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18/01/2023 | FRANCE | N°21-24002

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 janvier 2023, 21-24002


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Irrecevabilité

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 58 F-D

Pourvoi n° Y 21-24.002

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 JANVIER 2023

La société Median, société à respo

nsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-24.002 contre l'arrêt n° RG 21/12665 rendu le 21 octobre 2021 par la co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Irrecevabilité

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 58 F-D

Pourvoi n° Y 21-24.002

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 JANVIER 2023

La société Median, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-24.002 contre l'arrêt n° RG 21/12665 rendu le 21 octobre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société [U] partners, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8], en la personne de M. [P] [U], prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société Median,

2°/ à la société Actis mandataires judiciaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 7], en la personne de M. [Z] [F], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Median,

3°/ à la société Aareal Bank AG, société de droit allemand, dont le siège est [Adresse 11] (Allemagne), prise en qualité de contrôleur à la procédure de la société Median,

4°/ à l'UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de contrôleur à la procédure de la société Median,

5°/ à la société Sofibra, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 9],

6°/ à la société Bertrand Corp, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 10],

7°/ à la société Lavorel groupe, société de droit luxembourgeois, dont le siège est [Adresse 6],

8°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son Parquet général, cour d'appel de Paris, 8 boulevard du Palais, 75001 Paris,

9°/ à M. [T] [J] [L], domicilié [Adresse 5], pris en qualité de représentant des salariés de la société Median,

10°/ à M. [G] [C], domicilié [Adresse 4],
pris en qualité de représentant des salariés de la société Median,

11°/ à la société [N] Yang-Ting, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de Mme [R] [N], prise en qualité de mandataire ad hoc de la société Median,

défendeurs à la cassation.

Les sociétés Sofibra, Aareal Bank AG et Lavorel groupe ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La société Bertrand Corp a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SARL Cabinet [B], constituée en lieu et place de la SCP Boullez le 17 janvier 2023, avocat de la société Median, de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Bertrand Corp, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société [U] partners, ès qualités, et de la société Actis mandataires judiciaires, ès qualités, de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Aareal Bank AG, ès qualités, et des sociétés Sofibra et Lavorel groupe, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société [N] Yang-Ting, ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Sur les demandes de sursis à statuer et de réouverture des débats

1. Il n'y a pas lieu de surseoir à l'examen des pourvois ni de rouvrir les débats dans la mesure où les parties ont d'ores et déjà, dans leurs différents mémoires, échangé leur argumentation sur les conséquences susceptibles de résulter de la rétractation de la désignation du mandataire ad hoc de la société Median.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 octobre 2021, RG n° 21/12665), la société Median, appartenant au groupe JJW, qui avait, sous le régime de la solidarité avec d'autres sociétés de ce groupe, obtenu un prêt de la société Aareal Bank AG (la banque) est intervenue à l'instance en paiement engagée par cette banque contre la société JJW Limited pour y soulever la nullité du prêt.

3. Un jugement du 17 avril 2012 ayant mis la société Median en sauvegarde, la banque a déclaré sa créance qui a été contestée. Par une ordonnance du 24 juin 2014, confirmée par un arrêt du 25 juin 2015, le juge-commissaire a prononcé un sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir au fond.

4. Un jugement du tribunal de commerce de Paris du 28 septembre 2017 a rejeté les contestations des sociétés du groupe JJW et a condamné la société JJW Limited à payer à la banque la somme de 22 091 922,13 euros. Un arrêt du 13 mars 2019 a rejeté les contestations des sociétés du groupe JJW et confirmé ce jugement.

5. Par une ordonnance du 29 janvier 2020, le juge-commissaire a admis la créance de la banque au passif des sociétés du groupe JJW pour la somme de 96 885 807,78 euros.

6. Un jugement du 26 juin 2020 a prononcé la résolution de son plan de sauvegarde et mis la société Median en redressement judiciaire, désignant la société Actis mandataires judiciaires en qualité de mandataire judiciaire et la société [U] Perdereau, devenue la société [U] partners en qualité d'administrateur.

7. Le 5 février 2021, l'administrateur judiciaire a déposé au greffe le bilan économique et social de la société Median et a conclu à sa cession de même qu'à celle des autres sociétés du groupe.

8. Par un arrêt du 24 mars 2021 (pourvoi n° 19-14.082), la chambre commerciale, financière et économique a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt du 13 mars 2019. La cour d'appel de renvoi n'a pas été saisie par les parties dans le délai prévu par l'article 1034 du code de procédure civile.

9. Par un jugement du 21 mai 2021, le tribunal a rejeté le projet de plan de continuation de la société Median, avant, par un premier jugement du 25 juin 2021 d'ordonner la cession de ses actifs aux sociétés Bertrand Corp, Lavorel groupe et Sofibra, puis, par un second jugement du même jour, de la mettre en liquidation judiciaire, la société [U] partners étant maintenue en ses fonctions d'administrateur judiciaire pour une durée de six mois et la société Actis mandataires judiciaires désignée en qualité de liquidateur.

10. Par une ordonnance du 18 octobre 2021, le président du tribunal de commerce, saisi par le liquidateur, a désigné la société [N] Yang-Ting en qualité de mandataire ad hoc pour exercer les droits propres de la société Median. Il a rétracté cette décision par une ordonnance de référé du 13 décembre 2022.

