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12/01/2023 | FRANCE | N°20-22377

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 janvier 2023, 20-22377


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 janvier 2023

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 42 F-D

Pourvoi n° M 20-22.377

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JANVIER 2023

La société MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est

[Adresse 3], a formé le pourvoi n° M 20-22.377 contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2020 par la cour d'appel de Reims (chambre civile - 1re section...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 janvier 2023

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 42 F-D

Pourvoi n° M 20-22.377

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JANVIER 2023

La société MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° M 20-22.377 contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2020 par la cour d'appel de Reims (chambre civile - 1re section), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Lorraine énergie, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à la société Bar levage Pibarot, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

La société Lorraine énergie a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société MAAF assurances, de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de la société Lorraine énergie, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Bar levage Pibarot et de la société Mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué ( Reims, 15 septembre 2020), lors de travaux réalisés par la société Lorraine énergie, assurée auprès de la société MAAF assurances, un incident est survenu, entraînant le renversement d'une grue, prise en location auprès de la société Bar levage Pibarot, qui a été endommagée. Estimant la société Lorraine énergie responsable du sinistre, la société Bar levage Pibarot et son assureur, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), l'ont fait assigner en indemnisation de leurs préjudices.

2. Par jugement du 23 mars 2007, un tribunal de commerce a déclaré opposable à la société Lorraine énergie l'ensemble des conditions générales et particulières du contrat de louage conclu avec la société Bar levage Pibarot, et, avant dire droit, a ordonné une mesure d'expertise en vue de statuer sur d'éventuelles responsabilités de cette dernière et prononcé un sursis à statuer.

3. Par arrêt du 16 mai 2012, devenu définitif, une cour d'appel a confirmé ce jugement, a dit que la faute de la société Bar levage Pibarot exonérait la société Lorraine énergie de la moitié des conséquences du sinistre et a renvoyé l'affaire et les parties devant le tribunal de commerce pour permettre aux parties de présenter leur demande d'indemnisation.

Examen des moyens

Sur le premier et le second moyens du pourvoi principal et sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société Lorraine énergie fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement du 12 avril 2018 rendu sous le numéro 201 6001 231 par le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne en ce qu'il a débouté les sociétés Lorraine énergie et MAAF assurances de leur demande de péremption et dit la demande recevable à ce titre, et d'avoir, en conséquence, débouté la société Lorraine énergie de sa demande visant à voir déclarer prescrites les demandes de la SMABTP et de la société Bar levage Pibarot, alors « que lorsqu'une décision mixte a été rendue, l'ensemble des dispositions définitives et des dispositions avant dire droit qui statuent sur les conséquences ou l'exécution des premières, forme un tout indivisible, de sorte que l'instance toute entière échappe à la péremption ; qu'en revanche, lorsqu'un appel est formé à l'encontre de ce jugement mixte, la péremption recommence à courir et peut être constatée en l'absence de diligence accomplie par les parties pour faire avancer l'instance ; qu'en l'espèce, si par jugement mixte du 23 mars 2007, le tribunal de commerce de Verdun avait dit que le contrat conclu entre les sociétés Lorraine énergie et Bar levage Pibarot était un contrat de louage de choses et déclaré opposable à l'exposante les conditions générales et particulières du contrat de louage puis ordonné une mesure d'expertise, la société Lorraine énergie a interjeté appel total de ce jugement ; qu'il en résulte qu'à compter de cet acte d'appel, le délai de péremption a recommencé à courir ; qu'en retenant pourtant que « la victime peut dès lors se prévaloir à juste titre de l'expiration de la période de péremption pour la suite de la procédure résultant du jugement du 23 mars 2007 pour s'opposer à la péremption d'instance soulevée par son adversaire au regard du délai écoulé entre l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 16 mai 2012 et la saisine du tribunal de commerce de Bar le Duc le 1er octobre 2015 », la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Ayant d'abord relevé que le jugement du 23 mars 2007 avait, d'une part, tranché la question de la qualification du contrat unissant les parties et reconnu le droit de la victime à se prévaloir de l'existence d'un contrat de location pour fonder sa demande en réparation contre son locataire pour les dommages subis pendant l'utilisation du matériel loué et, d'autre part, ordonné une expertise pour estimer l'éventuelle part de responsabilité du loueur dans la survenance du dommage avant de fixer les dommages et intérêts dus, demande qui a fait l'objet d'un sursis à statuer, puis retenu que ce jugement reconnaissant le fondement du droit à réparation de la victime et ordonnant une expertise en vue de la fixation d'un partage de responsabilité, avant de procéder à l'évaluation des dommages et intérêts, formait un tout indivisible avec la demande en condamnation du locataire en paiement de ces dommages et intérêts introduite le 13 juin 2003 et poursuivie le 1er octobre 2015, devant le tribunal de commerce de Bar le Duc, après les arrêts de la cour d'appel de Nancy, confirmant le chef de dispositif relatif à la qualification du contrat, et de la Cour de cassation, la cour d'appel en a exactement retenu, que la victime pouvait se prévaloir de l'expiration de la période de péremption pour la suite de la procédure résultant du jugement du 23 mars 2007 pour s'opposer à la péremption d'instance soulevée par son adversaire au regard du délai écoulé entre l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 16 mai 2012 et la saisine du tribunal de commerce de Bar le Duc le 1er octobre 2015.

