LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 février 2023
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 187 F-D
Pourvoi n° U 21-16.615
Aide juridictionnelle totale en demande
pour Mme [R].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 mars 2021.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 FÉVRIER 2023
Mme [H] [R], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-16.615 contre le jugement rendu le 23 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Perpignan (pôle social, contentieux de la sécurité sociale), dans le litige l'opposant à la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de Mme [R], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué ([Localité 3], 23 septembre 2020), rendu en dernier ressort, à la suite d'un contrôle, la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales (la caisse) a notifié, par lettre du 20 novembre 2018, à Mme [R] (l'allocataire) un indu d'un certain montant au titre de différentes prestations familiales et d'aide sociale.
2. L'allocataire a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. L'allocataire fait grief au jugement de rejeter son recours, alors « que les décisions des organismes de sécurité sociale ordonnant le reversement de prestations sociales indûment perçues doivent être motivées de manière à permettre à l'assuré d'avoir connaissance de la nature, de la cause et du montant des sommes réclamées et de faire utilement valoir ses observations ; qu'en l'espèce, le courrier de notification adressé le 20 novembre 2018 par la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales fait état d'une somme globale portant sur quatre prestations de nature différente, de sorte qu'il était impossible à l'allocataire, à sa lecture, d'apprécier la nature des sommes qui lui étaient réclamées ; qu'en jugeant toutefois que cette lettre de notification informait suffisamment l'allocataire sur la nature, la cause et le montant des sommes réclamées et qu'elle lui permettait de faire utilement valoir ses observations, le tribunal judiciaire a violé l'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 211-5 et L. 211-8 du même code. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'article L. 133-4-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004, applicable au litige, en cas de versement indu d'une prestation, l'organisme de sécurité sociale récupère l'indu correspondant auprès de l'assuré.
5. Selon l'article R. 133-9-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012, applicable au litige, l'action en recouvrement de prestations indues s'ouvre par l'envoi au débiteur par le directeur de l'organisme compétent d'une notification de payer, précisant le motif, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements donnant lieu à répétition.
6. Ayant constaté que les notifications réceptionnées par l'allocataire mentionnaient la nature des prestations indûment perçues, les périodes des versements indus de chacune de ces prestations, le montant global de la dette, et les motifs, le tribunal a exactement déduit que l'allocataire avait été informée de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.
7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
8. L'allocataire fait le même grief au jugement alors, « que la prescription biennale est applicable à l'action intentée par la caisse d'allocations familiales pour le recouvrement de prestations qu'elle a versées à tort, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration ; que la fraude ou la fausse déclaration ne peuvent être retenues qu'en présence d'actes délibérés imputables à l'assuré ; qu'en estimant que la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales échappait à la prescription biennale en raison d'une fausse déclaration imputable à l'allocataire, sans rechercher si cette dernière était informée de la nécessité de déclarer l'ensemble de ses sources de revenus et si elle avait manqué délibérément à son obligation déclarative dans le but de percevoir des prestations auxquelles elle savait ne pas pouvoir prétendre, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
9. Il résulte de la combinaison des articles 2224 du code civil et L. 553-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, applicable au litige, qu'en cas de fraude ou de fausse déclaration de l'allocataire, l'action de l'organisme social aux fins de recouvrement des prestations familiales indûment versées n'est pas soumise à la prescription biennale mais au délai de prescription de droit commun.
10. C'est par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus devant lui que le tribunal a estimé que l'allocataire ne pouvait légitimement ignorer devoir mentionner dans ses déclarations trimestrielles de ressources l'aide financière versée mensuellement par son compagnon ni les salaires de son fils et qu'elle devait en conséquence être regardée comme ayant effectué de fausses déclarations au sens de l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale.
11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [R] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du seize février deux mille vingt-trois par Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme [R].
Mme [H] [R] reproche au jugement attaqué de l'avoir déboutée de toutes ses demandes, d'avoir confirmé la décision du 20 novembre 2018, ensemble la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable et de l'avoir condamnée au paiement de la somme de 2 823 euros en remboursement du solde des indus d'allocation de logement familial et d'allocation de logement social pour la période du 1er février 2016 au 30 novembre 2017 ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les décisions des organismes de sécurité sociale ordonnant le reversement de prestations sociales indûment perçues doivent être motivées de manière à permettre à l'assuré d'avoir connaissance de la nature, de la cause et du montant des sommes réclamées et de faire utilement valoir ses observations ; qu'en l'espèce, le courrier de notification adressé le 20 novembre 2018 par la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales fait état d'une somme globale portant sur quatre prestations de nature différente, de sorte qu'il était impossible à Mme [R], à sa lecture, d'apprécier la nature des sommes qui lui étaient réclamées ; qu'en jugeant toutefois que cette lettre de notification informait suffisamment Mme [R] sur la nature, la cause et le montant des sommes réclamées et qu'elle lui permettait de faire utilement valoir ses observations (jugement attaqué, p. 5, alinéas 2 et 3), le tribunal judiciaire a violé l'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 211-5 et L. 211-8 du même code ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la prescription biennale est applicable à l'action intentée par la caisse d'allocations familiales pour le recouvrement de prestations qu'elle a versées à tort, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration ; que la fraude ou la fausse déclaration ne peuvent être retenues qu'en présence d'actes délibérés imputables à l'assuré ; qu'en estimant que la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Orientales échappait à la prescription biennale en raison d'une fausse déclaration imputable à Mme [R], sans rechercher si cette dernière était informée de la nécessité de déclarer l'ensemble de ses sources de revenus et si elle avait manqué délibérément à son obligation déclarative dans le but de percevoir des prestations auxquelles elle savait ne pas pouvoir prétendre, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale.