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15/03/2023 | FRANCE | N°21-23335

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 mars 2023, 21-23335


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 mars 2023

Cassation

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 197 F-D

Pourvoi n° Y 21-23.335

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MARS 2023

La sociét

é Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-23.335 contre l'arrêt r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 mars 2023

Cassation

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 197 F-D

Pourvoi n° Y 21-23.335

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MARS 2023

La société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-23.335 contre l'arrêt rendu le 8 juillet 2021 par la cour d'appel de Rouen (chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à M. [W] [G], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [G], après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, Mme Daubigney conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 8 juillet 2021), par un acte du 11 mars 2015, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie Seine (la banque) a consenti à la société Sucré salé (la société) un prêt de 255 000 euros, destiné à financer la création d'un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie.

2. En garantie de ce prêt, M. [G] s'est rendu caution de la société dans la limite de 331 500 euros.

3. La société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé la disproportion manifeste de son engagement à ses biens et revenus.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La banque fait grief à l'arrêt de dire l'engagement de caution litigieux inopposable à M. [G] et de rejeter l'ensemble de ses demandes en paiement dirigées contre ce dernier, alors « que la valeur des parts qu'un propriétaire indivis détient dans un immeuble acquis au moyen d'un prêt souscrit solidairement par l'ensemble des indivisaires se calcule en rapportant la valeur de cet immeuble diminuée du montant de la dette commune au nombre de parts qu'il détient ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu'au jour du cautionnement, M. [G] était propriétaire à 68 % d'une maison détenue en indivision avec sa compagne, d'une valeur totale de 210 000 euros et pour laquelle ils avaient souscrit solidairement un crédit immobilier dont l'encours s'élevait encore à 128 513,73 euros ; qu'après avoir exposé que "toute estimation d'une quote-part indivise, notariée par exemple, retient toujours la valeur nette (actif - passif) ramenée au taux de la quote-part évaluée", la banque soutenait que la valeur des droits de M. [G] dans l'immeuble s'élevait à la valeur de la maison diminuée de l'encours du prêt, rapportée au nombre de ses parts, soit 55 410 euros [(210 000 - 128 513,73) x 68/100] ; qu'en retenant, pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], qu'un tel calcul "pourrait être retenu si la maison avait été vendue au moment de la signature de l'engagement de caution, laissant un solde après déduction du capital restant dû au titre du prêt" et qu'à défaut d'une telle vente, il convenait de fixer à 142 800 euros "(210 000 x 68 %)" la valeur des droits de M. [G], auxquels il restait encore à imputer la somme de 128 513,73 euros correspondant au solde du prêt souscrit solidairement, ce qui représentait un actif résiduel de14 286,27 euros, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ensemble l'article 815-17 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

6. Le crédit contracté par des indivisaires pour acquérir un bien indivis est une dette personnelle de ces derniers, et non une dette de l'indivision, dont ils sont, lorsqu'ils se sont engagés solidairement, chacun tenus pour le tout.

7. Il en résulte que, afin d'apprécier si l'engagement de caution d'une personne physique était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, il convient, lorsque cette personne était propriétaire indivis d'un bien, d'imputer la dette qu'elle avait contractée pour acquérir ce bien, non sur la valeur dudit bien, mais sur celle de sa part dans l'indivision.

8. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

9. La banque fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'un créancier n'est déchu de son droit de se prévaloir de l'engagement de caution que si cet engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution ; qu'en se bornant à relever, pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], que son endettement global s'élevait à 460 013,73 euros et était ainsi supérieur à la valeur optimisée de son patrimoine, représentant 458 874 euros, soit une différence entre l'actif et le passif de 1 112,73 euros, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à établir la disproportion manifeste du cautionnement aux biens et revenus de la caution au jour où il a été souscrit, laquelle suppose que la caution se trouve, lorsqu'elle le souscrit, dans l'impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et ses revenus, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 :

10. Pour dire l'engagement de caution de M. [G] manifestement « excessif » et rejeter les demandes en paiement de la banque contre ce dernier, l'arrêt retient qu'à sa date de souscription, la valeur du patrimoine de M. [G] s'élevait à un total de 458 874 euros, tandis qu'à cette même date, son endettement global atteignait la somme de 460 013,73 euros, supérieure à la valeur optimisée de son patrimoine.