7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société MAAF assurances aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Lorraine énergie, en ce qu'elle est dirigée contre la société Bar levage Pibarot et la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics ainsi que la demande formée par la société MAAF assurances et condamne cette dernière à payer à la société Bar levage Pibarot et à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics la somme globale de 3 000 euros et à la société Lorraine énergie la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour la société MAAF assurances.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La MAAF assurances reproche à l'arrêt attaqué, D'AVOIR dit que le sinistre objet de la procédure est inclus dans les garanties offertes par le contrat d'assurance souscrit par la SAS Lorraine énergie auprès de la MAAF, D'AVOIR condamné la MAAF, in solidum avec la société Lorraine énergie, à payer à la société Bar Levage Pibarot la somme de 77 511,66 euros en réparation de l'ensemble des conséquences dommageables résultant de l'accident du 18 juin 2002 pour les postes de préjudices non pris en charge par sa compagnie d'assurance, et D'AVOIR condamné la MAAF à supporter toute condamnation qui serait mise à la charge de la société Lorraine énergie au titre de l'action principale en réparation du préjudice au profit de la société Bar Levage Pibarot et de la SMABTP sous déduction de la franchise contractuelle et dans les limites des plafonds contractuels, au nombre desquelles la condamnation à verser à la SMABTP la somme de 164 096,44 euros avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 28 octobre 2002 et application des règles relatives à l'anatocisme ;

1°) ALORS QUE les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'en l'espèce, en retenant que la clause du contrat d'assurance figurant au point 6 de l'article 2, A), des « conventions spéciales n° 5 » du contrat d'assurance, relative à l'utilisation de véhicules terrestres à moteur pour les besoins du service, avait vocation à régir un sinistre survenu à l'occasion de l'utilisation d'une grue, dans sa fonction de levage et de manutention, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce, la « clause personnalisant le contrat », qui prévoyait la garantie de la responsabilité de l'assuré du fait des dommages résultant d'accidents occasionnés par l'usage d'un engin mécanique dont il est propriétaire, utilisateur ou gardien, en ce qu'elle se bornait à définir le risque couvert, ressortait du champ d'application de l'exclusion de garantie du point 7 de l'article 5 des « conventions spéciales n° 5 », relativement aux « dommages matériels et/ou immatériels occasionnés aux biens meubles, y compris les véhicules terrestres à moteur, aux biens immeubles, dont vous ou les personnes dont vous répondez sont soit propriétaires, soit locataires, soit emprunteurs » ; qu'en retenant néanmoins que la « clause personnalisant le contrat » ne pouvait être lue comme étant soumise à l'exclusion de garantie stipulée au point 7 de l'article 5 des « conventions spéciales n° 5 », la cour d'appel a dénaturé ces clauses du contrat d'assurance en violation de l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

