LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 16 novembre 2022
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 674 FS-D
Pourvoi n° C 21-19.728
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 NOVEMBRE 2022
1°/ la société Canal + Antilles, société par actions simplifiée, dont le siège est ancien [Adresse 3],
2°/ la société Canal + international, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ la société Canal + Réunion, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5],
ont formé le pourvoi n° C 21-19.728 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige les opposant à la société Orange, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La société Orange a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.
Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de Me Soltner, avocat des sociétés Canal + Antilles, Canal + international et Canal + Réunion, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Orange, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, Mmes Champalaune, Michel-Amsellem, MM. Bedouet, Alt, conseillers, Mmes Comte, Bellino, M. Regis, conseillers référendaires, M. Douvreleur, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mars 2021), la société Orange est un opérateur de télécommunications présent sur le marché de l'internet haut débit en métropole et dans les régions et départements d'Outre-mer.
2. La société Canal + Overseas, devenue Canal + international, filiale du groupe Canal +, a pour principale activité la conception et la distribution dans les départements et régions d'Outre-mer d'offres de télévision payante essentiellement diffusées par satellite. Par décision n° 14-DCC-15 du 10 février 2014 de l'Autorité de la concurrence (l'Autorité), elle a été autorisée, sous réserve d'engagements, à acquérir le capital de la société Mediaserv, devenue au mois de février 2016 Canal + Telecom, fournisseur d'accès à l'internet, actif dans ces territoires ultra-marins.
3. Jusqu'au 23 mai 2014, la société Canal + Overseas a commercialisé à La Réunion, d'une part, et en Martinique, Guadeloupe et Guyane, d'autre part, une nouvelle offre intitulée « CanalBox », proposant au consommateur une offre « double play », dite « offre 2P », soit « Canal + Internet Plus Téléphone », alors proposée par la société Mediaserv, ainsi que trois formules « triple play », dite « offre 3P », dénommées « CanalBox Librement », « CanalBox Essentiel » et « CanalBox Premium » regroupant l'accès à internet, au téléphone et aux chaînes de télévision « Canal + » et/ou « Canalsat. »
4. Soutenant que la société Canal + Overseas avait, d'une part, par l'intermédiaire de ses filiales, massivement démarché ses propres abonnés pour leur offrir des services de télévision payante tout en s'appuyant sur la notoriété des marques « Canal + », d'autre part, que les sociétés Canal + international, Canal + Antilles et Canal + Réunion (les sociétés Canal +) avaient, lors du lancement de l'offre « Canal Box Internet Plus Téléphone » lié la souscription de cette offre à celle, préalable et/ou parallèle, des offres Canal + et/ou Canalsat en s'appuyant sur la notoriété des marques « Canal + », la société Orange a assigné ces trois sociétés en réparation de son préjudice résultant de ces pratiques.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal, ci-après annexés
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
6. Les sociétés Canal + font grief à l'arrêt de les condamner chacune à payer à la société Orange une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts, alors « que la pratique d'une vente liée requiert, pour être constitutive d'un abus de position dominante, de démontrer qu'elle a provoqué ou était susceptible de provoquer un effet d'éviction concurrentielle suffisamment sensible ; qu'en l'espèce, pour condamner le Groupe Canal + en raison d'agissements prétendument anticoncurrentiels, la cour d'appel se contente d'énoncer, que « COS a indiscutablement utilisé sa position dominante sur le marché de la télévision payante étroitement lié au marché de l'internet haut débit, pour tenter de s'approprier des parts sur ce marché connexe afin d'y obtenir un avantage à moindre coût et sans rapport direct avec ses mérites » ; que la cour d'appel constate dans le même temps qu'Orange n'établit pas que les agissements qu'elle impute au Groupe Canal + auraient eu pour elle une incidence économique faute de démontrer l'existence d'une perte de chiffre d'affaires en résultant, et qu'Orange n'établit pas davantage que les pratiques reprochées auraient été à l'origine de résiliations d'abonnement émanant de ses clients, pas plus qu'elle ne démontre que ces pratiques l'auraient contrainte à une modification de son modèle de distribution de ses offres ; qu'en l'état de ces constatations, qui ne permettent pas de déduire, ni que les agissements fautifs reprochés au Groupe Canal +, consistant seulement dans le fait d'avoir « utilisé sa position dominante pour s'approprier des parts sur un marché connexe », auraient eu, dans les circonstances de l'espèce, un effet d'éviction concurrentiel, fût-il potentiel, ni que cette affectation du marché aurait eu un caractère suffisamment sensible, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'abus de position dominante auquel les exposantes se seraient livrées, a privé sa décision de base légale au regard des articles 102 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) et L. 420-2 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
7. L'arrêt relève que l'opération d'acquisition du capital de la société Mediaserv par la société Canal + Overseas a été autorisée par la décision n° 14-DCC-15 du 10 février 2014 de l'Autorité, sous réserve d'engagements décrits dans celle-ci. Elle retient, par des motifs vainement critiqués par le premier moyen, que, contrairement à ces derniers, cette société a, jusqu'au 23 mai 2014, date à laquelle elle a adressé, à la suite des instructions du mandataire chargé de leur respect, une note interne à ses équipes rappelant « l'interdiction de créer une obligation d'achat quelconque entre les offres TV par satellite Canalsat et les offres CanalBox internet téléphone », méconnu ces engagements.
