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18/01/2023 | FRANCE | N°19-10111

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 janvier 2023, 19-10111


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Rejet

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 49 F-B

Pourvoi n° G 19-10.111

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 JANVIER 2023

M. [I] [W], domici

lié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 19-10.111 contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2018 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2023

Rejet

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 49 F-B

Pourvoi n° G 19-10.111

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 JANVIER 2023

M. [I] [W], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 19-10.111 contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2018 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [T] [X], domiciliée [Adresse 1],

2°/ à Mme [K] [L], domiciliée [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [W], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [L], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, M. Chevalier, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à M. [W] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [X].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 6 novembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 11 mai 2017, pourvoi n° 16-17.675), le 9 mars 2008, Mme [L] a acquis de M. [W] un véhicule d'occasion de marque Porsche. Le 30 novembre 2008, elle a échangé ce véhicule avec un autre appartenant à Mme [X].

3. Après avoir appris que le véhicule Porsche avait été gravement accidenté et obtenu en référé une expertise déposée le 25 août 2010, ayant conclu qu'un choc violent avait été subi par le véhicule en mai 2006, que les réparations n'avaient pas été réalisées dans les règles de l'art et que le véhicule était économiquement irréparable, Mme [X] a assigné en résolution de l'échange Mme [L].

4. Le 20 mars 2012, Mme [L] a appelé M. [W] en garantie des vices cachés.

5. Un jugement du 28 juillet 2014, confirmé par un arrêt du 22 mars 2016, a prononcé la résolution de la vente entre Mmes [L] et [X], condamné Mme [L] à indemniser Mme [X] et ordonné la restitution du véhicule Porsche à Mme [L].

6. A l'issue d'une cassation partielle de l'arrêt du 22 mars 2016, en ce qu'il avait rejeté la demande en garantie des vices cachés formée par Mme [L] contre M. [W], celle-ci a sollicité une réduction du prix de vente du véhicule Porsche. M. [W] a opposé des fins de non-recevoir tendant à voir déclarer irrecevable cette demande.

Examen des moyens

Sur les trois moyens réunis

Enoncé des moyens

7. Par son premier moyen, M. [W] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à Mme [L] la somme de 21 799 euros à titre de restitution d'une partie du prix de vente du véhicule, alors « que les demandes nouvelles formulées en appel sont irrecevables ; qu'à titre d'exception, peuvent être formulées pour la première fois en appel, les demandes tendant aux mêmes fins que celles introduites devant les premiers juges ; que l'action en garantie dirigée, par le défendeur à une action en vice caché, contre de son propre vendeur n'a pas le même objet que l'action estimatoire qu'il peut intenter directement contre ce dernier ; qu'en décidant le contraire, pour décider que l'action estimatoire n'était pas nouvelle et donc recevable, la cour d'appel a violé les articles 564, 565 et 633 du code de procédure civile. »

8. Par son deuxième moyen, M. [W] fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que la cassation a pour seul effet de saisir la juridiction de renvoi, sous réserve d'une déclaration de saisine, du chef ayant donné lieu à censure ; qu'il est dès lors exclu qu'une partie abandonne la demande, devant la juridiction de renvoi, pour former une demande distincte de celle soumise aux premiers juges ayant donné lieu à cassation ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 623, 624, 625 et 631 du code de procédure civile ;

2°/ que s'il est vrai que devant la juridiction de renvoi, une partie peut formuler une demande nouvelle, sous réserve qu'elle soit recevable, c'est à la condition que l'auteur de cette demande reprenne la demande formulée devant la cour d'appel et qui été le siège de la cassation ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 623, 624, 625 et 631 du code de procédure civile. »

9. Par son troisième moyen, M. [W] fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que la demande en réduction de prix fondée sur l'action estimatoire n'ayant été formée que le 4 janvier 2018, dans le cadre des conclusions déposées par Mme [L] devant la cour d'appel de Caen désignée comme juridiction de renvoi, cette demande devait être déclarée irrecevable comme prescrite, dès lors que Mme [L] a eu connaissance du vice à la date du 25 août 2010, le délai de deux ans qui lui était ouvert à compter de cette date étant largement expiré ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 1648 du code civil ;

2°/ qu'une assignation n'a d'effet interruptif qu'à l'égard de l'action qu'elle vise ; qu'ainsi l'effet interruptif attaché à l'assignation du mars 2012, en tant qu'elle tendait à obtenir la garantie de M. [W] à l'égard des condamnations susceptibles d'être prononcées au profit de Mme [X], ne pouvait interrompre le délai de prescription s'agissant de l'action estimatoire ouverte à Mme [L], dès le 25 août 2010, à l'encontre de M. [W], son vendeur ; qu'à cet égard encore, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 1648 du code civil. »

