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19/04/2023 | FRANCE | N°21-23992

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 avril 2023, 21-23992


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 avril 2023

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 493 F-D

Pourvoi n° N 21-23.992

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 AVRIL 2023

La société GRTGAZ, société anonyme, dont le siè

ge est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-23.992 contre l'ordonnance rendue le 29 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Nanterre (ordonnan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 avril 2023

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 493 F-D

Pourvoi n° N 21-23.992

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 AVRIL 2023

La société GRTGAZ, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-23.992 contre l'ordonnance rendue le 29 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Nanterre (ordonnance selon la procédure accélérée au fond), dans le litige l'opposant au comité sociale et économique de la direction des opérations de GRTGAZ, dont le siège est [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société GRTGAZ, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du comité sociale et économique de la direction des opérations de GRTGAZ, après débats en l'audience publique du 22 mars 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal judiciaire de Nanterre, 29 octobre 2021), rendue selon la procédure accélérée au fond, le comité social et économique de l'établissement de la direction des opérations de la société GRTGAZ a désigné, par délibération du 23 février 2021, un expert en vue de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi.

2. Contestant le droit du comité social et économique d'établissement à recourir à une expertise dans le cadre de cette consultation récurrente, la société GRTGAZ a saisi le tribunal judiciaire en annulation de la délibération.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société GRTGAZ fait grief à l'ordonnance de dire n'y avoir lieu à annuler la délibération du comité social et économique du 23 février 2021 décidant de recourir à une expertise dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi, alors :

« 1°/ que l'accord d'entreprise du 1er juillet 2019 relatif au cadre de mise en place des CSE et du CSE central au sein de GRTGAZ et à leurs prérogatives énonce en son article 3.1 relatif à la périodicité des réunions, ordre du jour, convocation et absence de titulaire" que Le CSE est réuni une fois par mois en réunion ordinaire, sur convocation de l'employeur. Il se réunit aussi à la demande de la majorité de ses membres conformément à l'article L. 2315- 28 du code du travail. Quatre réunions au minimum par année civile sont consacrées en tout ou partie aux attributions du CSE en matière de santé, sécurité et conditions de travail. Sont invités à la réunion sur les points à l'ordre du jour relatifs aux questions de santé, sécurité et conditions de travail, les participants prévus à l'article L. 2314-3 du code du travail. (...) Le calendrier des réunions ordinaires est fixé en fin d'année pour l'année suivante, au regard du calendrier du CSE central. La/les date(s) de consultation de chaque CSE d'établissement sur le bloc de consultation relatif à la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi est/sont envisagée(s) dans ce calendrier des réunions. Il en est de même des sujets de consultation ponctuels pouvant d'ores et déjà être envisagés dans l'année (...)" ; que ce texte ne fait ainsi qu'envisager l'éventualité d'une consultation des CSE d'établissement sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi en précisant que lorsqu'une telle consultation doit intervenir, les dates doivent être envisagées dans le calendrier des réunions, sans pour autant rendre obligatoire ladite consultation en dehors des cas où la loi l'impose ; qu'en outre, il résulte des articles 6 et 10 de l'accord que l'annexe 1 tableau de répartition des compétences hygiène et sécurité" concerne la répartition des compétences en ce domaine entre l'institution CSE et sa CSSCT d'une part, et l'institution représentants de proximité" d'autre part, et non entre le CSE central et les CSE d'établissement ; qu'en affirmant que l'article 3.1 de cet accord du 1er juillet 2019 stipulait expressément que les établissements seraient consultés sur la politique sociale et organisait le calendrier de ces réunions et que l'annexe 1 de l'accord précisait bien que la consultation sur la politique sociale était nécessaire au niveau du CSE et avec une préparation de la CSSCT et non uniquement du CSE central et de la CSSCT centrale, le tribunal judiciaire a violé le texte conventionnel susvisé ;

2°/ qu'il résulte des articles L. 2312-22, L. 2316-1 et L. 2316-20 du code du travail dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 et des articles L. 2316-21 et L. 2315-91 du même code, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, que le comité social et économique d'établissement n'est obligatoirement consulté sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi en sus du comité social et économique central et ne peut désigner un expert en vue d'une telle consultation que lorsque sont d'ores et déjà définies des mesures d'adaptation arrêtées au niveau de l'entreprise spécifiques à l'établissement et qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement ; qu'en l'espèce, le tribunal a refusé d'annuler la délibération du CSE du 23 février 2021 décidant de recourir à une expertise dans le cadre de la consultation sur la politique sociale et les conditions de travail en se bornant à postuler, du fait de l'existence de conditions particulières de travail au sein de l'établissement direction des opérations et de l'application de certaines réglementations particulières dans cet établissement, la nécessité de mesures d'adaptation propres à l'établissement ; qu'en statuant de la sorte, sans constater concrètement l'existence de telles mesures d'ores et déjà définies au niveau de l'entreprise, spécifiques à l'établissement direction des opérations et relevant de la compétence du chef de cet établissement, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