Nullité et irrecevabilité du pourvoi soulevées par la défense

Sur l'irrégularité du pourvoi en ce qu'il a été formé par la société débitrice hors la présence du mandataire ad hoc désigné pour l'exercice de ses droits propres

11. La défense soulève la nullité de la déclaration de pourvoi et, en tout état de cause, l'irrecevabilité de cette voie de recours, puis du mémoire ampliatif, au motif que le pourvoi aurait été formé par la société Median hors la présence de son administrateur ad hoc qui ne l'a pas régularisé.

12. Néanmoins, la désignation du mandataire ad hoc ayant été rétractée, le pourvoi en cassation de la société Median n'est entaché ni de nullité ni d'irrecevabilité à ce titre.

Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est fondé sur la perte de fondement juridique de l'arrêt

Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile :

13. En application de ce texte, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

14. La société Median prétend qu'à la suite de la cassation, par l'arrêt du 24 mars 2021, de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 13 mars 2019, confirmant le jugement du tribunal de commerce de Paris du 28 septembre 2017, rejetant ses contestations formées contre l'acte de prêt consenti par la société Aareal Bank AG, et de l'absence de saisine de la cour d'appel de renvoi, la banque serait dans l'incapacité de parvenir à la fixation de sa créance au passif de sa procédure collective ou, à tout le moins que cette créance ne lui serait pas opposable, de sorte qu'elle serait fondée à demander à la Cour de cassation qu'elle constate, par perte de fondement juridique, l'anéantissement rétroactif de l'ordonnance ayant fixé la créance de la banque, ainsi que du jugement ayant prononcé la résolution de son plan de sauvegarde et des jugements de rejet du plan de continuation puis d'arrêt d'un plan de cession qui en constitueraient la suite nécessaire.

15. Il résulte de l'article 1034 du code de procédure civile que l'absence de saisine de la cour d'appel de renvoi dans le délai de deux mois par une déclaration recevable confère force de chose jugée au jugement rendu en premier ressort lorsque la décision cassée avait été rendue sur appel de ce jugement. Or, le jugement du 28 septembre 2017, confirmé par la décision cassée, a rejeté les contestations de la société Median, de sorte que, contrairement à ce qui est soutenu par cette société, l'ordonnance rendue par le juge-commissaire le 29 janvier 2020, constatant l'admission de la créance de la société Aareal Bank AG à la suite du rejet de l'appel, ne peut être privée de fondement juridique par la cassation de l'arrêt. De plus, le juge-commissaire avait, par son ordonnance du 24 juin 2014, confirmée par l'arrêt du 25 juin 2015, sursis à statuer sur la fixation de la créance selon les règles de procédure civile de droit commun et non en application de l'article L. 624-2 du code de commerce, de sorte qu'à supposer sa seconde ordonnance entachée de nullité, comme le soutient la société Median, ce juge-commissaire ne serait pas pour autant dessaisi de la demande d'admission de la créance de la société Aareal Bank AG qui doit nécessairement être prise en considération dans la procédure collective de la société Median dès lors qu'elle y a été déclarée.

16. Le pourvoi de la société Median, celle-ci fût-elle régulièrement représentée, n'est donc pas rendu recevable par la nécessité de constater l'annulation, par voie de conséquence, des décisions que cette société critique.

Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'est invoquée l'existence d'un excès de pouvoir

Vu l'article L. 661-7, alinéa 2, du code de commerce :

17. Il résulte de ce texte que le pourvoi en cassation n'est ouvert qu'au ministère public à l'encontre des arrêts rendus en application de l'article L. 661-6, III, du code de commerce et il n'est dérogé à cette règle, comme à toute autre règle interdisant ou différant un recours, qu'en cas d'excès de pouvoir.

18. Si l'article L. 631-22 du code de commerce prévoit qu'une juridiction peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise si le ou les plans proposés apparaissent manifestement insusceptibles d'en permettre le redressement ou en l'absence de tels plans, il ne résulte pas de ce texte que cette juridiction est tenue de statuer par un seul et même jugement sur tous les projets de plan, ni d'attendre, en l'absence d'une décision d'arrêt de l'exécution provisoire de droit assortissant le jugement antérieur de rejet du projet de plan de continuation prononcée, en cas d'appel de ce jugement, par le premier président en application de l'article R. 661-1 du même code, qu'il soit statué sur cet appel pour examiner un projet de plan de cession.

19. Formé contre une décision qui n'est entachée d'aucun excès de pouvoir et qui n'a pas consacré un excès de pouvoir, le pourvoi est, en conséquence, irrecevable.

Recevabilité des pourvois incidents

20. En application de l'article 1014, alinéa 1, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois incidents qui sont irrecevables en l'absence d'invocation d'un excès de pouvoir commis ou consacré par la cour d'appel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer et de rouvrir les débats ;

DÉCLARE IRRECEVABLES le pourvoi principal et les pourvois incidents ;

Condamne la société Median aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-24002
Date de la décision : 18/01/2023
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 octobre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 jan. 2023, pourvoi n°21-24002


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 31/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.24002
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