11. En se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la disproportion manifeste du cautionnement aux biens et revenus de la caution au jour où il a été souscrit, laquelle suppose que la caution se trouve, lorsqu'elle le souscrit, dans l'impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et revenus, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

12. La banque fait encore le même grief à l'arrêt, alors « qu'un créancier n'est déchu de son droit de se prévaloir de l'engagement de caution que si cet engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution ; qu'en l'espèce, pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], la cour d'appel s'est fondée sur le fait, d'une part, que son endettement global s'élevait 460 013,73 euros et était ainsi supérieur à la valeur optimisée de son patrimoine, représentant 458 874 euros, et, d'autre part, que son revenu mensuel net était de 1 018 euros en 2014 et qu'il n'était pas contesté que ses revenus de 2015 ne lui permettaient pas de faire face à son engagement ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les revenus de M. [G] au jour de son engagement ne lui permettaient pas de faire face à la somme de 1 139,73 euros devant rester à sa charge après réalisation de son patrimoine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 :

13. Pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que, lorsque M. [G] s'est engagé en qualité de caution, il se trouvait en situation de demandeur d'emploi depuis le 4 juin 2014, ses seules ressources étant constituées de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, et qu'au vu de son avis de non-imposition, son revenu mensuel net s'était élevé à seulement 1 018 euros en 2014. L'arrêt en déduit que les revenus de M. [G] en 2015 ne lui permettaient pas de faire face à son engagement de caution.

14. En se déterminant ainsi, sans rechercher si les revenus de M. [G] au jour de son engagement de caution ne lui permettaient pas de faire face à la somme de 1 139,73 euros devant rester à sa charge après réalisation de son patrimoine, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne M. [G] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [G] et le condamne à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie Seine la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine.

La Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit l'engagement de caution au titre du prêt n° 1000102945 en date du 11 mars 2015 inopposable à M. [W] [G] par application des dispositions de l'article L. 332-1 du code de la consommation ; et de l'AVOIR déboutée de l'ensemble de ses demandes en paiement dirigées contre M. [W] [G] ;