8. En cet état, et dès lors que les engagements étant destinés à protéger le marché, ils créent, dans le chef des entreprises qui les ont pris, des obligations en faveur des opérateurs intervenant sur le marché qu'ils concernent, de sorte que leur méconnaissance est, en soi, constitutive d'une faute civile, la cour d'appel, qui en a déduit que la responsabilité de la société Canal + international était engagée à l'égard de la société Orange opérant sur le marché concerné par les engagements, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
Et sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
9. Les sociétés Canal + font grief à l'arrêt de les condamner chacune à payer une somme de 50 000 euros à la société Orange au titre de la réparation du préjudice moral, alors :
« 2°) que la responsabilité civile délictuelle suppose que soit rapportée la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice ; que le droit de la concurrence, destiné à réguler les relations entre opérateurs économiques, exclut la réparation de préjudices « de principe », le concurrent qui se prétend lésé devant établir la réalité, la consistance, et le quantum du dommage qu'il allègue avoir subi ; qu'en l'espèce, la société Orange se contentait de solliciter dans le dispositif de ses conclusions, la réparation d'un préjudice « fût-il seulement moral » préjudice auquel ses motifs ne consacrent aucun développement ; qu'en jugeant pourtant qu'Orange avait, en raison du « trouble économique imputable à la pratique des ventes liées » subi un préjudice « essentiellement moral » et en condamnant les exposantes à payer à Orange la somme de 50 000 euros chacune, sans s'expliquer sur la réalité et le quantum de ce préjudice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 ancien devenu 1240 et 1315 ancien devenu 1353 du code civil.
3°) qu'en qualifiant d'« essentiellement moral » le préjudice qu'elle indemnise, sans donner aucun motif permettant de connaître la consistance et la mesure d'un tel préjudice, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation à même d'exercer son contrôle sur la véritable nature du dommage qu'elle a condamné les exposantes à réparer, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 1382 ancien devenu 1240 et 1315 ancien devenu 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
10. Le non-respect d'engagements auxquels l'Autorité a subordonné une opération de concentration, aux fins de garantir un fonctionnement concurrentiel du marché concerné par une telle opération, crée nécessairement un trouble commercial aux entreprises qui opèrent sur le marché en cause, constitutif d'un préjudice, fût-il seulement moral.
11. Ayant retenu, par des motifs vainement critiqués par le deuxième moyen, que la société Canal + Overseas avait méconnu les engagements acceptés par la décision n° 14-DCC-15 du 10 février 2014 de l'Autorité, la cour d'appel, qui en a déduit qu'il en résultait un préjudice moral pour la société Orange, opérant sur le marché en cause, dont elle a souverainement apprécié l'étendue par l'évaluation qu'elle en a faite, a légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident qui est éventuel, la Cour :
REJETTE le pourvoi principal ;
Condamne les sociétés Canal + Antilles, Canal + international et Canal + Réunion aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Canal + Antilles, Canal + international et Canal + Réunion et les condamne in solidum à payer à la société Orange la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par Me Soltner, avocat aux Conseils, pour les sociétés Canal + Antilles, Canal + international et Canal + Réunion.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR réformé le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 18 juin 2018 et statuant à nouveau, D'AVOIR jugé que, les sociétés Canal + Antilles, Canal + International et Canal + Réunion se sont rendues coupables d'abus de position dominante à l'égard de la société Orange et d'AVOIR condamné celles-ci à payer une somme de 50.000 euros à la société Orange.