Réponse de la Cour

10. En premier lieu, dès lors qu'il résulte de l'article 1644 du code civil qu'en cas de défaut de la chose vendue, l'acheteur a le choix entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire et peut, après avoir exercé l'une, exercer l'autre tant qu'il n'a pas été statué sur sa demande par une décision passée en force de chose jugée, les premier et troisième moyens, qui soutiennent que l'action estimatoire intentée par Mme [L] en appel, substituée à sa demande en garantie de la condamnation ayant accueilli l'action rédhibitoire de Mme [X], est une demande nouvelle qui ne tend pas aux même fins et qui est prescrite en l'absence d'interruption de la prescription par l'assignation du 20 mars 2012, sont inopérants.

11. En second lieu, contrairement aux énonciations du deuxième moyen, les dispositions des articles 623 et suivants du code de procédure civile ne soumettent pas, à l'issue de la cassation qui replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la décision cassée, la recevabilité d'une demande nouvelle à d'autres règles que celles qui s'appliquaient devant la juridiction dont la décision a été cassée et n'imposent dès lors pas aux parties de reprendre les demandes formées devant cette juridiction.

12. Les moyens ne peuvent donc être accueillis.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [W] et le condamne à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. [W].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a, sur l'action estimatoire de Madame [L], condamné Monsieur [W] à payer à Madame [L] la somme de 21.799 euros à titre de restitution d'une partie du prix de vente du véhicule ;

AUX MOTIFS QU' « en première instance, Mme [R] demandait, aux termes d'une assignation devant le tribunal de grande instance de Caen en date du 20 mars 2012, "vu les articles 1641 et suivants du code civil", "vu le rapport d'expertise de M. [U]", de "condamner M. [I] [W] à garantir Mme [K] [L] de toutes sommes pouvant être mises à sa charge à la suite de l'action engagée à son encontre par Mme [X]" ; qu'à hauteur d'appel, Mme [L] demande, notamment, "vu les articles 1641 et suivants du code civil", de "réformer le jugement du 28 juillet 2014 en ce qu'il a seulement condamné M. [W] à garantir Mme [L] de la condamnation prononcée contre elle à hauteur de 27 900 euros au bénéfice de Mme [T] [X]" et, statuant à nouveau, "dire Mme [L] bien fondée à agir à l'encontre de M. [W] sur le fondement de la garantie des vices cachés" et "dire qu'à ce titre, Mme [L] est en droit de solliciter une réduction du prix de vente du véhicule jusqu'à sa valeur réelle" ; qu'or, la demande en garantie d'une condamnation ayant accueilli Faction rédhibitoire du sous acquéreur et l'action estimatoire formées, respectivement, en première instance puis en appel par le vendeur intermédiaire, fondées sur les dispositions de l'article 1641 du code civil, constituent, sous deux formes différentes, l'exercice du même droit et tendent aux mêmes fins, à savoir l'engagement de la responsabilité du vendeur originaire en raison des défauts cachés de la chose vendue, de sorte que la demande présentée devant la cour d'appel est recevable comme ne constituant pas une demande nouvelle » ;

ALORS QUE les demandes nouvelles formulées en appel sont irrecevables ; qu'à titre d'exception, peuvent être formulées pour la première fois en appel, les demandes tendant aux mêmes fins que celles introduites devant les premiers juges ; que l'action en garantie dirigée, par le défendeur à une action en vice caché, contre de son propre vendeur n'a pas le même objet que l'action estimatoire qu'il peut intenter directement contre ce dernier ; qu'en décidant le contraire, pour décider que l'action estimatoire n'était pas nouvelle et donc recevable, la cour d'appel a violé les articles 564, 565 et 633 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a, sur l'action estimatoire de Madame [L], condamné Monsieur [W] à payer à Madame [L] la somme de 21.799 euros à titre de restitution d'une partie du prix de vente du véhicule ;

