'un intérêt à critiquer l'arrêt de ce chef.
7. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 16 et 784, devenu 803, du code de procédure civile :
8. Il résulte de ces textes que lorsque le juge révoque l'ordonnance de clôture, cette décision, qui doit être motivée par une cause grave, doit intervenir avant la clôture des débats ou, à défaut, s'accompagner de leur réouverture.
9. L'arrêt ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture et fixe rétroactivement la nouvelle clôture de la procédure au 10 décembre 2021, pour admettre les conclusions et une pièce n° 123 déposées par la société BPM, le 9 décembre 2021, puis, infirme partiellement le jugement.
10. En statuant ainsi, sans ordonner la réouverture des débats, alors qu'une même décision ne peut simultanément révoquer l'ordonnance de clôture et statuer sur le fond du litige, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Banque populaire Méditerranée aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé le vingt et un septembre deux mille vingt-trois par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile .