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23/11/2022 | FRANCE | N°21-19207

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 novembre 2022, 21-19207


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 novembre 2022

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 818 F-D

Pourvoi n° M 21-19.207

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022

1°/ Mme [L] [C],

2°/ M. [H] [G],
r>domiciliés tous deux [Adresse 5],

ont formé le pourvoi n° M 21-19.207 contre l'arrêt rendu le 31 mai 2021 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile, 1re...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 novembre 2022

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 818 F-D

Pourvoi n° M 21-19.207

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022

1°/ Mme [L] [C],

2°/ M. [H] [G],

domiciliés tous deux [Adresse 5],

ont formé le pourvoi n° M 21-19.207 contre l'arrêt rendu le 31 mai 2021 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile, 1re chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [E] [F],

2°/ à Mme [D] [Z], épouse [F],

domiciliés tous deux [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de Mme [C] et de M. [G], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. et Mme [F], après débats en l'audience publique du 11 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 31 mai 2021), M. et Mme [F] sont propriétaires d'une parcelle cadastrée AB n° [Cadastre 2], qui bénéficie d'une servitude conventionnelle de passage sur la parcelle voisine, cadastrée AB n° [Cadastre 3] , qui appartient à M. [G] et Mme [C] (les consorts [G]-[C]).

2. Reprochant aux seconds d'y faire obstacle, les premiers les ont assignés en enlèvement des objets empêchant le passage.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le deuxième moyen, pris en ses première, quatrième, cinquième et sixième branches, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

4. Les consorts [G]-[C] font grief à l'arrêt de dire que la servitude porte sur la totalité de l'allée cadastrée AB n°[Cadastre 3] et de les condamner à retirer tous les objets mobiliers obstruant ladite servitude, alors :

« 2°/ que la cour d'appel a elle-même relevé que les titres instituaient une servitude conventionnelle de passage sur une allée et une cour « se trouvant à l'est » du fonds servant et que par acte du 24 septembre 1982, les propriétaires du fonds dominant ont renoncé à la servitude de passage sur
la cour ; qu'en décidant que la renonciation à la servitude de passage du 24 septembre 1982 aurait porté sur l'emplacement d'un atelier enclavé, « au nord » du fonds servant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 691 du code civil ;

3°/ que la cour d'appel a elle-même relevé que, par des attestations concordantes, les anciens propriétaires du fonds dominant et du fonds servant s'accordaient à reconnaître que la servitude conventionnelle de passage ne portait que sur une cour située à l'est du fonds servant et l'allée passant au sein de cette cour ; qu'en décidant au contraire que la servitude conventionnelle aurait porté sur une allée se trouvant à l'est et l'emplacement de l'atelier se trouvant au nord du fonds servant, de sorte que la renonciation du 24 septembre 1982 n'aurait pas porté atteinte à l'assiette de servitude la plus ample revendiquée par les époux [F], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 691 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Ayant relevé que les actes constitutifs de la servitude ne comportaient aucune précision sur l'assiette du passage, en particulier sur sa largeur, faisant ainsi ressortir qu'il lui revenait de rechercher quelle avait été la commune intention des parties sur ce point, la cour d'appel, sans méconnaître les dispositions de l'article 691 du code civil, a souverainement retenu que le passage n'était pas limité à 95 centimètres de largeur, au terme d'une analyse de la configuration des lieux, des indications du cadastre, de la description du passage dans l'acte constitutif, mais également des termes de la renonciation intervenue en 1982 par les auteurs de M. et Mme [F], dont elle a déduit qu'ils ne révélaient aucune limitation de l'assiette de la servitude conservée.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

7. Les consorts [G]-[C] font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. et Mme [F] à procéder au retrait, à leur frais, des jardinières et des plaques de plexiglas fixées sur le mur leur appartenant, alors « que la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens dans ses conclusions d'appel, demande la confirmation du jugement, est réputée s'en approprier les motifs ; que la cour d'appel a relevé que M. [G] et Mme [C] sollicitaient la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné les époux [F] à procéder au retrait, à leur frais, des jardinières et des plaques de plexiglas fixées sur leur mur, de sorte qu'ils étaient réputés s'approprier les motifs du jugement sur ce point ; qu'en décidant cependant d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'ils ne feraient valoir aucun moyen devant la cour d'appel à l'appui de leur demande à l'encontre des époux [F], la cour d'appel a violé l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 954 du code de procédure civile :

8. Il résulte de ce texte que l'obligation faite à la partie qui conclut à l'infirmation du jugement d'énoncer expressément dans ses dernières écritures les moyens qu'elle invoque, ne s'étend pas aux écritures de cette même partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, sollicite la confirmation partielle du jugement.

9. Pour infirmer le jugement en ce qu'il avait condamné M. et Mme [F] à retirer les jardinières et plaques de plexiglas fixées sur leur mur, l'arrêt énonce que les consorts [G]-[C], s'ils ont demandé la confirmation du jugement de ce chef, n'ont ni expliqué ni justifié cette demande dans le corps de leurs écritures.

10. En statuant ainsi, alors que les intimés, qui n'avaient présenté aucun moyen nouveau sur ce chef de dispositif, étaient présumés s'approprier les motifs du jugement dont ils demandaient la confirmation, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en ce qu'il condamne M. et Mme [F] à retirer, à leurs frais, les jardinières et plaques de plexiglas fixées sur le mur de M. [G] et Mme [C], l'arrêt rendu le 31 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Agen, autrement composée.