AUX MOTIFS QU' « en première instance, Mme [R] demandait, aux termes d'une assignation devant le tribunal de grande instance de Caen en date du 20 mars 2012, "vu les articles 1641 et suivants du code civil", "vu le rapport d'expertise de M. [U]", de "condamner M. [I] [W] à garantir Mme [K] [L] de toutes sommes pouvant être mises à sa charge à la suite de l'action engagée à son encontre par Mme [X]" ; qu'à hauteur d'appel, Mme [L] demande, notamment, "vu les articles 1641 et suivants du code civil", de "réformer le jugement du 28 juillet 2014 en ce qu'il a seulement condamné M. [W] à garantir Mme [L] de la condamnation prononcée contre elle à hauteur de 27 900 euros au bénéfice de Mme [T] [X]" et, statuant à nouveau, "dire Mme [L] bien fondée à agir à l'encontre de M. [W] sur le fondement de la garantie des vices cachés" et "dire qu'à ce titre, Mme [L] est en droit de solliciter une réduction du prix de vente du véhicule jusqu'à sa valeur réelle" ; qu'or, la demande en garantie d'une condamnation ayant accueilli Faction rédhibitoire du sous acquéreur et l'action estimatoire formées, respectivement, en première instance puis en appel par le vendeur intermédiaire, fondées sur les dispositions de l'article 1641 du code civil, constituent, sous deux formes différentes, l'exercice du même droit et tendent aux mêmes fins, à savoir l'engagement de la responsabilité du vendeur originaire en raison des défauts cachés de la chose vendue, de sorte que la demande présentée devant la cour d'appel est recevable comme ne constituant pas une demande nouvelle » ;

ALORS QUE, premièrement, la cassation a pour seul effet de saisir la juridiction de renvoi, sous réserve d'une déclaration de saisine, du chef ayant donné lieu à censure ; qu'il est dès lors exclu qu'une partie abandonne la demande, devant la juridiction de renvoi, pour former une demande distincte de celle soumise aux premiers juges ayant donné lieu à cassation ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 623, 624, 625 et 631 du Code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, s'il est vrai que devant la juridiction de renvoi, une partie peut formuler une demande nouvelle, sous réserve qu'elle soit recevable, c'est à la condition que l'auteur de cette demande reprenne la demande formulée devant la cour d'appel et qui été le siège de la cassation ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 623, 624, 625 et 631 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a, sur l'action estimatoire de Madame [L], condamné Monsieur [W] à payer à Madame [L] la somme de 21.799 euros à titre de restitution d'une partie du prix de vente du véhicule ;

AUX MOTIFS QU' « aux termes de l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice ; que la connaissance certaine du vice par l'acheteur, marquant le point de départ du bref délai, peut se situer au jour de la notification du rapport d'expertise ; que le vendeur intermédiaire ne peut agir contre le vendeur originaire avant d'avoir été lui-même assigné par son acquéreur, le point de départ du bref délai étant constitué par sa propre assignation ; qu'en l'espèce, Mme [L] a pu prendre connaissance de manière certaine des défauts cachés du véhicule litigieux à compter de l'établissement du rapport d'expertise de M. [U] en date du 26 août 2010. Elle a, en outre, été assignée par son acquéreur, Mme [X], devant le tribunal de grande instance de Caen par acte d'huissier de justice du 19 janvier 2011 ; que Mme [L], qui avait jusqu'au 19 janvier 2013 pour agir à l'encontre de son propre vendeur, a fait intervenir à la cause M. [W] suivant exploit du 20 mars 2012, de sorte que son action est recevable comme n'étant pas prescrite » ;

ALORS QUE, premièrement, la demande en réduction de prix fondée sur l'action estimatoire n'ayant été formée que le 4 janvier 2018, dans le cadre des conclusions déposées par Madame [L] devant la Cour d'appel de CAEN désignée comme juridiction de renvoi, cette demande devait être déclarée irrecevable comme prescrite, dès lors que Madame [L] a eu connaissance du vice à la date du 25 août 2010, le délai de deux ans qui lui était ouvert à compter de cette date étant largement expiré ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 1648 du Code civil ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, une assignation n'a d'effet interruptif qu'à l'égard de l'action qu'elle vise ; qu'ainsi l'effet interruptif attaché à l'assignation du mars 2012, en tant qu'elle tendait à obtenir la garantie de Monsieur [W] à l'égard des condamnations susceptibles d'être prononcées au profit de Madame [X], ne pouvait interrompre le délai de prescription s'agissant de l'action estimatoire ouverte à Madame [L], dès le 25 août 2010, à l'encontre de Monsieur [W], son vendeur ; qu'à cet égard encore, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 1648 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-10111
Date de la décision : 18/01/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 06 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 jan. 2023, pourvoi n°19-10111, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Duval-Arnould (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:19.10111
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