LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 juin 2023
Cassation partielle
Mme AUROY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 432 F-D
Pourvoi n° Z 21-20.323
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 21 JUIN 2023
M. [U] [V], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-20.323 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2021 par la cour d'appel de Nîmes (3e chambre famille), dans le litige l'opposant à Mme [O] [N], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dard, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de M. [V], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 mai 2023 où étaient présents Mme Auroy, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Dard, conseiller rapporteur, Mme Antoine, conseiller, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 12 mai 2021), un jugement du 4 juin 2014 a prononcé le divorce de M. [V] et de Mme [N], mariés sans contrat préalable.
2. Des difficultés sont survenues lors des opérations de comptes, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Examen des moyens
Sur les premier, quatrième et sixième moyens
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur les deuxième et troisième moyens, réunis
Enoncé des moyens
4. Par son deuxième moyen, M. [V] fait grief à l'arrêt de dire que la somme de 17 428,17 euros doit être intégrée à l'actif de la communauté au titre de son compte PEL Société Générale, alors « que la consistance des éléments de la communauté à liquider se détermine au jour où le jugement de divorce prend effet dans les rapports patrimoniaux entre les époux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'appréciation de la consistance de la masse partageable devait se faire à la date du 25 juin 2012, date de l'ordonnance de non-conciliation ; qu'en considérant dès lors que la somme de 17 428,17 euros devait être intégrée dans l'actif de la communauté au titre du compte PEL Société Générale de M. [V], tout en relevant que ce dernier avait soldé ce compte le 18 janvier 2012, soit au moment du dépôt de la requête en divorce" et que la masse à partager s'appréciait à la date du 25 juin 2012, ce dont il résultait que la somme litigieuse ne pouvait être intégrée dans la communauté au titre d'un compte bancaire qui n'existait plus dans la communauté au jour où le jugement de divorce a pris effet dans les rapports patrimoniaux des époux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 262-1 et 1476 du code civil. »
5. Par son troisième moyen, M. [V] fait grief à l'arrêt de dire que la somme de 12 134,75 euros doit être intégrée à l'actif de la communauté au titre de son compte PEA Société Générale, alors « que la consistance des éléments de la communauté à liquider se détermine au jour où le jugement de divorce prend effet dans les rapports patrimoniaux entre les époux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'appréciation de la consistance de la masse partageable devait se faire à la date du 25 juin 2012, date de l'ordonnance de non-conciliation ; qu'en considérant que la somme de 12 134,75 euros devait être intégrée dans l'actif de la communauté au titre du compte PEA Société Générale de M. [V], tout en relevant que ce compte avait été clôturé le 8 mars 2012 et que la consistance de la masse partageable s'appréciait à la date du 25 juin 2012, ce dont il résultait que la somme litigieuse ne pouvait être intégrée dans la communauté au titre d'un compte bancaire qui n'existait plus dans la communauté au jour où le jugement de divorce a pris effet dans les rapports patrimoniaux des époux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 262-1 et 1476 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 262-1 et 1441, 3°, du code civil :
6. Il résulte de la combinaison de ces textes que la composition du patrimoine de la communauté se détermine à la date à laquelle le jugement de divorce prend effet dans les rapports patrimoniaux entre époux.
7. Pour dire que les sommes de 17 428,17 euros et 12 134,75 euros doivent être intégrées à l'actif de la communauté, l'arrêt, tout en énonçant que la composition de la masse commune doit s'apprécier au 25 juin 2012, date de l'ordonnance de non-conciliation, retient que la clôture par M. [V] de son compte PEL le 18 janvier 2012, pour en donner le montant à sa mère, ne doit pas conduire à écarter la première de ces sommes et que la seconde apparaît sur l'extrait de son compte PEA au 8 mars 2012, jour de sa clôture.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé les textes susvisés.
Et sur le cinquième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
9. M. [V] fait grief à l'arrêt de dire que le notaire désigné interrogera la Banque Natixis au titre de son compte Natixis et qu'il retiendra les titres existant en 2012, selon leur valeur à la date la plus proche du partage, alors « qu'il appartient au juge de trancher lui-même la contestation dont il est saisi ; qu'en renvoyant au notaire liquidateur le soin d'interroger la Banque Natixis au titre du compte Natixis Interépargne de M. [V] et de retenir les titres existant en 2012, selon leur valeur à la date la plus proche du partage, cependant qu'il lui appartenait de trancher elle-même la contestation dont elle était saisie, la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article 4 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code civil :
10. Il résulte de ce texte que le juge, auquel il incombe de trancher lui-même les contestations soulevées par les parties, ne peut se dessaisir et déléguer ses pouvoirs à un notaire liquidateur.
11. L'arrêt retient qu'en l'absence de production par M. [V] des relevés actuels de son compte Natixis Interépargne, le notaire désigné interrogera la banque Natixis et retiendra les titres existant en 2012, selon leur valeur à la date la plus proche du partage.
12. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation des chefs de dispositif ayant dit que c'est la somme de 12 134,75 euros qui doit être intégrée dans l'actif de la communauté au titre du compte PEA SG [XXXXXXXXXX03] de M. [U] [V], que la somme de 17 428, 17 euros doit être intégrée dans l'actif de la communauté au titre du compte PEL SG de M. [U] [V] et que le notaire désigné interrogera la banque Natixis au titre du compte Natixis Interépargne de M. [U] [V] et retiendra les titres existant en 2012, selon leur valeur à la date la plus proche du partage, n'emporte pas celle du chef de dispositif relatif aux dépens, justifié par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du cinquième moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que c'est la somme de 12 134,75 euros qui doit être intégrée dans l'actif de la communauté au titre du compte PEA SG [XXXXXXXXXX03] de M. [U] [V], que la somme de 17 428, 17 euros doit être intégrée dans l'actif de la communauté au titre du compte PEL SG de M. [U] [V], et que le notaire désigné interrogera la banque Natixis au titre du compte Natixis Interépargne de M. [U] [V] et retiendra les titres existant en 2012, selon leur valeur à la date la plus proche du partage, et condamne M. [U] [V] à payer à Mme [O] [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 12 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne Mme [N] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [V] ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille vingt-trois.