LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° E 22-87.423 F-B
N° 00950
21 JUIN 2023
SL2
QPC INCIDENTE : NON LIEU À RENVOI AU CC
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JUIN 2023
M. [Z] [L] a présenté, par mémoire spécial reçu le 3 avril 2023, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la cour d'assises de l'Isère, en date du 25 novembre 2022, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle et une interdiction définitive d'activité en lien avec les mineurs ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.
Des observations ont été produites.
Sur le rapport de Mme Sudre, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [Z] [L], la SCP Spinosi, avocat de M. [U] [O], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 21 juin 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Sudre, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« L'article 347 du code de procédure pénale qui autorise le président de la cour d'assises à conserver en vue de la délibération « la décision de renvoi et, en cas d'appel, l'arrêt rendu par la cour d'assises ayant statué en premier ressort ainsi que la feuille de motivation qui l'accompagne » est-il contraire à la Constitution et plus précisément aux droits de la défense et au droit à un procès équitable garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, pour interdire au président de conserver également une trace écrite de l'argumentation de la défense établie par celle-ci, et notamment une critique de la motivation de première instance dont la défense sollicite qu'elle soit conservée par la cour d'assises pendant le délibéré ? »
2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
4. La question posée ne présente pas un caractère sérieux, pour les motifs qui suivent.
5. La disposition contestée prévoit que, lors de la clôture des débats devant la cour d'assises, le président ordonne la remise du dossier entre les mains du greffier, et ne conserve, en vue de la délibération de la cour et du jury, que la décision de renvoi ainsi que la décision rendue en premier ressort et la feuille de motivation qui l'accompagne, lorsque la juridiction statue en appel, que cet appel concerne une décision de condamnation ou d'acquittement. Si la cour d'assises estime nécessaire, au cours de la délibération, d'examiner une pièce de la procédure, le dossier est transporté dans la salle des délibérations pour être rouvert en présence du ministère public et des avocats des parties.
6. Cette disposition interdit à la cour d'assises de conserver, en vue de la délibération, tout document résumant une argumentation qui lui serait remis, non seulement par la défense, mais aussi par le ministère public ou la partie civile. Elle ne porte donc pas atteinte à l'égalité des droits entre les parties.
7. Elle ne porte pas non plus atteinte aux droits de la défense, qui, lors des débats devant la cour d'assises, prend la parole en dernier.
8. Les seuls documents conservés en vue de la délibération n'émanent ni du ministère public ni des parties, mais constituent des actes des juridictions d'instruction et de jugement, dont il est donné connaissance à l'ouverture des débats devant la cour d'assises et dont le contenu est débattu tout au long de l'audience.
9. La disposition contestée, qui est la conséquence du caractère oral des débats devant la cour d'assises à laquelle participent des jurés, ne méconnaît aucun droit ni aucune liberté protégée par la Constitution.
10. Il n'y a pas lieu en conséquence de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du vingt-et-un juin deux mille vingt-trois.