AUX MOTIFS QUE « ORANGE rappelle que l'ADLC a fait de cette obligation un engagement à la charge de COS que celle-ci a violé ainsi que les deux constats d'huissier du 30 avril et du 15 mai 2014 en font foi ; que les constats produits par COS postérieurement au Référé d'heure à heure engagé par ORANGE sont peu probants alors que la non-conformité des pratiques commerciales de COS est avérée par le rapport n° 1 établi par le mandataire nommé par l'ADLC ; que les constats font la preuve de la présentation volontairement trompeuse des sites internet en charge de la commercialisation des offres CanalBox et CanalBox Internet Téléphone car aucune de ces présentations ne permet de souscrire à la seule offre MEDIASERV et que les offres entretiennent volontairement la confusion l'offre CanalBox étant systématiquement couplée à l'une des offres de télévision payante ; que les supports ont été présentés de manière volontairement trompeuse par COS pour faire la promotion des offres ce qui est reconnu par le mandataire nommé par l'ADLC ; que le tribunal s'est mépris sur la portée des constats et enfin que le cumul des pratiques litigieuses a pour effet d'aggraver l'effet d'éviction en résultant au préjudice d'ORANGE. Les engagements pris par COS au chapitre IV de la décision de l'ADLC ont été définis à l'issue de plusieurs tests sur le marché pour répondre aux préoccupations issues de l'analyse concurrentielle relativement à l'auto distribution des offres de COS et aux offres groupées de COS et MEDIASERV, au regard de la capacité du Groupe CANAL PLUS à rémunérer une exclusivité de distribution non seulement sur la plate-forme satellitaire mais également sur les réseaux ADSL fibre et satellite des fournisseurs d'accès à internet où Canalsat s'y autodistribue. La présentation détaillée des engagements proposés au point 269 de la Décision de l'ADLC observe que dans la mesure où les fournisseurs d'accès internet et les autres distributeurs concurrents du groupe CANAL PLUS ne peuvent proposer une exclusivité de distribution que sur leur propre plate-forme et qu'ils ne pourront le faire dans des conditions de concurrence normales, que si le groupe CANAL PLUS révèle la valeur associée à la distribution de chaîne au sein de l'offre Canalsat sur chaque plate-forme propriétaire. La décision a enjoint en conséquence à COS de ne pas coupler la distribution sur sa propre plate-forme satellite et sur les plateformes propriétaires d'opérateurs tiers présents dans les Départements et Régions d'Outre-Mer (DROM) pour les contrats de distribution avec les éditeurs conclus ou reconduits postérieurement à la date de décision. Le point 276 précise également que la partie notifiante s'engage à ne pas accorder à MEDIASERV d'exclusivité pour la distribution des chaînes qu'elle édite et de mettre à disposition les chaines qu'elle édite et qui seraient distribuées par MEDIASERV à tout FAI présent dans les DROM dans des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires, les concurrents de MEDIASERV étant ainsi assurés de pouvoir répliquer l'offre de MEDIASERV si celle-ci devait être enrichie à l'issue de l'opération par l'ajout de chaines éditées par GCP.ORANGE produit deux procès-verbaux de constat établis le 30 avril et le 15 mai 2014 à la requête d'ORANGE REUNION retranscrivant les échanges téléphoniques entre deux préposés de la société ORANGE et un télévendeur de la société CANAL PLUS REUNION, dont l'accord pour être enregistré en présence d'un huissier de justice a été préalablement recueilli, au sujet de la souscription de l'offre intitulée "CanalBox Internet et Téléphone" présentée sur le site web de CANAL PLUS. Ces échanges établissent que la société CANAL PLUS REUNION a proposé à cette époque au mépris des engagements pris une offre d'abonnement groupé internet téléphone et télévision satellitaire et qu'il n'était pas possible de souscrire un abonnement internet et téléphone sans télévision. ORANGE produit également un mail adressé le 28 mai 2014 par le mandataire désigné par l'ADLC à plusieurs destinataires dont COS ne conteste pas qu'ils ressortissent de son personnel, au sujet du respect des engagements pris à l'occasion d'un déplacement à La Réunion qui s'exprime en ses termes : "Au cours de notre déplacement à La Réunion du 19 au 22 