Condamne M. et Mme [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour Mme [C] et M. [G]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. [H] [G] et Mme [L] [C] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, d'AVOIR « dit que la servitude conventionnelle de passage porte sur la totalité de l'allée cadastrée AB [Cadastre 3] (anciennement [Cadastre 1]) » (en fait, l'allée sur la parcelle cadastrée AB [Cadastre 3] ) et de les AVOIR en conséquence condamnés à retirer tous les objets mobiliers obstruant ladite servitude, sous astreinte,

ALORS QUE lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas ; qu'en s'estimant régulièrement saisie par l'effet dévolutif d'une déclaration d'appel « indiquant que l'appel porte sur toutes les dispositions du jugement » (arrêt, p. 2 § 7), la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

M. [H] [G] et Mme [L] [C] font grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR « dit que la servitude conventionnelle de passage porte sur la totalité de l'allée cadastrée AB [Cadastre 3] (anciennement [Cadastre 1]) » (en fait, l'allée sur la parcelle cadastrée AB [Cadastre 3] ) et de les AVOIR en conséquence condamnés à retirer tous les objets mobiliers obstruant ladite servitude, sous astreinte,

1/ ALORS QUE la preuve de l'assiette d'une servitude conventionnelle de passage incombe au propriétaire du fonds dominant ; que la cour d'appel a relevé que les titres ayant institué une servitude conventionnelle de passage au profit du fonds des époux [F] étaient totalement muets sur son assiette (arrêt, p. 3 § 6) ; qu'en décidant d'accorder aux époux [F] l'assiette de servitude la plus ample, en l'état de l'insuffisante démonstration, par les propriétaires du fonds servant, d'une assiette moindre que celle revendiquée (arrêt, p. 4 § 2 à 4), la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé les articles 691 et 1315 devenu 1353 du code civil ;

2/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la cour d'appel a ellemême relevé que les titres instituaient une servitude conventionnelle de passage sur une allée et une cour « se trouvant à l'est » du fond servant (arrêt, p. 3 § 4) et que par acte du 24 septembre 1982, les propriétaires du fonds dominant ont renoncé à la servitude de passage sur la cour (arrêt, p. 3 § 5) ; qu'en décidant que la renonciation à servitude de passage du 24 septembre 1982 aurait porté sur l'emplacement d'un atelier enclavé, « au nord » du fonds servant (arrêt, p. 3 § 9), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 691 du code civil ;

3/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la cour d'appel a elle-même relevé que, par des attestations concordantes, les anciens propriétaires du fonds dominant et du fonds servant s'accordaient à reconnaitre que la servitude conventionnelle de passage ne portait que sur une cour située à l'est du fonds servant et l'allée passant au sein de cette cour (arrêt, p. 4 § 3 et 4) ;
qu'en décidant au contraire que la servitude conventionnelle aurait porté sur une allée se trouvant à l'est et l'emplacement de l'atelier se trouvant au nord du fonds servant (arrêt, p. 3 § 9), de sorte que la renonciation du 24 septembre 1982 n'aurait pas porté atteinte à l'assiette de servitude la plus ample revendiquée par les époux [F], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 691 du code civil ;

4/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la cour d'appel pour accorder l'assiette de servitude conventionnelle la plus ample revendiquée par les époux [F], a estimé que l'extrait cadastral annoté par M. [F] faisant mention manuscrite de sa main d'une allée à l'est et d'une cour au nord (arrêt, p. 3 § 9), correspondrait aux deux servitudes de passage stipulées dans l'acte de 1965 (ibidem, § 10) ; qu'en statuant de la sorte, lorsqu'il ressort des mentions claires et précises de l'extrait cadastral annoté que la cour identifiée par M. [F], totalement enclavée, ne disposait d'aucun accès à une quelconque voie privée ou publique, et ne pouvait donc manifestement pas constituer l'assiette d'une quelconque servitude de passage, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'extrait cadastral annoté par M. [F] et a violé l'article 1192 du code civil ;

5/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'assiette de la servitude conventionnelle de passage ne peut s'établir que par titre ; qu'en décidant d'accorder aux époux [F] l'assiette de servitude la plus ample, en l'état de la seule affirmation selon laquelle le droit de passage sur une largeur de 95 centimètres les priveraient de l'accès à leur sous-sol et à leur jardin (arrêt, p. 4 § 1), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 691 du code civil ;

6/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en décidant d'accorder aux époux [F] l'assiette de servitude la plus ample, sans s'expliquer sur la contrariété d'une telle assiette de servitude avec le titre de propriété de M. [G] et Mme [C] faisant mention d'une cour extérieure (arrêt, p. 4 § 1), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 691 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

M. [H] [G] et Mme [L] [C] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les époux [F] à procéder au retrait, à leur frais, des jardinières et des plaques de plexiglas fixées sur le mur de M. [G] et Mme [C], sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard,

1/ ALORS QU'aucune des parties ne sollicitait l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné les époux [F] à procéder au retrait, à leur frais, des jardinières et des plaques de plexiglas fixées sur le mur de M. [G] et Mme [C], sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard ; qu'en décidant cependant d'infirmer le jugement entrepris au titre d'un chef de dispositif qui n'était contesté par aucune des parties, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens dans ses conclusions d'appel, demande la confirmation du jugement, est réputée s'en approprier les motifs ; que la cour d'appel a relevé que M. [G] et Mme [C] sollicitaient la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné les époux [F] à procéder au retrait, à leur frais, des jardinières et des plaques de plexiglas fixées sur leur mur (arrêt, p. 4 § 11) de sorte qu'ils étaient réputés s'approprier les motifs du jugement sur ce point ; qu'en décidant cependant d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'ils ne feraient valoir aucun moyen devant la cour d'appel à l'appui de leur demande à l'encontre des époux [F] (arrêt, p. 4 § 12), la cour d'appel a violé l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 21-19207
Date de la décision : 23/11/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 31 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 nov. 2022, pourvoi n°21-19207


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 06/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.19207
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