AUX MOTIFS QU'en l'espèce, il ressort des pièces produites que lorsqu'il s'est engagé en qualité de caution à hauteur de 331.500 €, le 11 mars 2015, M. [W] [G] se trouvait en situation de demandeur d'emploi depuis le 4 juin 2014, ses seules ressources étant constituées de l'allocation d'aide au retour à l'emploi ; qu'au vu de son avis de non-imposition, son revenu mensuel net s'était élevé à seulement 1.018 € en 2014 ; qu'il n'est pas contesté que ses revenus de 2015 ne lui permettaient pas de faire face à son engagement de caution ; que les parties s'accordent à reconnaître que M. [W] [G] disposait toutefois d'un patrimoine composé d'une maison d'habitation acquise avec sa compagne et financée pour partie par un crédit souscrit auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Normandie Seine, d'une assurance vie également souscrite et de disponibilités figurant sur son compte bancaire ouvert auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Normandie Seine ; qu'il sera tout d'abord observé que la fiche de renseignement signée le 11 mars 2015 par M. [W] [G], ne fait état que de la maison, évaluée à 210.000 €, avec un encours total de prêt de 129.000 €, aucun patrimoine mobilier n'étant renseigné ; qu'il ressort des pièces produites que la maison a été acquise le 29 juillet 2010, à concurrence de 68 % par M. [W] [G] et de 32% par sa compagne, le prix de 206.000 € ayant été payé à hauteur de 76.000 € par des deniers personnels de M. [W] [G] et pour le surplus par un prêt souscrit par le couple auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Normandie Seine à hauteur de 146.204 €, remboursable en 300 mensualités de 737,43 € ; que M. [W] [G] soutient que sa part doit être calculée en retenant 68 % des 206.000 € correspondant au prix d'achat de la maison, soit 140.000 € dont à déduire 128.867 € au titre de la totalité du solde du prêt immobilier en février 2015 ; que la banque retient, quant à elle, la valeur de la maison telle que fixée à la date du cautionnement, soit 210.000 €, dont elle déduit le passif au titre du prêt immobilier, soit 128.513,73 € après l'échéance du 5 mars 2015, ce qui correspond à une valeur nette de 81.486,27 €, à laquelle elle applique un coefficient de pondération correspondant aux 68% de droit personnel à la propriété détenu par M. [W] [G] selon l'acte d'acquisition de la maison ; qu'il convient de retenir pour base, d'une part la valeur totale de la maison au jour de l'engagement de caution du 15 mars 2015, telle que M. [W] [G] l'a lui-même indiquée dans sa fiche déclarative de situation, de 210.000 €, valeur qui apparaît, au demeurant, cohérente avec le prix d'acquisition de 206.000 € en 2010, et d'autre part le solde restant dû sur le prêt immobilier à la même date, soit 128.513,73 € au vu du tableau d'amortissement ; que le calcul de la banque pourrait être retenu si la maison avait été vendue au moment de la signature de l'engagement de caution, laissant un solde après déduction du capital restant dû au titre du prêt ; que cependant à cette date, le bien immobilier constituait le domicile familial et sa vente aurait nécessité l'accord de la compagne de M. [G] ; que la valeur des droits de M. [G] dans cet immeuble était de (210.000 x 68%) 142.800 € ; que par ailleurs, M. [W] [G] détenait une assurance vie Floriane, dont la dernière situation trimestrielle connue au 15 mars 2015 était celle arrêtée au 31 décembre 2014, soit une valeur de 233.985 € ; qu'il ressort, en outre, du relevé de portefeuille arrêté au 31 décembre 2014, que M. [W] [G] disposait également d'un PEA d'un montant de 2.902 € ; qu'enfin, les parties s'accordent devant la cour pour reconnaître un montant de disponibilités à la date du cautionnement de 79.214 € ; qu'il s'ensuit qu'au 15 mars 2015, la valeur du patrimoine de M. [W] [G] s'élevait à un total de (142 800 + 233.985 € + 2.902 € + 79.214 €) 458 874 € ; que cependant à cette même date, outre les charges normales de la vie courante d'une famille avec deux enfants, M. [G] était à titre personnel tenu pour la totalité du prêt souscrit pour l'acquisition de l'immeuble avec sa compagne, compte tenu de son engagement solidaire, soit pour la somme de 128.513,73 € ; que l'engagement de caution souscrit à hauteur de la somme de 331.500 € portait son endettement à la somme totale de 460.013,73 €, supérieure à la valeur optimisée de son patrimoine ; que dès lors le cautionnement doit être considéré comme manifestement excessif à la date de sa souscription ;

1) ALORS QUE la valeur des parts qu 'un propriétaire indivis détient dans un immeuble acquis au moyen d'un prêt souscrit solidairement par l'ensemble des indivisaires se calcule en rapportant la valeur de cet immeuble diminuée du montant de la dette commune au nombre de parts qu'il détient ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu 'au jour du M. [G] était propriétaire à 68 % d'une m aison détenue en indivision avec sa compagne, d'une valeur totale de 210.000 euros et pour laquelle ils avaient souscrit solidairement un crédit immobilier dont l'encours s'élevait encore à 128.513,73 euros (arrêt, p. 4, an tépénultième et dernier §§) ; qu après avoir exposé que « toute estimation d'une quote part indivise, notariée par exemple, retient toujours la valeur nette (actif passif) ramenée au taux de la quote part évaluée » (concl. Crcam, p. 7, § 2), la Crcam de No rmandie Seine soutenait que la va leur des droits de M. [G] dans l'immeuble s'élevait à la valeur de la maison diminuée de l'encours du prêt, rapportée au nombre de ses parts, soit 55.410 euros [(210.000 128.513,73) x 68/100) (concl. Crcam, p. 8, §§ 1 à 7 ; qu'en retenant , pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], qu' un tel calcul « pourrait être retenu si la maison avait été vendue au moment de la signature de l'engagement de caution, laissant un solde après déduction du capital restant dû au t itre du prêt » et qu'à défaut d'une telle vente, il convenait de fixer la valeur des droits de M. [G] à « (210.000 x %) 142.800 », auxquels il restait encore à imputer la somme de 128.513,73 euros correspondant au solde du prêt souscrit solidairement, ce qui représentait un actif résid uel de 14.286,27 euros (arrêt, p. 5, §§ 1, 3 et 8), la cour d'appel a violé l'article L. 341 4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016 301 du 14 mars 2016, ensemble l'article 815 17 du code civil 2) ALORS QU'un créancier n'est déchu de son droit de se prévaloir de l'engagement de caution que si cet engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution ; qu'en se bornant à relever, pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], que son endettement global s'élevait 460.013,73 euros et était ainsi supérieur à la valeur optimisée de son patrimoine, représentant 458.874 euros (arrêt, p. 5, §§ 6 à 8), soit une différence entre l'actif et le passif de 1.112,73 euros, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs impropres à établir la disproportion manifeste du cautionnement aux biens et revenus de la caution au jour où il a été souscrit, laquelle suppose que la caution se trouve, lorsqu'elle le souscrit, dans l'impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et ses revenus, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016 301 du 14 mars 2016 ;