mai dernier nous avons pu constater que conformément aux engagements : - les offres 2P et télévision payante de GCP sont proposées à des tarifs distincts, sans remise tarifaire de couplage. Nous notons en particulier que Ie tarif des abonnements des offres de télévision payantes dans le cadre d'une offre "associée" est strictement identique au tarif applicable pour des offres TV seules ; - une offre 3P souscrite par un prospect fait bien l'objet de deux contrats distincts ; - les systèmes d'informations de COS ont été paramétrés afin d'identifier les abonnés 2P et permettre l'application ultérieure éventuelle de l‘Engagement 8 (résiliation anticipée des contrats télévision payante) : - Les courriers de prospection relatifs à l'Offre CanalBox ont été adressés aux abonnés directs de Canal +/Canalsat, à l'exclusion des abonnés via les FAI..». En revanche, nous avons également constaté les points suivants : 1) Un distributeur local nous a communiqué l'enregistrement récent d'un appel au centre d'appels ([XXXXXXXX01]) au cours duquel le télévendeur a indiqué que l'offre CanalBox n'était disponible uniquement qu‘en cas de souscription à une offre TV par satellite. Cette pratique commerciale est, comme vous le savez, contraire aux Engagements ; 2) L'offre 2P (téléphone + internet) n'est pas commercialisée par Mediaserv : ni dans le réseau de distribution (espaces de vente dédiés et appels entrants au numéro de Mediaserv) ni sur le site internet. Par ailleurs, dans les boutiques Canal+, nous avons constaté l'absence de mise en avant de l'offre CanalBox sans Ia composante télévision : 3) Enfin, la promotion de la marque CanalBox à la fois pour une offre 2P et pour une offre 3P incluant la télévision par satellite ("Canal Box librement" "CanalBox Premium" etc.) est susceptible, par son ambiguïté, de suggérer des obligations d'achat entre les offres TV et les offres Mediaserv (Cf. campagnes promotionnelles en cours (affichage, presse, TV et radio), dépliants et autres supports de communication). En conséquence, nous sommes convenus que vous prendrez rapidement les mesures suivantes : i. Rappeler immédiatement à l'ensemble du réseau de distribution (y compris les centres d'appels) l'indépendance des deux offres (ZP d'une part et TV par satellite d'autre part). En particulier : - Aucune obligation d'achat ne doit être suggérée ; - Aucune remise ne doit être accordée en cas de souscription à l''ensemble des offres internet +téléphone + télévision (offre de pack cinéma en option par exemple) ; - Le cas échéant, des sanctions devront être prises a l'encontre du personnel qui ne respecterait pas ces consignes ; ii. Commercialiser l'offre 2P dans le réseau de distribution de Mediaserv et sur le site internet de Mediaserv, à un tarif équivalent en ce compris les opérations promotionnelles (actuellement : option mobile offerte pendant 6 mois) ; iii. Mettre en avant l'offre CanalBox 2P dans les réseaux de distribution de GCP au même tarif, y compris offres promotionnelles, notamment : - dans les boutiques Canal+ (PLV dédiée, corners spécifiques, promotions de l'offre 2P seule sur les flyers, etc.) ; - sur les sites internet (Canal+ Réunion et Canalsat Caraïbes) : iv. Revoir vos plans de communication en conséquence du point 3) ci-dessus. S'agissant du réseau de distribution (cf. i.), nous notons que vous avez déjà transmis une note de service le 23 mai dernier à Mediacall (centre d'appels CanalBox / Mediaserv) et aux Centres de Relation Clients Caraïbes et Réunion. Nous comprenons que vous relayerez également cette note à vos prestataires externes. Nous notons également que la décision a été prise de commercialiser l'offre 2P chez Mediaserv. Enfin, s'agissant des deux derniers points (cf. iii et iv), COS s'est engagé a : - mettre en avant l'offre CanalBox 2P dans les Canal+ Store (cf. relevé de décisions du 22 mai) et modifier les sites Internet des filiales de COS dans ces territoires ; - annuler les campagnes de publicité en cours et les remplacer par des campagnes ciblées sur l'offre 2P. Nous comprenons que ces campagnes devraient avoir lieu prochainement dans les Caraïbes (4x3, presse, radio, web) et à la Réunion (presse, radio). Vous voudrez bien nous rendre compte régulièrement de la mise en place de ces actions correctives. «Le