3°/ qu'il résulte des articles L. 2312-22, L. 2316-1 et L. 2316-20 du code du travail dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 et des articles L. 2316-21 et L. 2315-91 du même code, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017- 1718 du 20 décembre 2017, que le CSE n'est obligatoirement consulté sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi en sus du CSE central et ne peut désigner un expert en vue d'une telle consultation que lorsque sont d'ores et déjà définies des mesures d'adaptation arrêtées au niveau de l'entreprise spécifiques à l'établissement et qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement ; qu'en l'espèce, la société GRTGAZ soutenait que la politique de ressources humaines était déterminée au niveau de l'entreprise dans son entier par le directeur des ressources humaines et le directeur général, que le directeur général signait les accords collectifs négocié par la DRH sur tous les sujets RH et notamment les salaires, l'organisation de la formation et l'alternance, que certains éléments de rémunération comme les primes de performance faisaient l'objet d'une décision unilatérale signée par le directeur général, éléments complétés par des documents crées par la DRH au niveau central, qu'il résultait des orientations nationales de formation pour la période triennale 2020-2022 et de celles actualisées pour 2021-2023 qu'elles relevaient de la compétence du CSE central, que le pôle développement des compétences de la DRH, donc au niveau de l'entreprise, était chargée de mener des actions par établissement, que le plan prévisionnel des compétences 2021 était présenté au niveau de l'entreprise et qu'ainsi si, compte tenu de la notion d'établissement distinct, le chef d'établissement de la direction des opérations disposait certes du pouvoir de prendre des décisions sur des mesures individuelles s'agissant du recrutement, de la nomination, de la gestion de la rémunération, de discipline, etc., le directeur général gardait seul le pouvoir de décision sur les mesures générales et la conception de la politique sociale sur les différents sujets relevant de la consultation obligatoire ne relevait jamais du chef d'établissement ; qu'en affirmant péremptoirement que la direction des opérations étant un établissement distinct, le chef d'établissement disposait des pouvoirs suffisants pour prendre des décisions en matière de politique sociale, d'emploi et des conditions de travail, sans vérifier concrètement quelles étaient les mesures relevant de la compétence du chef d'établissement, et donc sans constater que les mesures d'adaptation propres à l'établissement de la direction des opérations relevaient de la compétence du chef de cet établissement, le tribunal a derechef privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés. »

Réponse de la Cour

4. Selon les articles L. 2315-91 et L. 2316-21 du code du travail, le comité social et économique d'établissement peut faire appel à un expert dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi lorsqu'il est compétent conformément aux dispositions de ce code.

5. Selon l'article L. 2312-22 du code du travail, en l'absence d'accord prévu à l'article L. 2312-19, le comité social et économique est consulté chaque année sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi. Cette consultation est conduite à la fois au niveau central et au niveau des établissements lorsque sont prévues des mesures d'adaptation spécifiques à ces établissements.

6. Aux termes de l'article L. 2316-20 du même code, le comité social et économique d'établissement a les mêmes attributions que le comité social et économique d'entreprise, dans la limite des pouvoirs confiés au chef de cet établissement. Le comité social et économique d'établissement est consulté sur les mesures d'adaptation des décisions arrêtées au niveau de l'entreprise spécifiques à l'établissement et qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement.

7. L'ordonnance constate qu'il ressort de l'ordre du jour de la réunion du 23 février 2021 que l'employeur entendait consulter le comité social et économique d'établissement sur un rapport annuel faisant le bilan de la situation générale de la santé, la sécurité et des conditions de travail dans l'établissement de la direction des opérations, sur le bilan de développement des compétences 2020, le plan de développement des compétences prévisionnel 2021 et le programme de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail, que les salariés qui assurent la maintenance technique et les installations de gaz n'ont pas les mêmes conditions de travail et sont soumis à des horaires différents, dont des astreintes et un travail de nuit, que l'accord d'entreprise sur la formation professionnelle 2006 prévoit la mise en place de plans de formation avec des adaptations au niveau des établissements ainsi que la consultation des institutions représentatives du personnel d'établissement, chaque établissement adaptant les orientations nationales en prenant en compte les spécificités de son activité, que le document unique d'évaluation des risques devait être établi au niveau de l'établissement et contenir des mesures d'adaptation propres à chaque établissement et qu'enfin, il existe des mesures d'adaptation spécifiques relatives à la réglementation particulière (atmosphères explosives, électricité) applicable au sein de la direction des opérations, les agents devant suivre des formations techniques spécifiques.

8. L'ordonnance constate également que les élus du comité social et économique sollicitent la communication de documents concernant exclusivement la direction des opérations et que les mesures prises ou prévues concernent cet établissement, la centralisation des fonctions support et l'existence de procédures de gestion définies au niveau du siège n'étant pas de nature à exclure l'autonomie de gestion des responsables d'établissement, et que le plan de développement des compétences de la direction des opérations pour 2021 explique qu'il est prévu au niveau national une enveloppe d'heures de formation qui est ensuite répartie par les établissements eux-mêmes.

9. Le président du tribunal judiciaire, qui en a déduit l'existence de mesures d'adaptation spécifiques à l'établissement direction des opérations qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement, sans retenir que l'accord collectif du 1er juillet 2019 dérogeait aux dispositions légales précitées, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société GRTGAZ aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société GRTGAZ et la condamne à payer au comité social et économique de l'établissement de la direction des opérations de la société GRTGAZ la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf avril deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-23992
Date de la décision : 19/04/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Nanterre, 29 octobre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 avr. 2023, pourvoi n°21-23992


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.23992
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