LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 mars 2023
Rejet
M. SOMMER, président
Arrêt n° 256 FS-D
Pourvoi n° K 20-20.996
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 MARS 2023
M. [E] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 20-20.996 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2020 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société SNCF voyageurs, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société SNCF mobilités, défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. [S], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société SNCF voyageurs, et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 25 janvier 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Rouchayrole, Flores, Mmes Lecaplain-Morel, Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 10 septembre 2020), M. [S] a été engagé en qualité d'agent de service commercial en 1991 par la SNCF, aux droits de laquelle vient la société SNCF voyageurs. Il travaille depuis 2010 à temps partiel choisi.
2. Il a saisi le 12 mars 2018 la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes au titre notamment de congés payés lui restant dus.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter la demande qu'il avait formée au titre des journées chômées supplémentaires, alors :
« 1°/ que les journées chômées supplémentaires doivent faire l'objet d'une programmation au moins à l'avance ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, à quelle date le salarié avait reçu la lettre de son employeur datée du 15 février 2018 l'informant du positionnement des jours de congés supplémentaires des mois de mars et d'avril 2018, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3.3 de l'annexe 1 à l'accord collectif sur le temps de travail RH00662 ;
2°/ qu'en tout état de cause, ni la lettre de la SNCF du 15 février 2018 ni la lettre de la SNCF du 26 février 2018 ne permettent de déterminer à quelle date le salarié a reçu notification de la première de ces deux lettres ; que, dès lors, en considérant qu'il ressortait de ces documents que l'employeur avait notifié au salarié les dates de ses journées chômées supplémentaires dès le 15 février 2018, la cour d'appel les a dénaturés, en violation du principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. »
Réponse de la Cour
4. Ayant relevé que le solde des journées chômées supplémentaires de l'intéressé pour l'exercice 2017 avait été intégralement résorbé au 16 avril 2018 et, procédant à la recherche prétendument omise, retenu, hors toute dénaturation, qu'il résultait des pièces versées aux débats que l'employeur avait notifié au salarié le 15 février 2018, soit dans le délai de prévenance d'un mois, qu'il lui avait accordé douze journées chômées supplémentaires entre le 16 mars et le 27 avril 2018, la cour d'appel, qui en a déduit que le salarié ne rapportait pas la preuve de ce que son employeur avait été défaillant dans la mise en oeuvre des modalités de fixation de ses journées chômées supplémentaires de l'année 2017, a légalement justifié sa décision.
Et sur le second moyen
Énoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre des congés supplémentaires pour enfants à charge, alors :
« 1°/ que lorsque le droit à congé dans l'entreprise, exprimé en jours ouvrés, excède l'équivalent de trente jours ouvrables, le droit à congés supplémentaires pour enfants à charge s'exerce dans la limite de la durée maximale du congé annuel applicable dans l'entreprise et exprimée en jours ouvrés ; que la cour d'appel a constaté, d'une part, qu'au sein de la SNCF, le congé annuel des agents à temps complet est de vingt-huit jours ouvrés et, d'autre part, que, compte tenu de sa durée du travail, M. [S] pouvait prétendre à un congé annuel de vingt-cinq jours ouvrés ; qu'en considérant qu'il ne pouvait pas bénéficier de jours de congés supplémentaires pour enfants à charge dès lors que la durée maximale du congé annuel de trente jours ouvrables était d'ores et déjà atteinte, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-3 et L. 3141-8 du code du travail, ensemble le chapitre 3 du règlement RH00143 relatif aux congés du personnel du cadre permanent du groupe public ferroviaire ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, le salarié faisait valoir que, depuis qu'il était à temps partiel, il ne bénéficiait que de vingt-trois jours de congés par an et n'avait, de ce fait, pas bénéficié de l'intégralité des jours de congés annuels ni des jours supplémentaires pour enfants à charge auxquels il avait droit ; qu'en se bornant à retenir que le nombre de jours de congé annuel auxquels pouvait prétendre l'intéressé était de vingt-cinq jours ouvrés pour en déduire qu'il ne pouvait bénéficier de jours de congés supplémentaires pour enfants à charge, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte des dispositions des articles L. 3141-3 et L. 3141-8 du code du travail que les salariés âgés de vingt-et-un ans au moins à la date du 30 avril de l'année précédente bénéficient de deux jours de congés supplémentaires par enfant à charge, sans que le cumul du nombre des jours de congés supplémentaires et des jours de congés annuels puisse excéder la durée maximale du congé annuel de trente jours ouvrables.
