LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 septembre 2023
Cassation partielle
Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 840 F-D
Pourvoi n° X 21-22.966
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 SEPTEMBRE 2023
Mme [Z] [J], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 21-22.966 contre l'arrêt rendu le 2 septembre 2021 par la cour d'appel de Nancy (chambre de l'exécution - JEX), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Crédit logement, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6],
2°/ à la Société générale, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à la caisse de Crédit mutuel de [Localité 10], dont le siège est [Adresse 1],
4°/ à la société Crédit lyonnais, dont le siège est [Adresse 3],
5°/ à l'agent comptable du pôle de recouvrement spécialisé de Meurthe-et-Moselle, domicilié [Adresse 9],
6°/ au syndicat des copropriétaires de la résidence du Clos des graviers, représenté par son syndic, la société Nexity, dont le siège est [Adresse 7],
défendeurs à la cassation.
La société Crédit logement et la société Crédit lyonnais ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, sept moyens de cassation.
Les demanderesses au pourvoi incident invoque, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [J], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Crédit logement et la société Crédit lyonnais, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Société générale et du syndicat des copropriétaires de la résidence du Clos des graviers, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la caisse de Crédit mutuel de [Localité 10], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 2 septembre 2021), un commandement de payer valant saisie immobilière des biens et droits immobiliers dépendant d'un immeuble sis à [Localité 8] a été délivré à Mme [J] le 10 janvier 2019.
2. Par un jugement d'orientation, un juge de l'exécution a statué sur les sommes dues au créancier poursuivant et aux créanciers inscrits et ordonné la vente forcée du bien.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en sa première branche, le quatrième moyen, le cinquième moyen, le sixième moyen, et sur le moyen du pourvoi incident
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
4. Mme [J] fait grief à l'arrêt de fixer la créance du Crédit logement, créancier inscrit, au titre du jugement du 14 décembre 2009, au total, sauf mémoire, à la somme de 84 386,41 euros, alors que « lorsque la signification à personne s'avère impossible, la signification peut être faite à domicile ou résidence ; que dans ce cas, l'huissier doit mentionner dans son acte les vérifications effectuées pour s'assurer que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée ; qu'en l'espèce, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en exécution du jugement du 14 décembre 2009 du tribunal de grande instance de Nancy, la cour d'appel a considéré que les investigations de l'huissier pour remettre ledit jugement à Mme [J] paraissaient suffisantes pour établir la certitude du domicile en ce qu'il a mentionné « courrier de la poste » après avoir indiqué « personne n'est présent ou ne répond à mes appels » ; qu'en statuant ainsi, alors que ces diligences étaient insuffisantes à établir la réalité du domicile de Mme [J] au [Adresse 5], à [Localité 10], qui était contesté par la destinataire de l'acte, la cour d'appel a violé les articles 655 et 656 du code de procédure civile et 3-1 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte des articles 655 et 656 du code de procédure civile que si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré à domicile, l'huissier de justice devant relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances qui l'en ont empêché, ainsi que les vérifications effectuées pour s'assurer que le destinataire de l'acte demeure bien à l'adresse indiquée.
6. Ayant constaté, en réponse à la contestation de la régularité de la signification faite le 15 janvier 2010 au [Adresse 5] à [Localité 10], que Mme [J] avait indiqué cette adresse dans la procédure d'appel et aussi dans un autre litige datant de février 2009, que des courriers d'organismes publics d'août à octobre 2007 ainsi qu'en mars 2008 y avaient été adressés et que les justificatifs versés aux débats ne démentaient pas son domicile à cette adresse, et ainsi fait ressortir l'absence de grief, c'est sans violer les dispositions précitées que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait.
7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Mais sur le septième moyen
Enoncé du moyen
8. Mme [J] fait grief à l'arrêt de constater que sa demande tendant à voir « ordonner la restitution de toutes sommes payées sur la base de ces hypothèques enregistrées illégalement », « à savoir paiement des créances et frais de mainlevées d'hypothèque », ne saisissait la cour d'aucune prétention alors « qu'une prétention est une demande soumise au juge pour qu'il la dise recevable et fondée ; qu'en l'espèce, en jugeant que la demande de Mme [J] tendant à voir « ordonner la restitution de toutes sommes payées sur la base de ces hypothèques enregistrées illégalement », « à savoir paiement des créances et frais de mainlevées d'hypothèque » ne la saisissait d'aucune prétention, la cour d'appel a violé les articles 30 et 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
9. Il résulte de ce texte qu'une demande non chiffrée n'est pas, de ce seul fait, irrecevable.
10. Pour rejeter la demande de Mme [J] tendant à voir ordonner la restitution de toutes sommes payées sur la base d'hypothèques enregistrées illégalement, l'arrêt retient qu'à défaut pour cette demande d'avoir été chiffrée, la cour d'appel n'est saisie d'aucune prétention.
11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Mise hors de cause
12. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause le syndicat des copropriétaires de la résidence du Clos des graviers, la Société générale, la société Crédit logement et la société Crédit lyonnais.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DIT n'y avoir lieu de mettre hors de cause le syndicat des copropriétaires de la résidence du Clos des graviers, la Société générale, la société Crédit logement et la société Crédit lyonnais ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a constaté que la demande tendant à voir ordonner la restitution de toutes sommes payées sur la base d'hypothèques enregistrées illégalement ne saisissait la cour d'aucune prétention, l'arrêt rendu le 2 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société Crédit logement, la Société générale, la caisse de Crédit mutuel de [Localité 10], la société Crédit lyonnais, l'agent comptable du pôle de recouvrement spécialisé de Meurthe-et-Moselle et le syndicat des copropriétaires de la résidence du Clos des graviers aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société Crédit logement, la Société générale, la caisse de Crédit mutuel de [Localité 10], la société Crédit lyonnais, le syndicat des copropriétaires de la résidence du Clos des graviers et les condamne à payer à Mme [J] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-trois.