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13/09/2023 | FRANCE | N°22-10385

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 septembre 2023, 22-10385


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 867 F-D

Pourvoi n° T 22-10.385

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [X].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 mars 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

____________________

_____

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

Mme [F] ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 867 F-D

Pourvoi n° T 22-10.385

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [X].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 mars 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

Mme [F] [X], domiciliée [Adresse 3], [Localité 5], a formé le pourvoi n° T 22-10.385 contre l'arrêt rendu le 19 mai 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société nouvelle d'exploitation de rénovation et de renaissance du Théâtre de [Localité 4], société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 4],

2°/ à la société Selio, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 6],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [X], de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la société Selio, après débats en l'audience publique du 21 juin 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, M. Flores, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mai 2021), Mme [X] a été engagée en qualité d'ouvreuse suivant plusieurs contrats à durée déterminée par la Société nouvelle d'exploitation, de rénovation et de renaissance du Théâtre de [Localité 4] (le théâtre), entre le mois de septembre 2010 et le mois de juillet 2014, puis par la société Selio (la société), du 2 septembre 2014 au 22 mars 2015.

2. La salariée a saisi la juridiction prud'homale le 20 juillet 2015, à l'encontre du théâtre comme de la société, de demandes en requalification des contrats à durée déterminée à temps partiel en un contrat à durée indéterminée et à temps complet, ainsi qu'en paiement de diverses indemnités et de rappels de salaires.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le deuxième moyen, pris en leur première branche, réunis

Enoncé des moyens

3. Par son premier moyen, la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en requalification des contrats de travail à temps partiel conclus avec le théâtre en contrats de travail à temps complet et de rappels de salaires afférents sur un temps plein, alors « que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en retenant, pour débouter la salariée de sa demande en requalification de ses contrats de travail à temps partiel en contrats de travail à temps plein, que les contrats de travail versés aux débats avec le théâtre montrent que les jours et les horaires de travail étaient systématiquement mentionnés, sans même constater qu'ils mentionnaient la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail, ainsi que la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige. »

4. Par son deuxième moyen, la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en requalification des contrats de travail à temps partiel conclus avec la société en contrats de travail à temps complet et de rappels de salaires afférents sur un temps plein, alors « que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en retenant, pour débouter Mme [X] de sa demande en requalification de ses contrats de travail à temps partiel en contrats de travail à temps plein, que les contrats de travail versés aux débats avec la société montrent que les jours et les horaires de travail étaient systématiquement mentionnés, sans même constater qu'ils mentionnaient la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail ainsi que la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

5. Selon ce texte, le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

6. Il en résulte que, sauf exceptions prévues par la loi, il ne peut être dérogé par l'employeur à l'obligation de mentionner, dans le contrat de travail à temps partiel, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue, et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

7. Pour rejeter les demandes en requalification des contrats de travail en contrats à temps plein, l'arrêt retient que les contrats de travail versés aux débats avec l'un et l'autre employeurs montrent que les jours et les horaires de travail étaient systématiquement mentionnés et que les contrats signés avec le théâtre mentionnent expressément la possibilité de modification ponctuelle des horaires avec un délai de prévenance. Il ajoute que la salariée était toujours convoquée à la même heure, et devait rester jusqu'à la fin du placement des spectateurs, soit nécessairement une grande prévisibilité de ses horaires, qui collaient aux horaires des représentations et aux jours pour lesquels elle était mentionnée sur le tableau figurant dans le contrat de travail. Il observe que les seules variations horaires concernaient les jours où une ouvreuse était « de garde» jusqu'à la fin de la représentation et la sortie des spectateurs.
8. L'arrêt relève encore que les feuilles de présences, signées par la salariée, versées aux débats par la société, confirment que l'intéressée était bien employée pour une durée conforme à son contrat de travail, que ce n'est que très exceptionnellement qu'elle restait au-delà de trois heures, et qu'elle était alors payée en heures complémentaires.

9. La cour d'appel en a déduit que la salariée se trouvait parfaitement informée à chaque signature de contrat, des jours et des horaires de travail et qu'elle pouvait disposer de son temps en dehors de ces périodes travaillées.

10. En statuant ainsi, sans constater ni que chacun des contrats de travail conclus avec les deux employeurs successifs mentionnait la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, ni que les employeurs apportaient la preuve d'une durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

11. La salariée fait grief à l'arrêt de condamner la société à lui verser la seule somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, alors « que le salarié victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, quelle que soit son ancienneté dans l'entreprise, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire ; qu'après avoir déclaré nul le licenciement de la salariée par application de l'article L. 1132-2 du code du travail, la cour d'appel qui, pour limiter le montant des dommages et intérêts alloués à la salariée à la somme de 4 000 euros, a énoncé que cette dernière ayant moins de deux ans d'ancienneté au moment de son licenciement, elle pouvait obtenir des dommages-intérêts en fonction du préjudice qu'elle avait subi en application de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable, quand elle aurait dû lui octroyer une somme équivalente au minimum à six mois de salaires, la cour d'appel a violé les articles L 1132-2, L. 1235-3 et L. 1235-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2511-1 et L. 1235-3 du code du travail, ce dernier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

12. Il résulte de ces textes que le salarié victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, quelles que soient son ancienneté et la taille de l'entreprise, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire.

13. Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, l'arrêt retient que le contrat de travail ayant été requalifié en contrat à durée indéterminée, la cessation de la fourniture du travail caractérisait un licenciement nul qui ouvrait droit, par application des dispositions de l'article L. 1235-5, alinéa 2, dans sa rédaction applicable au litige, à des dommages-intérêts en fonction du préjudice qu'elle avait subi, celle-ci ayant moins de deux ans d'ancienneté au moment de la rupture.

14. En statuant ainsi, alors qu'elle avait déclaré nul le licenciement et qu'il résultait de ses constatations que le salaire mensuel moyen de la salariée était de 710,58 euros, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

15. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur le premier et le deuxième moyens entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt qui limitent à un certain montant les condamnations du théâtre et de la société à payer à la salariée des sommes à titre d'indemnité de requalification, de rappel d'indemnité de précarité, de rappel de salaire sur la base d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel et au titre des congés payés afférents, d'indemnité de préavis, ainsi que celui rejetant la demande présentée en application de l'article 700 du code de procédure civile, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Mise hors de cause

16. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de mise hors de cause présentée par la société Selio.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [X] de sa demande en requalification en un contrat de travail à temps complet des contrats de travail à temps partiel conclus tant avec la société nouvelle d'exploitation, de rénovation et de renaissance du Théâtre de [Localité 4] qu'avec la société Selio et de ses demandes subséquentes en paiement de rappels de salaire, condamne chaque société respectivement au paiement des sommes de 3 264,60 euros et 1 176 euros à titre de rappels de salaire sur la base d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel, outre les congés payés afférents à ces sommes, condamne la seule société Selio au paiement de 370,83 euros à titre de rappel d'indemnité de précarité et cette même société au paiement de la somme de 710, 58 euros à titre d'indemnité de préavis, outre les congés payés afférents à ces sommes, limite à la somme de 4 000 euros le montant des dommages-intérêts alloués pour rupture abusive du contrat de travail et déboute Mme [X] de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 19 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Selio ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société nouvelle d'exploitation, de rénovation et de renaissance du Théâtre de [Localité 4] et la société Selio aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Selio et la condamne avec la société nouvelle d'exploitation, de rénovation et de renaissance du Théâtre de [Localité 4]
à payer à la SCP Lyon-Caen et Thiriez la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22-10385
Date de la décision : 13/09/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 sep. 2023, pourvoi n°22-10385


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.10385
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