LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
HA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 mai 2023
Cassation
Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 601 F-D
Pourvoi n° P 21-20.382
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 MAI 2023
La société The Truck Company France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée Turbos Hoet-Bizien.fr, a formé le pourvoi n° P 21-20.382 contre l'arrêt rendu le 3 juin 2021 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à M. [V] [J], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société The Truck Company France, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M.[J], après débats en l'audience publique du 13avril2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, M. Flores, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et
conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 juin 2021), M.[J] a été engagé en qualité de technico-commercial le 20 avril 2015 par la société Turbos Hoet-Bizien, devenue la société The TruckCompany France.
2. Il a démissionné le 25 mars 2016.
3. L'employeur a saisi la juridiction prud'homale le 9 mai 2017 en remboursement des salaires versés au salarié d'avril 2015 à avril 2016, outre charges afférentes, et de remboursements de frais.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes en remboursement de salaires d'avril 2015 à mars 2016, de charges salariales et de frais de déplacement payés au salarié, alors « que l'employeur peut solliciter le remboursement du paiement indu du salaire versé au salarié qui n'a accompli aucune prestation de travail et qui ne s'est pas tenu à sa disposition ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir, preuves à l'appui, qu'il avait indûment versé des salaires à M. [J] qui n'avait fourni aucune prestation de travail pour son compte et en sollicitait le remboursement ; que la cour d'appel a constaté que le salarié était effectivement lié à un autre employeur pendant toute la durée de la relation de travail avec la société The Truck Company France, pour lequel il avait prospecté des clients et qu'au cours de ses visites, il avait pris des commandes pour le compte de cet autre employeur ; qu'en déboutant la société The Truck Company France de ses demandes au motif que l'action engagée sur le fondement du paiement par erreur obligeant à restitution de l'indu ne peut par principe pas prospérer compte tenu du pouvoir de direction de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 devenu 1103, 1104 et 1193, 1235 devenu 1302, et 1377 devenu 1302-2 du code civil, ensemble l'article L. 1331-2 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1235 et 1376 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
5. Il résulte de ces textes que tout paiement suppose une dette, que ce qui
a été payé sans être dû est sujet à restitution et que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.
6. Pour débouter l'employeur de ses demandes en remboursement par le salarié des salaires qu'il avait perçus d'avril 2015 à mars 2016, des charges sociales afférentes et des sommes versées au titre de frais de déplacement, l'arrêt retient que le paiement par erreur obligeant à restitution de l'indu ne peut faire prospérer cette action, compte tenu du pouvoir de direction dont dispose l'employeur.
7. En se déterminant ainsi, par un motif insuffisant à caractériser un obstacle à la demande en répétition de l'indu, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne M. [J] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille vingt-trois.