7. L'arrêt constate que le nombre de jours de congés annuels auxquels pouvait prétendre le salarié demandeur était de vingt-cinq jours ouvrés, soit l'équivalent de plus de trente jours ouvrables.
8. La cour d'appel, qui n'avait pas à répondre aux conclusions réputées délaissées par la seconde branche du moyen que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que, la durée totale du congé de l'intéressé excédant trente jours ouvrables, le salarié ne pouvait bénéficier de jours de congés supplémentaires pour enfants à charge.
9. Le moyen est donc mal fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [S] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. [S]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. [S] fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande qu'il avait formée au titre des journées chômées supplémentaires ;
ALORS, 1°), QUE les journées chômées supplémentaires doivent faire l'objet d'une programmation au moins à l'avance ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, à quelle date le salarié avait reçu la lettre de son employeur datée du 15 février 2018 l'informant du positionnement des jours de congés supplémentaires des mois de mars et d'avril 2018, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3.3 de l'annexe 1 à l'accord collectif sur le temps de travail RH00662 ;
ALORS, 2°) et en tout état de cause, QUE ni la lettre de la SNCF du 15février 2018 (pièce du salarié n° 7) ni la lettre de la SNCF du 26 février 2018 (pièce du salarié n° 5) ne permettent de déterminer à quelle date le salarié a reçu notification de la première de ces deux lettres ; que, dès lors, en considérant qu'il ressortait de ces documents que l'employeur avait notifié au salarié les dates de ses journées chômées supplémentaires dès le 15 février 2018, la cour d'appel les a dénaturés, en violation du principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
M. [S] fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande qu'il avait formée au titre des congés supplémentaires pour enfants à charge ;
ALORS, 1°), QUE lorsque le droit à congé dans l'entreprise, exprimé en jours ouvrés, excède l'équivalent de 30 jours ouvrables, le droit à congés supplémentaires pour enfants à charge s'exerce dans la limite de la durée maximale du congé annuel applicable dans l'entreprise et exprimée en jours ouvrés ; que la cour d'appel a constaté, d'une part, qu'au sein de la SNCF, le congé annuel des agents à temps complet est de 28 jours ouvrés et, d'autre part, que, compte tenu de sa durée du travail, M. [S] pouvait prétendre à un congé annuel de 25 jours ouvrés ; qu'en considérant qu'il ne pouvait pas bénéficier de jours de congés supplémentaires pour enfants à charge dès lors que la durée maximale du congé annuel de 30 jours ouvrables était d'ores et déjà atteinte, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-3 et L. 3141-8 du code du travail, ensemble le chapitre 3 du règlement RH00143 relatif aux congés du personnel du cadre permanent du groupe public ferroviaire ;
ALORS, 2°) et en tout état de cause, QUE dans ses conclusions d'appel (pp. 12 à 16), le salarié faisait valoir que, depuis qu'il était à temps partiel, il ne bénéficiait que de 23 jours de congés par an et n'avait, de ce fait, pas bénéficié de l'intégralité des jours de congés annuels ni des jours supplémentaires pour enfants à charge auxquels il avait droit ; qu'en se bornant à retenir que le nombre de jours de congé annuel auxquels pouvait prétendre M. [S] était de 25 jours ouvrés pour en déduire qu'il ne pouvait bénéficier de jours de congés supplémentaires pour enfants à charge, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.