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21/06/2023 | FRANCE | N°21-21778

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 juin 2023, 21-21778


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 juin 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 752 F-D

Pourvoi n° F 21-21.778

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 JUIN 2023

M. [C] [P], domicilié [Adresse 1], a

formé le pourvoi n° F 21-21.778 contre l'arrêt rendu le 21 mai 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1), dans le litige l'o...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 juin 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 752 F-D

Pourvoi n° F 21-21.778

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 JUIN 2023

M. [C] [P], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 21-21.778 contre l'arrêt rendu le 21 mai 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1), dans le litige l'opposant à la société Altran Technologies, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La société Altran Technologies a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [P], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Altran Technologies, après débats en l'audience publique du 24 mai 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 21 mai 2021), statuant sur renvoi après cassation (Soc., 3 avril 2019, pourvoi n° 17-24.462), M. [P] a été engagé à compter du 18 juillet 2000 par la société Altran Technologies, en qualité d'ingénieur consultant confirmé, position 2.3 coefficient 150, statut cadre, de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec.

2. Le salarié a exercé divers mandats depuis janvier 2007.

3. Le 23 décembre 2008, un accord d'entreprise portant sur le dialogue social et le droit syndical a été signé.

4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 28 août 2013 de diverses demandes au titre de l'exécution de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que l'employeur doit le paiement des salaires à partir de juillet 2017 en tenant compte des dispositions de l'accord du 23 décembre 2008, de constater que les parties disposent des modalités de calcul du salaire à compter de juillet 2017, tenant compte de l'accord du 23 décembre 2008, et qu'il leur appartient de procéder à l'actualisation du calcul en tenant compte des moyennes prévues par cet accord, de dire qu'il n'y a pas lieu, en l'état, de fixer le salaire à compter du mois de février 2019, et de dire qu'en cas de difficultés la partie la plus diligente pourra saisir à nouveau la cour pour la fixation du salaire à partir de juillet 2017, alors « que le juge ne peut refuser de statuer, en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'en jugeant dès lors – après avoir retenu qu'elle ‘'est dans l'impossibilité de fixer les salaires de M. [P] pour la période postérieure au mois de juin 2017 et jusqu'en octobre 2020 puisque les parties n'ont pas communiqué les données permettant de définir les moyennes applicables sur la période postérieure à juin 2017'' et que, ‘'compte tenu de la fixation des salaires pour les années antérieures, les parties disposent du mode de calcul leur permettant de poursuivre la vérification de l'évolution du salaire de M. [P]'‘ – qu'‘'il y a lieu de retenir que l'employeur doit, à compter de juillet 2017, et tant que M. [P] aura qualité de salarié protégé, respecter les dispositions de l'accord de dialogue social et droit syndical'‘, en sorte qu'‘'il appartient aux parties de mettre effectivement ces calculs en oeuvre et, éventuellement, de saisir à nouveau la cour avec les données actualisées des moyennes applicables, en cas de difficultés'‘, la cour d'appel a commis un déni de justice en violation de l'article 4 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile :

7. Il résulte du premier de ces textes que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties.

8. Selon le second, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

9. Après avoir relevé que l'évolution salariale du salarié avait été moins importante que la moyenne des salariés du panel ayant une ancienneté et un statut comparables, alloué à l'intéressé, en rattrapage, un rappel de salaire pour la période comprise entre les mois d'avril 2009 et mai 2017, et fixé le salaire du mois de juin 2017 à une certaine somme, l'arrêt retient que la cour est dans l'impossibilité de fixer les salaires pour la période postérieure au mois de juin 2017 et jusqu'en octobre 2020 puisque les parties n'ont pas communiqué les données permettant de définir les moyennes applicables sur la période postérieure à juin 2017. Il ajoute que, compte tenu de la fixation des salaires pour les années antérieures, les parties disposent du mode de calcul leur permettant de poursuivre la vérification de l'évolution du salaire de l'intéressé et que l'employeur doit, à compter de juillet 2017, et tant que l'intéressé aura qualité de salarié protégé, respecter les dispositions de l'accord de dialogue social et droit syndical. Il décide qu'il appartient aux parties de mettre effectivement ces calculs en oeuvre et, éventuellement, de saisir à nouveau la cour avec les données actualisées des moyennes applicables, en cas de difficultés.

