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13/09/2023 | FRANCE | N°22-10613

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 septembre 2023, 22-10613


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2023

Cassation partielle

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 858 F-D

Pourvoi n° R 22-10.613

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [C] [I].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 novembre 2021.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________

_________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 20...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2023

Cassation partielle

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 858 F-D

Pourvoi n° R 22-10.613

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [C] [I].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 novembre 2021.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

Mme [U] [C] [I], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 22-10.613 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2021 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant à Mme [S] [B], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [C] [I], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [B], après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, Mme Valéry, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 juin 2021), Mme [C] [I] a été engagée en qualité d'employée de maison par Mme [B] le 1er juin 2013.

2. Placée en arrêt de travail, elle a été licenciée pour absence depuis le 18 décembre 2015 et nécessité de procéder à son remplacement par un salarié en contrat à durée indéterminée.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de ses demandes, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'en l'espèce, pour débouter la salariée de ses demandes au titre des heures supplémentaires, la cour d'appel a retenu qu' ''au soutien de sa demande, Mme [C] [I] se borne à produire un décompte seulement hebdomadaire des heures supplémentaires réclamées, sans indiquer pour chaque journée en cause les horaires de travail qu'elle prétend avoir réalisés ; que de la sorte, elle n'étaye pas sa demande d'éléments suffisamment précis quant aux horaires revendiqués pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments'' ; qu'en statuant ainsi quand dès lors qu'elle avait relevé que Mme [C] [I] avait produit un décompte hebdomadaire des heures supplémentaires réclamées, elle ne pouvait débouter la salariée de sa demande sans avoir relevé que l'employeur justifiait de la durée du travail accomplie par Mme [C] [I] dont il était tenu d'assurer le contrôle, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

5. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

6. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

7. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

8. Pour rejeter la demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires de la salariée , l'arrêt retient que celle-ci se borne à produire un décompte seulement hebdomadaire des heures supplémentaires réclamées, sans indiquer pour chaque journée en cause les horaires de travail qu'elle prétend avoir réalisés de sorte qu'elle n'étaie pas sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires revendiqués pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

9. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que la salariée présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

10. La cassation du chef de dispositif rejetant la demande de la salariée en paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 1er août 2013 au 13 décembre 2015 emporte cassation du chef de dispositif la condamnant aux dépens de première instance et d'appel, rejetant sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il infirme le jugement ayant condamné Mme [B] à lui payer la somme de 950 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt rejetant cette demande entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif déboutant la salariée de ses demandes de congés payés afférents au rappel d'heures supplémentaires, d'indemnité pour travail dissimulé et de remise par l'employeur, sous astreinte, d'une attestation pour Pôle emploi et des bulletins de salaire conformes à l'arrêt à intervenir qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la salariée en paiement de rappels de salaires pour heures supplémentaires du 1er août 2013 au 13 décembre 2015, des congés payés afférents, d'une indemnité pour travail dissimulé et de remise par Mme [B], sous astreinte, d'une attestation pour Pôle emploi et des bulletins de salaire conformes à l'arrêt à intervenir, condamne Mme [C] [I] aux dépens d'appel et de première instance, en ce qu'il rejette sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il infirme le jugement ayant condamné Mme [B] lui à payer la somme de 950 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 2 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme [B] et la condamne à payer à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du 13 septembre 2023, et signé par lui et Mme Valéry, conseiller référendaire, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile,


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22-10613
Date de la décision : 13/09/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 juin 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 sep. 2023, pourvoi n°22-10613


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.10613
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