LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° M 22-87.245 F-D
N° 00432
ODVS
8 MARS 2023
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 MARS 2023
Le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, M. [C] [W], M. [U] [A] et M. [E] [M] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 3 octobre 2022, qui a renvoyé devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, le deuxième, sous l'accusation de tentative de meurtre, assassinat, recel, en bande organisée, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les armes, en récidive, le troisième, sous l'accusation de complicité de tentative de meurtre, complicité d'assassinat, en bande organisée, association de malfaiteurs, le quatrième, sous l'accusation d'association de malfaiteurs, recel en bande organisée, en récidive.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. [U] [A], de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [C] [W], et de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [E] [M], les observations de Me Haas, avocat de Mmes [H] [O], [S] [L] et M. [X] [L], et les conclusions de M. Petitprez, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 mars 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 1er septembre 2012, M. [N] [V] a été grièvement blessé par une rafale de fusil automatique tirée par le passager arrière d'une moto de grosse cylindrée.
3. Une information judiciaire a été ouverte le 11 septembre 2012 sur ces faits, des chefs de tentative de meurtre en bande organisée et infractions à la législation sur les armes.
4. Le [Date décès 1] 2012, [P] [L] a été tué par plusieurs coups de feu. Les images de vidéosurveillance de la station-service où les faits se sont déroulés ont révélé que l'auteur des tirs, effectués à l'aide d'une arme de poing, était le passager arrière d'une moto BMW 1200 GS.
5. Une information judiciaire a été ouverte le 19 octobre 2012 des chefs d'assassinat en bande organisée et association de malfaiteurs.
6. Les procédures ont été jointes le 5 novembre 2014.
7. Par ordonnance en date du 28 janvier 2022, le juge d'instruction a, notamment, ordonné le renvoi devant la cour d'assises de M. [C] [W] sous l'accusation de tentative de meurtre, assassinat, recel, en bande organisée, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les armes, en récidive, de M. [U] [A] sous l'accusation de complicité de tentative de meurtre, complicité d'assassinat, en bande organisée, association de malfaiteurs, et de M. [E] [M] sous l'accusation d'association de malfaiteurs, recel en bande organisée, en récidive.
8. MM. [W], [A] et [M], ainsi que le ministère public et certaines parties civiles ont interjeté appel de cette décision.
Déchéance du pourvoi formé par le procureur général
9. Le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence n'a pas déposé de mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen des moyens
Sur les moyens proposés pour MM. [A] et [M]
10. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le premier moyen proposé pour M. [W]
Enoncé du moyen
11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé sa mise en accusation devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône des chefs d'assassinat commis en bande organisée au préjudice d'[P] [L], de tentative d'assassinat commis en bande organisée au préjudice de M. [V], de recel commis en bande organisée et d'acquisition, détention, port et transport d'arme de catégorie B, alors « que devant la chambre de l'instruction, la personne mise en examen ou son avocat doivent avoir la parole les derniers ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt qu'ont été entendus la conseillère en son rapport, le conseil des parties civiles puis les conseils des mis en examen en leurs observations, l'avocat général en ses réquisitions et que « les conseils présents ont eu la parole en dernier » ; qu'en l'état de ces mentions, qui ne distinguent pas qui du conseil des parties civiles ou des conseils des mis en examen ont eu la parole en dernier et qui ne permettent donc pas à la Cour de cassation de s'assurer que le principe ci-dessus rappelé a été respecté, la chambre de l'instruction a violé les articles 6 de la Convention des droits de l'homme, 199 du code de procédure pénale et les principes généraux du droit. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 199 du code de procédure pénale :
12. Il se déduit des dispositions de ces textes et des principes généraux du droit que, devant la chambre de l'instruction, la personne mise en examen, lorsqu'elle comparaît, ou son avocat doivent avoir la parole en dernier.
13. L'arrêt attaqué rappelle, notamment, la présence à l'audience des avocats de MM. [W] et [M], de celui des parties civiles Mme [S] [L] et M. [X] [L], l'absence des avocats de M. [A], et énonce que les conseils présents ont eu la parole en dernier.
14. Ces mentions, qui, alors que M. [W] ne comparaissait pas, ne distinguent pas son avocat de celui des parties civiles, ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer que le principe ci-dessus rappelé a été respecté.
15. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
16. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la mise en accusation de M. [W].
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés pour M. [W], la Cour :
Sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence :
CONSTATE la déchéance du pourvoi ;
Sur les pourvois formés par M. [A] et M. [M] :
Les DÉCLARE NON-ADMIS ;
Sur le pourvoi formé par M. [W] :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 3 octobre 2022, mais en ses seules dispositions ayant prononcé la mise en accusation et le renvoi devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône de M. [W], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.