10. En statuant ainsi, alors qu'il lui incombait de procéder à l'évaluation de la créance salariale dont elle avait reconnu le principe au besoin en ordonnant une mesure d'instruction ou en faisant application des règles régissant la charge et la production des preuves, la cour d'appel a méconnu son office et violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

11. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié diverses sommes à titre d'heures supplémentaires ainsi que de congés payés et prime de vacances afférents, alors « que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation, et investit la cour d'appel de renvoi de la connaissance du chef de litige censuré dans tous ses éléments de fait et de droit ; qu'au cas présent, la Cour de cassation a, dans son arrêt du 3 avril 2019, cassé et annulé l'arrêt rendu le 30 juin 2017 par la cour d'appel de Toulouse en ce qu'il a condamné la société Altran Technologies à verser à M. [P] des sommes ‘'de 43 064,22 euros à titre de rappel de salaire d'heures supplémentaires et de 4 306,42 euros au titre des congés payés afférents'‘ ; que cette cassation ne laissant subsister aucun chef de dispositif de l'arrêt censuré relativement aux heures supplémentaires, il incombait à la cour d'appel, saisie sur renvoi de cassation, d'examiner ce chef du litige en tous ses éléments de fait et de droit et d'examiner le bien-fondé des prétentions du salarié et les moyens de défense développés par l'employeur ; que, pour refuser de le faire, la cour d'appel a considéré que ‘'conformément à l'arrêt de la cour du 30 juin 2017, le nombre d'heures supplémentaires dues à M. [P] s'élève à 1 005,76 heures'‘ et que ‘'ce point n'a pas été cassé par la Cour de cassation laquelle a seulement remis en cause les bases de calcul des sommes dues au titre des heures supplémentaires'‘ ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a méconnu la portée de l'arrêt de cassation qui la saisissait et a violé les articles 623, 624, 625, et 638 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 624, 625 et 638 du code de procédure civile :

12. Il résulte de ces textes que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation. Par l'effet de la cassation partielle intervenue, aucun des motifs de fait ou de droit ayant justifié la disposition annulée ne subsiste, de sorte que la cause et les parties sont remises de ce chef dans le même état où elles se trouvaient avant l'arrêt précédemment déféré et qu'elles peuvent devant la cour de renvoi invoquer de nouveaux moyens ou former des prétentions nouvelles qui sont soumises aux règles qui s'appliquent devant la juridiction dont la décision a été annulée.

13. Pour condamner l'employeur au paiement d'une certaine somme au titre des heures supplémentaires, l'arrêt retient que, conformément à l'arrêt de la cour du 30 juin 2017, le nombre d'heures supplémentaires dues au salarié s'élève à 1005,76 heures. Il ajoute que ce point n'a pas été cassé par la Cour de cassation, laquelle a seulement remis en cause les bases du calcul des sommes dues au titre des heures supplémentaires.

14. En statuant ainsi, alors que l'arrêt du 30 juin 2017 ne comportait pas, dans son dispositif, un chef spécifique à l'existence et au nombre d'heures supplémentaires, et que la cassation de cet arrêt dans sa disposition condamnant l'employeur à payer une certaine somme au titre des heures supplémentaires avait investi la juridiction de renvoi de la connaissance du chef du litige tranché par cette disposition, dans tous ses éléments de fait et de droit, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

15. La cassation prononcée sur le second moyen du pourvoi incident n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, qui sont justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de ce dernier et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Altran Technologies à payer à M. [P], concernant la période du 28 août 2010 à mai 2017, les sommes de 36 198,96 euros brut au titre des heures supplémentaires, 3 619,90 euros au titre des congés payés afférents et 361,99 euros au titre de la prime de vacances afférente, dit que l'employeur doit le paiement des salaires à M. [P] à partir de juillet 2017 en tenant compte des dispositions de l'accord du 23 décembre 2008, constate que les parties disposent des modalités de calcul du salaire à compter de juillet 2017, tenant compte de l'accord dialogue social et dialogue syndical du 23 décembre 2008, et qu'il leur appartient de procéder à l'actualisation du calcul en tenant compte des moyennes prévues par cet accord, dit qu'il n'y a pas lieu, en l'état, pour la cour de fixer le salaire à compter du mois de février 2019, et dit qu'en cas de difficultés la partie la plus diligente pourra saisir à nouveau la cour pour la fixation du salaire à partir de juillet 2017, l'arrêt rendu le 21 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-21778
Date de la décision : 21/06/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 21 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 jui. 2023, pourvoi n°21-21778


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.21778
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