LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
OR
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 septembre 2023
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 834 F-D
Pourvoi n° N 22-10.656
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 SEPTEMBRE 2023
M. [G] [L], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 22-10.656 contre l'arrêt rendu le 18 novembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l'opposant à la Compagnie IBM France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [L], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Compagnie IBM France, après débats en l'audience publique du 14 juin 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Bérard, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 novembre 2021), M. [L], né le [Date naissance 3] 1950, a été engagé par la société Compagnie IBM France (la société) en qualité d'Inspecteur division ordinateurs le 25 février 1974. Il occupait, en dernier lieu, le poste de cadre conseiller.
2. Le salarié est parti à la retraite par décision du 22 décembre 2009.
3. Contestant cette mesure qu'il prétend s'être vu imposer par son employeur, il a saisi, le 19 décembre 2014, la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur les premier et second moyens, réunis
Enoncé des moyens
4. Par son premier moyen, M. [L] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul et de ses demandes subséquentes à titre de complément d'indemnité de licenciement et d'indemnisation en réparation du préjudice résultant de la nullité de la rupture et de la perte de chance consécutive à cette rupture, alors :
« 1°/ que selon l'article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, nonobstant l'article 2, paragraphe 2, les Etats membres ne peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination qu'à la condition qu'elles soient objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait expressément valoir que sa mise à la retraite présentait un caractère discriminatoire à raison de son âge ; que, pour le débouter de ses demandes au titre d'un licenciement nul, la cour d'appel a retenu qu'il s'est vu notifier sa mise à la retraite le 22 décembre 2009 et que son préavis a pris fin le 30 juin 2010" et que la société Compagnie IBM France explique que, pour envisager le départ à la retraite de M. [L] avant ses 60 ans, elle s'est fondée sur l'article 31.2.2 de la convention collective en vigueur à la date des faits, qui envisage un départ à la retraite avant 60 ans dans les conditions de l'article L. 351-1-1 du code de la sécurité sociale" ; qu'après avoir précisé que cette possibilité a été confirmée par l'Assurance Retraite, laquelle a été sollicitée par M. [L] afin de connaître sa situation vis-à-vis de la retraite avant 60 ans pour carrière longue prévue par l'article L. 351-1-1 du code de la sécurité sociale, par courrier du 14 décembre 2009 dans les termes suivants :« (...) votre durée d'assurance est de 170 trimestres et votre durée cotisée de 170 trimestres. - vous réunissez 8 trimestres avant fin 1967, année de vos 17 ans. Vous pouvez donc prendre votre retraite avant 60 ans (?) »", elle a estimé que c'est (?) par une juste application de la convention collective et de la loi que la société Compagnie IBM France a mis M. [L] à la retraite à l'âge de 59 ans" ; qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier que la différence de traitement fondée sur l'âge était objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime et que les moyens pour réaliser cet objectif étaient appropriés et nécessaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1133-1 du code du travail et de l'article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi, ensemble l'article L. 1237-5 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;
2°/ que, si l'article L. 1237-5 du code du travail, en sa rédaction issue de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, permet la mise à la retraite du salarié à un âge inférieur à celui prévu par le 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale dès lors que celui-ci peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein, ce texte précise que cet âge ne peut pas être inférieur à celui fixé au premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale ; que l'âge prévu par ce dernier texte en sa rédaction issue de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 est, en vertu de l'article R. 351-2 du code de la sécurité sociale en sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2011-620 du 31 mai 2011, fixé à soixante ans ; qu'il s'ensuit qu'une convention ou un accord collectif ne peut valablement prévoir de mécanisme de mise à la retraite d'un salarié avant l'âge de 60 ans ; qu'en décidant au contraire, pour débouter le salarié de ses demandes au titre d'un licenciement nul, que c'est (?) par une juste application de la convention collective et de la loi que la société Compagnie IBM France a mis M. [L] à la retraite à l'âge de 59 ans", la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1133-1 du code du travail et l'article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi, ensemble l'article L. 1237-5 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008. »
5. Par son second moyen, M. [L] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes à titre de complément d'indemnité de licenciement et d'indemnisation en réparation du préjudice résultant de la nullité de la rupture et de la perte de chance consécutive à cette rupture, alors « que si l'article L. 1237-5 du code du travail permet la mise à la retraite d'un salarié à un âge inférieur à celui prévu par le 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale dès lors que le salarié peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein, ce texte précise que cet âge ne peut pas être inférieur à celui fixé au premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale ; que l'âge prévu par ce dernier texte est, en vertu de l'article R. 351-2 du code de la sécurité sociale, fixé à soixante ans ; qu'il s'ensuit qu'une convention ou un accord collectif ne peut valablement prévoir de mécanisme de mise à la retraite d'un salarié avant l'âge de 60 ans ; qu'en décidant au contraire, pour débouter le salarié de sa demande au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que c'est (?) par une juste application de la convention collective et de la loi que la société Compagnie IBM France a mis M. [L] à la retraite à l'âge de 59 ans", la cour d'appel a violé l'article L. 1237-5 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, ensemble l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale en sa rédaction issue de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 et l'article R. 351-2 du code de la sécurité sociale en sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2011-620 du 31 mai 2011. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Soc., 20 avril 2017, pourvoi n° 15-28.304, Bull. 2017, V, n° 60) que le principe de non-discrimination en raison de l'âge n'est pas applicable à la rupture d'un contrat de travail résultant de l'adhésion volontaire d'un salarié à un dispositif de pré-retraite prévu par un accord collectif.
7. En l'espèce, l'arrêt retient que la mise à la retraite du salarié résulte d'un accord intervenu entre les parties alors que le salarié devait rejoindre la société Dassault dans le cadre de la cession de l'activité dont il relevait, ce qu'il ne souhaitait pas, que l'employeur lui a alors proposé un départ à la retraite, lequel était possible dans le cas spécifique du salarié et qu'il se déduit de ces échanges que le salarié a bien donné son accord en vue de sa mise à la retraite dans les termes du choix qui lui était proposé, sans qu'aucun vice du consentement ne puisse être retenu.
8. En conséquence, la cour d'appel qui a caractérisé la volonté du salarié de partir à la retraite avant l'âge de soixante ans, de sorte que le principe de non-discrimination en raison de l'âge n'est pas applicable, n'encourt pas les griefs du moyen.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [L] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille vingt-trois.