La MAAF assurances reproche à l'arrêt attaqué, DE L'AVOIR déboutée de sa demande en remboursement des montants versés, formée à hauteur de la somme de 17 557,28 euros ;

ALORS QUE l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur ; qu'en l'espèce, la MAAF sollicitait, en raison de ce que la responsabilité de la société Bar Levage Pibarot avait été retenue pour moitié dans la survenance du sinistre par l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 16 mai 2012, la condamnation de cette société et de son assureur, la SMABTP, à lui régler la moitié de l'indemnité d'un montant de 35 557,28 euros par elle versée en exécution du contrat d'assurance souscrit par la société Lorraine énergie, au titre du dommage causé aux dépendances du domaine public par la chute de la grue ; qu'en énonçant, pour débouter la MAAF de cette demande, que sa garantie était due et pour des montants supérieurs, la cour d'appel a statué par des motifs impropres en violation de l'article L. 121-12 du code des assurances.

Moyen produit au POURVOI INCIDENT par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat aux Conseils pour la société Lorraine énergie.

La société Lorraine Energie fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du 12 avril 2018 rendu sous le numéro 201 6001 231 par le tribunal de commerce de Châlons en Champagne en ce qu'il a débouté la société Lorraine Energie et Maaf Assurances de leur demande de péremption et dit la demande recevable à ce titre, et d'avoir, en conséquence, débouté la société Lorraine Energie de sa demande visant à voir déclarer prescrites les demandes de la SMABTP et de la Sarl Bar Levage Pibarot ;

1/ ALORS QUE lorsqu'une décision mixte a été rendue, l'ensemble des dispositions définitives et des dispositions avant dire droit qui statuent sur les conséquences ou l'exécution des premières, forme un tout indivisible, de sorte que l'instance toute entière échappe à la péremption ; qu'en revanche, lorsqu'un appel est formé à l'encontre de ce jugement mixte, la péremption recommence à courir et peut être constatée en l'absence de diligence accomplie par les parties pour faire avancer l'instance ; qu'en l'espèce, si par jugement mixte du 23 mars 2007, le tribunal de commerce de Verdun avait dit que le contrat conclu entre les sociétés Lorraine Energie et Bar Levage Pibarot était un contrat de louage de choses et déclaré opposable à l'exposante les conditions générales et particulières du contrat de louage puis ordonné une mesure d'expertise, la société Lorraine Energie a interjeté appel total de ce jugement ; qu'il en résulte qu'à compter de cet acte d'appel, le délai de péremption a recommencé à courir ; qu'en retenant pourtant que « la victime peut dès lors se prévaloir à juste titre de l'expiration de la période de péremption pour la suite de la procédure résultant du jugement du 23 mars 2007 pour s'opposer à la péremption d'instance soulevée par son adversaire au regard du délai écoulé entre l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 16 mai 2012 et la saisine du tribunal de commerce de Bar le Duc le 1er octobre 2015 » (arrêt, p. 8, alinéa 5), la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QUE lorsqu'une cour d'appel, statuant sur l'appel d'un jugement mixte, confirme le jugement, retient le principe de la responsabilité des parties, et renvoie les parties devant le juge de première instance pour qu'il soit statué sur leurs demandes indemnitaires, c'est la même instance qui, après l'arrêt d'appel, se poursuit devant le premier juge ; qu'en conséquence, le délai de péremption commence à courir dès l'arrêt d'appel ; que l'éventuel pourvoi en cassation formé contre cet arrêt, qui donne naissance à une instance distincte, ne saurait interrompre ce délai de péremption ; que le premier juge a pourtant retenu que l'instance introduite devant la cour d'appel de Nancy n'aurait été menée à son terme que par l'arrêt de la Cour de cassation du 8 avril 2014 ayant rejeté le pourvoi en cassation ; qu'en statuant ainsi, à supposer adopté ce motif, la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-22377
Date de la décision : 12/01/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 15 septembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 jan. 2023, pourvoi n°20-22377


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Delamarre et Jehannin, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:20.22377
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