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13/04/2023 | FRANCE | N°21-20314

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 avril 2023, 21-20314


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 avril 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 478 F-D

Pourvoi n° Q 21-20.314

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 AVRIL 2023

Mme [L] [W], domiciliée [Adresse 4],

a formé le pourvoi n° Q 21-20.314 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans le litige l'op...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 avril 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 478 F-D

Pourvoi n° Q 21-20.314

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 AVRIL 2023

Mme [L] [W], domiciliée [Adresse 4], a formé le pourvoi n° Q 21-20.314 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans le litige l'opposant à la société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

En présence

du syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 2],

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [W], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, après débats en l'audience publique du 15 mars 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 mars 2021), la société Elior services propreté et santé (la société ESPS) a engagé Mme [W] en qualité d'agent de service, affectée sur le site de la clinique de [6] dans les Bouches-du-Rhône, le 7 août 2014.

2. Le 29 juillet 2016, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution de son contrat de travail, notamment d'une demande en paiement d'un rappel d'indemnité de nourriture, sur le fondement de l'atteinte au principe d'égalité de traitement.

3. Le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes, dont sa demande à titre de rappel d'indemnité de nourriture, alors « qu'en cas de reprise d'un marché de propreté, l'accord collectif applicable à l'ancien employeur, qui n'a fait l'objet d'aucune extension ou élargissement, ne survit pas et ne s'applique pas au nouvel employeur ; qu'en l'espèce, la salariée se comparait avec les nouveaux salariés qu'ESPS avait directement embauchés sur le site du CEA de [Localité 5], de sorte que la cour d'appel ne pouvait la débouter de sa demande au titre de l'égalité de traitement au motif inopérant que l'avantage résultait de l'accord collectif signé le 18 novembre 1997 entre les organisations syndicales et les entreprises sous-traitantes du CENG, puisqu'il est constant qu'ESPS n'y était pas partie lors de sa signature, sans constater que l'employeur était tenu par cet accord collectif, ou un accord équivalent conclu entre les organisations syndicales et la société ESPS ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 2262-1 du code du travail et 2, § II de l'accord de branche étendu du 29 mars 1990 dans les entreprises de propreté fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire (ancienne annexe VIII). »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 2262-1 du code du travail et l'article 2, II, de l'accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire (ancienne annexe VII), attaché à la convention collective nationale des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 :

6. Selon le premier de ces textes, un accord collectif oblige tous ceux qui l'ont signé. Selon le second, les salariés d'une entreprise de propreté, dont le contrat de travail a été transféré en application de la garantie d'emploi instituée par l'article 2 de l'accord susvisé du 29 mars 1990, bénéficieront du statut collectif du nouvel employeur qui se substituera dès le premier jour de la reprise à celui du précédent employeur.

7. Pour débouter la salariée de sa demande en paiement d'un rappel d'indemnité de nourriture, l'arrêt relève que, selon les pièces produites, les salariés du site du Centre d'études atomiques (CEA) de [Localité 5] bénéficient de la prime de nourriture d'un montant actualisé de 4,16 euros par jour travaillé, alors que la salariée ne bénéficie pas de cet avantage, ce qui établit une différence de traitement entre les salariés de la même entreprise.

8. Il ajoute que l'accord collectif signé le 18 novembre 1997 entre les entreprises de nettoyage sous-traitantes du site et les organisations syndicales représentatives stipule : « Le présent accord, signé entre les entreprises de nettoyage sous-traitantes du CENG et les organisations syndicales représentant le personnel de ces entreprises, a pour but de synthétiser les règles particulières régissant les conditions d'emploi et les rémunérations du personnel des chantiers de nettoyage du CENG. Ces règles résultent de la spécificité du travail sur le site : risques particuliers et contraintes de sûreté et de sécurité. » et qu'aux termes de l'article I-2.3 de cet accord, il est prévu que « Tout le personnel présent à 12 h 00, ou terminant à 12 h 00 a droit à la prime de panier, fixée par le CENG et qui est refacturée à ce dernier. » Il retient que cet accord est délimité aux entreprises de nettoyage intervenant sur le centre et au personnel des chantiers de nettoyage, et est conclu en considération des spécificités du travail sur le site. Il rappelle que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d'accords d'établissement négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l'établissement et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.

9. Il retient encore que, pour prétendre valablement subir un dommage résultant de l'absence de versement de la prime de nourriture alors que les salariés sont placés dans la même situation juridique et font un travail égal ou de valeur égale à celui exercé par les salariés du [Adresse 3] (CENG), il appartient à la salariée de démontrer que les différences de traitement en cause sont étrangères à toute considération de nature professionnelle, et que l'avantage résultant de l'accord d'établissement invoqué aurait pu avoir vocation à bénéficier à d'autres salariés non compris dans le périmètre circonscrit à l'établissement concerné, preuve qu'elle ne rapporte pas en l'espèce, alors qu'il résulte des faits de la cause que l'accord d'établissement avait été signé en considération des spécificités du travail sur le site, lequel recèle des risques particuliers et des contraintes de sûreté et de sécurité, que certaines règles résultent de la législation en vigueur, d'autres de clauses figurant dans le contrat commercial passé entre le CEA et les entreprises, et que les salariés qui en sollicitent le bénéfice, exerçant leur emploi dans des entreprises de santé ne démontrent pas être soumis à de mêmes risques et contraintes. Il en conclut que les différences de traitement critiquées ne sont pas étrangères à toute considération de nature professionnelle et que les dispositions de cet accord n'ont pas vocation à être étendues.

10. En statuant ainsi, sans constater que l'employeur était tenu par l'accord d'établissement signé le 18 novembre 1997 entre les entreprises de nettoyage sous-traitantes du CENG et les organisations syndicales représentant le personnel de ces entreprises, accord dont il ne soutenait pas faire une application volontaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [W] de ses demandes en paiement d'une indemnité de nourriture et d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il condamne Mme [W] et le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône aux dépens, l'arrêt rendu le 26 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Elior services propreté et santé aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Elior services propreté et santé et la condamne à payer à Mme [W] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-20314
Date de la décision : 13/04/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 26 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 avr. 2023, pourvoi n°21-20314


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.20314
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