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14/06/2023 | FRANCE | N°21-23836

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 juin 2023, 21-23836


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 juin 2023

Cassation partielle sans renvoi

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 684 F-D

Pourvoi n° T 21-23.836

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 JUIN 2023

La société Norske Sk

og Golbey, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-23.836 contre l'arrêt rendu le 9 septembre 2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 juin 2023

Cassation partielle sans renvoi

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 684 F-D

Pourvoi n° T 21-23.836

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 JUIN 2023

La société Norske Skog Golbey, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-23.836 contre l'arrêt rendu le 9 septembre 2021 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [L] [T], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Douxami, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Norske Skog Golbey, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T], après débats en l'audience publique du 16 mai 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Douxami, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy,9 septembre 2021), M. [T] a été engagé, à compter du 15 juillet 2001, par la société Norske Skog Golbey (la société) en qualité d'opérateur laboratoire. Il occupait, en dernier lieu, un poste d'analyste de jour.

2. Par courrier du 14 juin 2016, il a été licencié pour motif économique.

3. Contestant le bien-fondé de cette rupture, il a saisi la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à lui payer une somme à titre de dommages-intérêts et de lui ordonner de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois, alors « que le juge est tenu d'examiner, même sommairement, l'ensemble des éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la société Norske Skog Golbey soutenait que le motif économique du licenciement était "explicité de manière particulièrement détaillée (sur près de 80 pages) dans le livre Il (...) soumis à la consultation des représentants du personnel" et que la baisse de la consommation de papier journal et l'augmentation du prix des matières premières et de l'énergie avaient non seulement entraîné des pertes pour la société, mais aussi affecté l'ensemble du groupe, dont les résultats nets étaient négatifs depuis 2005, avec une perte cumulée de 20 milliards de couronnes norvégiennes sur la période 2005-2014 ; que sa pièce n° 16, correspondant au document d'information sur le projet de réorganisation, comportait une présentation du groupe, dont il ressortait qu'il était spécialisé dans la production de papier journal et papier magazine, ainsi qu'une description des menaces pesant sur sa compétitivité ; qu'en outre, la société Norske Skog Golbey soulignait que ni les représentants du personnel, ni la Direccte qui a validé l'accord collectif contenant le plan de sauvegarde de l'emploi, n'avaient estimé que les éléments d'information figurant dans ce document étaient insuffisants pour permettre aux élus d'apprécier le motif économique de la réorganisation au niveau du secteur d'activité du groupe; qu'en affirmant que "la société Norske Skog Golbey ne produit aucun élément relatif à la perte de compétitivité des sociétés du groupe intervenant éventuellement dans le secteur du papier journal" sans examiner cette pièce 16 "qui était de nature à l'éclairer sur la situation économique et financière du groupe et les enjeux auxquels il était confronté, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. La cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient. Il incombe à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

6. Appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur ceux qu'elle décidait d'écarter, a retenu que l'employeur qui faisait partie d'un groupe, ne démontrait pas la réalité de la menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe dans lequel il intervenait.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à lui payer la somme de 45 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors « que le juge doit se prononcer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui lui est demandé, les prétentions des parties étant fixées dans le dispositif de leurs conclusions d'appel, dans la procédure ordinaire ; que tant dans la partie "discussion" que dans le dispositif de ses conclusions d'appel, M. [T] demandait à la cour d'appel de condamner la société Norske Skog Golbey à lui payer la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu 'en condamnant la société Norske Skog Golbey à verser à M. [T] la somme de 45 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a méconnu les limites du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

9. Le salarié conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que, sous couvert d'une méconnaissance des termes du litige, il ne vise qu'une erreur matérielle pouvant être réparée selon la procédure prévue par l'article 462 du code de procédure civile et ne donnant pas ouverture à cassation.

10. Cependant, il résulte de l'arrêt et des productions que la cour d'appel a alloué au salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant supérieur à celui qu'il avait demandé.

11. Le moyen, fondé sur l'octroi de plus qu'il n'est demandé qui constitue un cas d'ouverture à cassation, est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile :

12. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Aux termes du second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

13. L'arrêt condamne l'employeur à payer au salarié la somme de 45 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

14. En statuant ainsi, alors que dans ses conclusions le salarié ne réclamait, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'une somme de 40 000 euros, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquence de la cassation

15. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de
procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code
de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

16. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la
Cour de cassation statue au fond.

17. En considération de l'ancienneté du salarié, de sa rémunération brute mensuelle, de son âge, de sa formation et de sa capacité à retrouver un nouvel emploi, de la durée de sa période de recherche d'emploi ou de reconversion professionnelle, des aides dont il a pu bénéficier, il convient de
lui allouer la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, au paiement de laquelle sera condamnée la société.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Norske Skog Golbey à payer à M. [T] la somme de 45 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 9 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne la société Norske Skog Golbey à payer à M. [T] la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Norske Skog Golbey aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Norske Skog Golbey et la condamne à payer à M. [T] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-23836
Date de la décision : 14/06/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 09 septembre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jui. 2023, pourvoi n°21-23836


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.23836
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