3) ALORS QU'un créancier n'est déchu de son droit de se prévaloir de l'engagement de caution que si cet engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution ; qu'en l'espèce, pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], la cour d'appel s'est fondée sur le fait, d'une part, que son endettement global s'élevait 460.013,73 euros et était ainsi supérieur à la valeur optimisée de son patrimoine, représentant 458.874 euros (arrêt, p. 5, §§ 6 à 8), et d'autre part, que son revenu mensuel net était de 1.018 euros en 2014 et qu'il n'était pas contesté que ses revenus de 2015 ne lui permettaient pas de faire face à son engagement (arrêt, p. 4, § 4) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les revenus de M. [G] au jour de son engagement ne lui permettaient pas de faire face à la somme de 1.139,73 euros devant rester à sa charge après réalisation de son patrimoine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016 301 du 14 mars 2016 ;

4) ALORS en toute hypothèse QUE le juge ne doit pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la Crcam de Normandie-Seine soutenait que si la fiche de renseignement remplie par M. [G] mentionnait des revenus annuels de 17.000 euros, un avertissement fiscal démontrait que ses revenus s'élevaient en réalité à 22.301 euros par an (concl. Crcam, p. 10, §§ 1 et 2) ; qu'après avoir rappelé que «la caution dispose autant de son patrimoine comme de ses revenus pour assumer ses engagements» (p. 10, § 3), elle faisait valoir que les ressources de M. [G] représentait la somme totale de «393.812,00 € répartie comme suit : Quote-part maison d'habitation pour 55.410,00 €, assurance vie pour 233.985,00 €, revenus : 22.301,00 €, disponibilités pour 79.214,00 € (apport en capital social 30.000 € + solde du compte bancaire corrigé de 49.214 €), compte PEA de 2.902 € » (p. 10, § 4) ; que la Crcam de Normandie-Seine ajoutait que « même si l'on suit Monsieur [G] en son raisonnement sur la maison d'habitation (qui est une hérésie juridique, mais peu importe), alors il n'y a aucune disproportion manifeste de son engagement de caution : Maison d'habitation (210.000,00 € x 68 %) = 142.800 €, assurance vie pour 233.985,00 €, revenus : 22.301,00 €, disponibilités pour 79.214,00 € (apport en capital social 30.00 € + solde du compte bancaire corrigé de 49.214 €), compte PEA de 2.902 € = 481.202,00 € dont à déduire la totalité de l'emprunt sur la maison restant dû au 5 mars 2015, soit 128.513,00 €, il en résulterait un actif net pour Monsieur [G] de 352.609 €, pour un cautionnement de 331.500 € » (p. 10, dernier §) ; qu'en retenant néanmoins, pour dire le cautionnement inopposable à M. [G], qu'«il n'est pas contesté que ses revenus de 2015 ne lui permettaient pas de faire face à son engagement de caution» (arrêt, p. 4, § 4), la cour d'appel a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-23335
Date de la décision : 15/03/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 08 juillet 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 mar. 2023, pourvoi n°21-23335


Composition du Tribunal
Président : M. Mollard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.23335
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