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18/01/2023 | FRANCE | N°21-22141

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 janvier 2023, 21-22141


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 25 F-D

Pourvoi n° A 21-22.141

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 JANVIER 2023

Mme [M] [C] [I], domiciliée [Adresse 2], a formÃ

© le pourvoi n° A 21-22.141 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le liti...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 25 F-D

Pourvoi n° A 21-22.141

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 JANVIER 2023

Mme [M] [C] [I], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 21-22.141 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. [N] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [I], de Me Soltner, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 15 juin 2021), Mme [I] a été engagée le 4 février 2013 en qualité d'assistante de gestion par M. [D], exerçant sous le nom commercial « Transports [D] ». Elle a été licenciée pour inaptitude le 18 juin 2014.

2. Soutenant avoir subi un harcèlement moral, la salariée a saisi, le 11 juin 2015, la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la nullité de son licenciement et au paiement de diverses sommes au titre du harcèlement moral, de la rupture du contrat de travail et d'indemnité pour travail dissimulé.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes fondées sur les agissements de harcèlement moral, alors :

« 1° / que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits et d'apprécier, ensuite, si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont toutes justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge ne peut donc examiner séparément les documents médicaux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que les deux certificats du Dr [Z] du 15 mars 2014 indiquant que Mme [I] « présente un état anxio-dépressif secondaire a ses conditions de travail » et du Dr [T] psychiatre indiquant que Mme [I]?présente un symptôme anxiodépressif dans un contexte de difficultés professionnelles ne lui permettant plus de se représenter actuellement un projet de reprise [illisible] et nécessité de maintien à distance" ne peuvent établir la preuve de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral dès lors que leurs auteurs, médecins, n'ont fait que relater les doléances de leur patiente" ; que la cour d'appel a retenu, par ailleurs, que les heures supplémentaires non payées et conditions matérielles de travail, considérées dans leur ensemble, ne caractérisent aucun fait laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral" ; qu'en appréciant séparément, d'une part, les pièces médicales et, d'autre part, le défaut de paiement des heures supplémentaires et les conditions de travail de Mme [I], cependant qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis et les certificats médicaux laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient toutes justifiées objectivement et étrangères à un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2° / que font présumer un harcèlement moral le fait de ne pas régler au salarié ses heures supplémentaires, de le faire travailler dans des conditions matérielles difficiles, ajoutées à l'état anxio-dépressif du salarié médicalement constaté ; qu'en l'espèce, l'arrêt a constaté que l'employeur était débiteur de la somme de 9 892,94 euros à titre d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents, que M. [S], conseiller du salarié, certifie que Mme [I] travaillait dans un container déjà agencé avec des meubles et très peu de place pour travailler dans des bonnes conditions de travail" et que deux certificats médicaux attestaient de son état anxio-dépressif ; qu'en ne tirant pas les conséquence de ses propres constatations, qui mettaient en évidence une situation laissant présumer une situation de harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, après avoir constaté que certains faits invoqués n'étaient pas établis, retenu que ceux qu'elle a estimé établis, pris dans leur ensemble, ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, alors « que commet une dissimulation d'emploi intentionnelle l'employeur qui commence à faire travailler un salarié sans déclaration préalable à l'embauche ni contrat de travail ni bulletin de paie et qui ne règle pas les heures supplémentaires effectuées ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations, selon lesquelles aucun bulletin de paie n'avait été établi pour janvier 2013, une déclaration préalable à l'embauche ayant été faite le 19 février 2013, un contrat avait été établi le 4 février 2013, l'employeur étant débiteur de la somme de 9 892,94 euros à titre d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents, ce dont il résultait que l'employeur s'était rendu coupable d'une dissimulation d'emploi intentionnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. D'une part, il résulte des conclusions de la salariée devant la cour d'appel que celle-ci invoquait l'existence d'une première déclaration préalable à l'embauche le 14 janvier 2013.

8. D'autre part, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par la cour d'appel de l'absence d'élément intentionnel en matière de travail dissimulé.

9. Le moyen ne peut dès lors être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme [I]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme [I] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes fondées sur les agissements de harcèlement moral ;

Alors 1°) que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits et d'apprécier, ensuite, si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont toutes justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge ne peut donc examiner séparément les documents médicaux ;qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que les deux certificats du Dr [Z] du 15 mars 2014 indiquant que Mme [I] « présente un état anxio-dépressif secondaire a ses conditions de travail » et du Dr [T] psychiatre indiquant que « Mme [I]?présente un symptôme anxiodépressif dans un contexte de difficultés professionnelles ne lui permettant plus de se représenter actuellement un projet de reprise [illisible] et nécessité de maintien à distance »« ne peuvent établir la preuve de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral dès lors que leurs auteurs, médecins, n'ont fait que relater les doléances de leur patiente » ;
que la cour d'appel a retenu, par ailleurs, que les heures supplémentaires non payées et conditions matérielles de travail, « considérées dans leur ensemble, ne caractérisent aucun fait laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral » ; qu'en appréciant séparément, d'une part, les pièces médicales et, d'autre part, le défaut de paiement des heures supplémentaires et les conditions de travail de Mme [I], cependant qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis et les certificats médicaux laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient toutes justifiées objectivement et étrangères à un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

Alors 2° ) que font présumer un harcèlement moral le fait de ne pas régler au salarié ses heures supplémentaires, de le faire travailler dans des conditions matérielles difficiles, ajoutées à l'état anxio-dépressif du salarié médicalement constaté ; qu'en l'espèce, l'arrêt a constaté que l'employeur était débiteur de la somme de 9 892,94 € à titre d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents, que M. [S], conseiller du salarié, certifie que Mme [I] travaillait dans un container déjà agencé avec des meubles et « très peu de place pour travailler dans des bonnes conditions de travail » et que deux certificats médicaux attestaient de son état anxio-dépressif ; qu'en ne tirant pas les conséquence de ses propres constatations, qui mettaient en évidence une situation laissant présumer une situation de harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Mme [I] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté sa demande d'indemnité pour travail dissimulé ;

Alors que commet une dissimulation d'emploi intentionnelle l'employeur qui commence à faire travailler un salarié sans déclaration préalable à l'embauche ni contrat de travail ni bulletin de paie et qui ne règle pas les heures supplémentaires effectuées ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations, selon lesquelles aucun bulletin de paie n'avait été établi pour janvier 2013, une déclaration préalable à l'embauche ayant été faite le 19 février 2013, un contrat avait été établi le 4 février 2013, l'employeur étant débiteur de la somme de 9 892,94 € à titre d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents, ce dont il résultait que l'employeur s'était rendu coupable d'une dissimulation d'emploi intentionnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-22141
Date de la décision : 18/01/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 15 juin 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jan. 2023, pourvoi n°21-22141


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Soltner, SARL Cabinet Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.22141
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