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24/05/2023 | FRANCE | N°21-20117

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mai 2023, 21-20117


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 mai 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 596 F-D

Pourvoi n° A 21-20.117

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 MAI 2023

La société Transversal films, sociét

é à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 21-20.117 contre l'arrêt rendu le 26 mai 2021 par la cour d'app...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 mai 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 596 F-D

Pourvoi n° A 21-20.117

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 MAI 2023

La société Transversal films, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 21-20.117 contre l'arrêt rendu le 26 mai 2021 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme [V] [X], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Deltort, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Transversal films, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [X], après débats en l'audience publique du 13 avril 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Deltort, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 26 mai 2021), Mme [X] a été engagée en qualité de caissière par la société Transversal films suivant contrat de travail à temps partiel du 4 avril 2007.

2. Le 30 juillet 2014, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution de son contrat de travail.

3. La salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 21 septembre 2015.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa septième branche, et le troisième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses six premières branches

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet à compter du 24 décembre 2007 et de le condamner à verser à la salariée diverses sommes, alors :

« 1°/ que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit mentionner ''la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue'' et ''la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois'' ; que la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ne doit donc pas figurer dans le contrat à temps partiel qui mentionne une durée du travail mensuelle ; qu'en l'espèce, en retenant pour requalifier le contrat à temps partiel de Mme [X] en contrat à temps complet à compter du 24 décembre 2007, que ''le contrat de travail de Mme [X] ne comporte pas la répartition journalière (?) de l'horaire de travail à temps partiel, de sorte que la salariée est effectivement fondée à se prévaloir de la présomption qui en découle'', quand il ressortait de ses propres constatations que le contrat à durée indéterminée du 22 octobre 2007 mentionnait une durée du travail de 75,83 heures par mois, de sorte que la répartition journalière du travail n'avait pas à figurer dans le contrat, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

2°/ que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit mentionner ''la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue'' et ''la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois'' ; qu'en l'espèce, pour conclure que Mme [X] était fondé à se prévaloir d'une présomption de contrat à temps complet, la cour d'appel a retenu que ''le contrat de travail de Mme [X] ne comporte pas la répartition (?) hebdomadaire de l'horaire de travail à temps partiel, de sorte que la salariée est effectivement fondée à se prévaloir de la présomption qui en découle'' ; qu'en statuant ainsi quand il ressortait de ses propres constatations que le contrat à durée indéterminée du 22 octobre 2007 mentionnait une durée de 17h30 par semaine, ce dont il s'évinçait que le contrat comportait bien la répartition hebdomadaire de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit seulement mentionner ''les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié », ces horaires pouvant être ensuite communiqués au salarié sous forme de plannings ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que Mme [X] justifiait d'un contrat de travail qui organisait ''un mécanisme autorisant l'employeur à modifier les horaires de travail de la salariée à sa convenance'' dès lors que l'article 3 de l'avenant du 22 octobre 2007 intitulé ''horaires de travail'' prévoyait que ''le présent contrat est conclu et accepté pour un horaire de travail de 75,83 heures par mois (17 heures 30 par semaine) d'après des horaires déterminés par un planning qui lui sera remis chaque mois'' ; qu'en statuant ainsi quand une telle clause, qui ne faisait que prévoir les modalités selon lesquelles les horaires de travail seraient communiqués par écrit au salarié, était conforme aux dispositions des articles L. 3123-11 et L. 3123-14 du code du travail, la cour d'appel a violé ces dispositions dans leur rédaction applicable au litige ;

4°/ que si aux termes de l'article L. 3123-21 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, toute modification de la répartition du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois est notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu, ce délai de prévenance n'est applicable qu'en cas de décision unilatérale de l'employeur et non lorsque la modification intervient avec l'accord exprès du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que ''si l'employeur produit des plannings, il ne justifie pas de leur remise au moins dix jours à l'avance tandis qu'il ressort au contraire des avenants versés aux débats que certains étaient datés et donc signés quelques jours avant la modification voire le jour même et que les plannings étaient régulièrement modifiés'' ; qu'en statuant ainsi quand l'employeur n'avait pas à justifier d'un délai de prévenance pour les modifications de plannings consécutives à la signature d'avenants avec la salariée, la cour d'appel a violé les articles L. 3123-21 et L. 3123-14 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige ;

