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22/03/2023 | FRANCE | N°21-19333

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 mars 2023, 21-19333


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 mars 2023

Cassation

M. SOMMER, président

Arrêt n° 280 F-D

Pourvoi n° Y 21-19.333

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 MARS 2023

La société Gefco, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvo

i n° Y 21-19.333 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans le litige l'opposant à M. [F] [E], ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 mars 2023

Cassation

M. SOMMER, président

Arrêt n° 280 F-D

Pourvoi n° Y 21-19.333

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 MARS 2023

La société Gefco, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-19.333 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans le litige l'opposant à M. [F] [E], domicilié [Adresse 1]), défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Gefco, de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de M. [E], après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 mai 2021), M. [E] a été engagé en qualité de responsable d'agence par la société Gefco, à compter du 2 janvier 1995.

2. Aux termes d'un avenant en date du 23 avril 2007, il a été affecté à Casablanca (Maroc), au sein de la société filiale Gefco Maroc SA, pour y occuper le poste de directeur, à compter du 1er mai 2007.

3. Le salarié a démissionné le 4 septembre 2017.

4. Par requête du 29 mai 2019, la société Gefco a attrait le salarié devant le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence en sollicitant l'indemnisation de divers préjudices résultant de détournements allégués de clientèle.

5. Le salarié a soulevé une exception d'incompétence de cette juridiction.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche,

Enoncé du moyen

6. La société Gefco fait grief à l'arrêt de déclarer le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence incompétent pour connaître de ses demandes et d'inviter les parties à mieux se pourvoir, alors « qu'il résulte des dispositions de l'article 15 du code civil, qu'un défendeur français doit pouvoir être traduit devant une juridiction française pour des obligations contractées en pays étranger même avec un étranger ; qu'il en va a fortiori ainsi lorsque les obligations invoquées à l'encontre du défendeur sont nées d'un contrat de travail conclu en France avec une société française -ce contrat fut-il exécuté à l'étranger -et comportant en outre une clause attributive de compétence désignant la juridiction dont relève le siège social de la société française ; qu'une renonciation tacite de la société mère française au bénéfice de l'article 15 du code civil ne saurait résulter du fait que sa filiale marocaine a tenté d'exercer une action de même nature, dans son intérêt propre, devant le juge marocain qui l'en a déboutée ; qu'en effet, les deux sociétés sont des personnes juridiques distinctes sollicitant la réparation d'un préjudice subi personnellement par chacune d'elles ; que, dès lors, en jugeant que la saisine par la société Gefco Maroc d'une juridiction marocaine devait s'analyser en une renonciation tacite de la société mère française tant à la clause attributive de compétence qu'au privilège de juridiction établi par l'article 15 du code civil, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble l'article 1103 du code civil. »
Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

7. Le salarié conteste la recevabilité du moyen, pris en sa première branche, comme nouveau et mélangé de fait et de droit, en ce qu'il porte sur la renonciation à une clause attributive de juridiction.

8. Cependant l'arrêt retient que l'avenant au contrat de travail, conclu le 23 avril 2007, comporte, en son article 11, une clause attributive de compétence aux juridictions dont relève le siège de la société Gefco et que la saisine de la juridiction étrangère préalable à l'instance devant les juridictions françaises doit s'analyser en une renonciation tacite mais non-équivoque de la société Gefco à la clause.

9. Le moyen, qui est né de la décision attaquée, est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 15 du code civil :

10. Aux termes de ce texte, un Français pourra être traduit devant un tribunal de France, pour des obligations par lui contractées en pays étranger, avec un étranger.

11. Pour déclarer le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence incompétent, l'arrêt retient, d'abord, que la société Gefco argue d'un préjudice économique subi par sa filiale, la société Gefco Maroc SA, à la suite d'actes de concurrence déloyale, consistant en un détournement prétendu de clientèles au profit d'une société tiers par le salarié, et dont la société Gefco Maroc SA a vainement tenté d'obtenir l'indemnisation, prétention dont elle a été déboutée par le juge marocain le 30 décembre 2019. L'arrêt relève, ensuite, que, invoquant les mêmes moyens, et formant les mêmes demandes, la société Gefco sollicite désormais à son profit la condamnation du salarié devant la juridiction prud'homale française. Il ajoute que la saisine de la juridiction étrangère préalable à l'instance doit s'analyser en une renonciation tacite mais non-équivoque de la société Gefco à la clause ou au privilège de juridiction française établi par l'article 15 précité, à moins qu'il ne soit démontré que la société Gefco Maroc SA n'a pas agi sciemment et librement, ce que la société Gefco ne soutient pas et que cette renonciation s'étend à l'intégralité des préjudices induits des agissements prétendus de concurrence déloyale.

12. En statuant ainsi, alors que seule la société Gefco Maroc SA était partie à l'action par elle engagée devant la juridiction marocaine en sorte que cette action ne pouvait valoir renonciation de la société Gefco à la compétence des juridictions françaises en raison de la nationalité française du salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne M. [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-19333
Date de la décision : 22/03/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 mar. 2023, pourvoi n°21-19333


Composition du Tribunal
Président : M. Sommer (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Melka-Prigent-Drusch

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.19333
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