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17/05/2023 | FRANCE | N°21-21062

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 mai 2023, 21-21062


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 mai 2023

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 349 F-B

Pourvoi n° C 21-21.062

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 17 MAI 2023

La société Tommasini construction, société par actio

ns simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 21-21.062 contre le jugement rendu le 27 juillet 2021 par le tribunal judici...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 mai 2023

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 349 F-B

Pourvoi n° C 21-21.062

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 17 MAI 2023

La société Tommasini construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 21-21.062 contre le jugement rendu le 27 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Lille (procédure accélérée au fond), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Flandre Opale habitat, société anonyme d'HLM, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Eiffage construction Nord-Pas-de-Calais, société par actions simplifiée à associé unique, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la société Tommasini construction, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Eiffage construction Nord-Pas-de-Calais, de Me Soltner, avocat de la société Flandre Opale habitat, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 mars 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Lille, 27 juillet 2021), rendu selon la procédure accélérée au fond, la société Flandre Opale habitat, société d'HLM, a engagé une procédure d'appel d'offres ouvert ayant pour objet la construction de logements collectifs. Par lettre du 12 octobre 2020, notifiée par voie électronique, la société Flandre Opale habitat a informé la société Tommasini construction (la société Tommasini) du rejet de l'offre qu'elle avait déposée pour le lot n° 1. Le marché a été attribué à la société Eiffage construction Nord-Pas-de-Calais (la société Eiffage), il a été conclu le 17 novembre 2020 et l'avis d'attribution a été publié au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE) le 18 décembre 2020.

2. Le 9 décembre 2020, la société Tommasini a assigné la société Flandre Opale habitat devant le président du tribunal judiciaire, qu'il a saisi d'un recours précontractuel. Puis, le 26 mars 2021, soutenant avoir appris postérieurement que le contrat avait été conclu, la société Tommasini a assigné la société Eiffage en intervention forcée aux fins que soit ordonnée l'annulation du contrat ou sa résiliation, dans le cas où une raison impérieuse d'intérêt général serait retenue.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société Tommasini fait grief au jugement de la déclarer irrecevable en ses demandes, alors « que les dispositions de l'article 12 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 qui prévoient que le référé contractuel n'est pas ouvert au demandeur ayant fait usage du recours du référé précontractuel, n'ont pas pour effet de rendre irrecevable ce recours en référé contractuel lorsqu'il est exercé par un concurrent évincé qui a antérieurement présenté un recours précontractuel et qui, bien qu'informé du rejet de son offre par le pouvoir adjudicateur, ne l'a pas été, contrairement à ce qu'exige l'article R. 3181-3 du code de la commande publique, du délai de suspension que ce dernier doit s'imposer entre la date d'envoi de la notification du rejet de l'offre et la conclusion du marché ; que les demandes additionnelles que ce candidat peut alors présenter au juge initialement saisi d'une demande relevant du référé précontractuel ne sont pas soumises aux dispositions de l'article 1441-3 du code de procédure qui prévoient que la juridiction peut être saisie d'un référé contractuel au plus tard le trente et unième jour suivant la publication au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE) d'un avis d'attribution du contrat ; qu'en décidant le contraire, le magistrat délégué du président du tribunal judiciaire a méconnu les articles 11 et 12 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 et 1441-3 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. L'article 1441-3, I, du code de procédure civile dispose :

« La juridiction peut être saisie du recours prévu à l'article 11 de l'ordonnance [n° 2009-515 du 7 mai 2009] au plus tard le trente et unième jour suivant la publication d'un avis d'attribution du contrat [...].

En l'absence de la publication d'avis ou de la notification mentionnées à l'alinéa qui précède, la juridiction peut être saisie jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter du lendemain du jour de la conclusion du contrat [...] ».

5. Il s'ensuit que si une entreprise évincée d'un appel d'offres, qui, s'étant trouvée, durant le délai du recours précontractuel, dans l'ignorance de la date à laquelle serait conclu le marché ou de la conclusion de celui-ci, ne peut se voir opposer l'impossibilité de déposer un recours contractuel à la suite de ce recours précontractuel, prévue à l'article 12 de l'ordonnance précitée, en revanche, dès lors que l'attribution du contrat a été publiée et qu'elle ne se trouve plus en état d'ignorer cette attribution, elle n'est plus recevable à déposer un recours contractuel au-delà du trente et unième jour suivant cette publication.

6. Ce principe découlant sans difficulté d'interprétation de l'application de l'article 2 septies de la directive 2007/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 modifiant les directives 89/665/CEE et 92/13/CEE du Conseil en ce qui concerne l'amélioration de l'efficacité des procédures de recours en matière de passation des marchés publics ne nécessite donc pas que soit posée une question préjudicielle à la Cour de Justice de l'Union européenne.

7. Après avoir relevé que l'avis d'attribution du contrat avait été publié au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE) le 18 décembre 2020, le jugement en déduit qu'en application des dispositions de l'article 1441-3, I du code de procédure civile, le délai de recours contractuel a expiré le 19 janvier 2021.

8. Il relève ensuite que la requalification en recours contractuel, par la société Tommasini, de l'action initialement introduite en recours précontractuel est intervenue à l'audience de plaidoirie du 9 février 2021, soit postérieurement au délai imparti à celle-ci pour ce faire.

9. En cet état, le président du tribunal judiciaire a exactement retenu que ce recours était forclos, peu important l'absence de notification par la société Flandre Opale habitat de la conclusion du marché.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Tommasini construction aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Tommasini construction et la condamne à payer à la société Flandre Opale habitat et à la société Eiffage construction Nord-Pas-de-Calais la somme de 3 000 euros chacune ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-21062
Date de la décision : 17/05/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REFERE - Applications diverses - Contrats de la commande publique - Référé contractuel - Recevabilité - Recours précontractuel antérieur - Délai pour agir - Délai de trente et un jours suivant la publication de l'attribution du contrat - Absence de notification de la conclusion du contrat - Absence d'influence

Il résulte de l'article 1441-3, I, du code de procédure civile que si une entreprise évincée d'un appel d'offres, qui, s'étant trouvée, durant le délai du recours précontractuel, dans l'ignorance de la date à laquelle serait conclu le marché ou de la conclusion de celui-ci, ne peut se voir opposer l'impossibilité de déposer un recours contractuel à la suite de ce recours précontractuel, prévue à l'article 12 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, en revanche, dès lors que l'attribution du contrat a été publiée et qu'elle ne se trouve plus en état d'ignorer cette attribution, elle n'est plus recevable à déposer un recours contractuel au-delà du trente et unième jour suivant cette publication. Dès lors, le président du tribunal judiciaire qui constate que le recours précontractuel a été requalifié de recours contractuel plus de trente et un jours après la publication de l'avis d'attribution du contrat au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE) a exactement retenu que ce recours était forclos, sans qu'importe l'absence de notification par la société adjudicatrice de la conclusion du contrat à l'entreprise évincée


Références :

Article 1441-3, I, du code de procédure civile

article 12 de l'ordonnance n° 2009- 515 du 7 mai 2009.

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Lille, 27 juillet 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 mai. 2023, pourvoi n°21-21062, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau
Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, Me Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.21062
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