5°/ que toute modification de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois est notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu ; qu'en retenant que ''si l'employeur produit des plannings, il ne justifie pas de leur remise au moins dix jours à l'avance'', la cour d'appel, qui a retenu un délai de prévenance plus long que le délai légal, a violé l'article L. 3123-21 du code du travail ;

6°/ que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'en l'espèce, en retenant que ''la société Transversal films imposait très régulièrement à la salariée'' d'augmenter sa durée du travail, quand il ressortait de ses propres constatations que les parties avaient systématiquement augmenté la durée du travail de la salariée par avenant signé des deux parties, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la cour

6. La cour d'appel a constaté que, nonobstant les mentions portées dans le contrat de travail ou ses avenants, les plannings de travail remis à la salariée comportaient des variations importantes des horaires de travail et qu'ils étaient régulièrement modifiés de sorte que la durée du travail, qui avait été portée durant plusieurs semaines à temps complet, n'était pas fixe et que la salariée était dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur.

7. Le moyen qui, pris en ses cinq premières branches, critique des motifs surabondants et qui, pris en sa sixième branche, manque en fait, n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa huitième branche

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors qu' « en toute hypothèse, le juge ne doit pas dénaturer l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, Mme [X] demandait que son contrat soit requalifié en contrat de travail à temps complet à compter du mois de novembre 2009 et réclamait le paiement d'un rappel de salaire correspondant à un temps complet à compter de cette date ; qu'en retenant qu'il y avait lieu d'accueillir la demande de Mme [X] de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein ''à compter du 24 décembre 2007'', la cour d'appel, qui a dénaturé l'objet du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la cour

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile :

9. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Selon le second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

10. Pour requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein à compter du 24 décembre 2007, l'arrêt énonce qu'il s'agit du premier jour de la semaine à compter de laquelle l'employeur a demandé à la salariée d'accomplir 35 heures de travail.

11. En statuant ainsi, alors que dans ses conclusions, la salariée demandait la requalification de son contrat de travail à temps plein à compter de novembre 2009, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé les textes susvisés.

Et sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

12. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement du 25 juin 2008, de le condamner à payer à la salariée des dommages-intérêts, de juger que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer diverses sommes à la salariée, alors « que la demande d'annulation d'une sanction disciplinaire se prescrit par deux ans ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement notifié à Mme [X] le 25 juin 2008, la cour d'appel a retenu que ''la salariée fait à juste titre valoir qu'elle a recouvré la possibilité de contester cette première sanction du fait qu'elle a été rappelée dans le second avertissement alors même que ce rappel était contraire aux prescriptions de l'article L. 1332-5 du code du travail qui interdit d'invoquer, à l'appui d'une nouvelle sanction, une sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement de nouvelles poursuites disciplinaires'' ; qu'en statuant ainsi quand l'action en annulation de la sanction disciplinaire du 25 juin 2008 était prescrite le 30 juillet 2014, date à laquelle Mme [X] avait saisi le conseil de prud'hommes, peu important que l'employeur ait visé cette sanction dans celle du 30 janvier 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.

Réponse de la cour

Vu l'article L. 1471-1, alinéa 1, du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

13. Selon ce texte, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

14. Pour dire recevable la demande en nullité de l'avertissement du 25 juin 2008, l'arrêt retient que la salariée a recouvré la possibilité de le contester du fait de son rappel par l'employeur dans la lettre de notification du second avertissement, ce rappel étant contraire à l'article L. 1332-5 du code du travail.

15. En statuant ainsi, alors que l'invocation d'une sanction disciplinaire prescrite est sans effet sur le délai de prescription ouvert pour contester cette sanction, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. La cassation prononcée n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe la date de la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet au 24 décembre 2007, condamne la société Transversal films à payer à Mme [X] la somme de 5 806,69 euros à titre de rappel de salaire et celle de 580,67 euros au titre des congés payés afférents, annule l'avertissement du 25 juin 2008 et condamne la société Transversal films à payer à Mme [X] la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts pour l'annulation de cet avertissement, l'arrêt rendu le 26 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-20117
Date de la décision : 24/05/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 26 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mai. 2023, pourvoi n°21-20117


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.20117
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