rapport n° 8 établit par le mandataire de l'ADLC le 22 avril 2016 dont COS se prévaut et qui a fondé la décision des premiers juges de ne pas retenir le grief de ventes liées, ne se réfère ni aux mêmes constats d'huissiers ni au mail précité et lorsque le mandataire fait état, dans le cadre de ce rapport, des remontées d'ORANGE se fondant sur des mails adressés par COS aux abonnés internet d'ORANGE il apparaît qu'il s'agit de deux abonnés satellites de COS en direct et non en auto distribution qui ne relèvent donc pas des engagements pris au titre de l'interdiction des ventes liées. Il est par conséquent établi que contrairement aux engagements pris, jusqu'au 23 mai 2014, date à laquelle COS a adressé, à la suite des instructions du mandataire une note interne à ses équipes rappelant "l'interdiction de créer une obligation d'achat quelconque entre les offres TV par satellite Canalsat et les offres Canalbox internet téléphone", COS a indiscutablement utilisé sa position dominante sur le marché de la télévision payante étroitement lié au marché de l'internet haut débit, pour tenter de s'approprier des parts sur ce marché connexe afin d'y obtenir un avantage à moindre coût et sans rapport direct avec ses mérites ;
1°) ALORS QUE, le juge ne peut dénaturer les éléments de preuve qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce le rapport n° 8 établi par le mandataire de l'Autorité de la Concurrence le 22 avril 2016 mentionnait, en son point 2 (page 10) que : « On peut noter que Orange a utilisé les cas remontés dans le cadre d'un litige qui l'oppose à CANAL+ INTERNATIONAL devant le tribunal de commerce de Paris (assignation du 18/03/15), relatifs à de (prétendues) pratiques anticoncurrentielles de CANAL+ INTERNATIONAL liées à l'utilisation abusive de sa base d'abonnés et à la vente couplée d'abonnements TV et Internet. La majeure partie des faits mentionnés dans la procédure remontent à la reprise de Mediaserv par CANAL + INTERNATIONAL en 2014 ; ces éléments avaient été identifiés par le Mandataire à l'époque, et mentionnés dans le rapport I ; les comportements avaient été rectifiés et aucune anomalie n'a été relevée depuis. » ; qu'il résultait de ces énonciations d'une part qu'aux yeux du Mandataire, aucun grief de vente liée ne pouvait plus, à la date où ce rapport avait été établi, utilement être reproché au Groupe Canal +, et d'autre part, que cette conclusion était déduite d'instructions données par le Groupe Canal + aux deux revendeurs qui étaient ceux-là mêmes que les constats d'huissier des 30 avril et 15 mai 2014 avaient identifiés comme ayant eu ponctuellement un comportement laissant à penser que des ventes liées étaient pratiquées ;
qu'en énonçant, pour reprocher aux premiers juges d'avoir écarté tout grief de vente liée, que le rapport n° 8 du Mandataire ne se réfère pas aux « mêmes constats d'huissiers » que ceux qu'invoquait Orange, ni à ceux que le Mandataire avait déjà évoqués dans son premier rapport, la Cour d'appel a dénaturé les deux rapports du Mandataire de l'Autorité de la Concurrence et violé les articles 1134 du Code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce, 4 du Code de procédure civile, ensemble le principe selon lequel le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis.
2°) ALORS QUE, le juge ne peut dénaturer les éléments de preuve qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce le rapport n° 8 établi par le mandataire de l'Autorité de la Concurrence le 22 avril 2016 mentionnait, en son point 2 (page 10) que : « On peut noter que Orange a utilisé les cas remontés dans le cadre d'un litige qui l'oppose à CANAL+ INTERNATIONAL devant le tribunal de commerce de Paris (assignation du 18/03/15), relatifs à de (prétendues) pratiques anticoncurrentielles de CANAL+ INTERNATIONAL liées à l'utilisation abusive de sa base d'abonnés et à la vente couplée d'abonnements TV et Internet. La majeure partie des faits mentionnés dans la procédure remontent à la reprise de Mediaserv par CANAL + INTERNATIONAL en 2014 ; ces éléments avaient été identifiés par le Mandataire à l'époque, et mentionnés dans le rapport I ; les comportements avaient été rectifiés et aucune anomalie n'a été relevée depuis. » ; qu'il résultait de ces énonciations que « les cas remontés » étaient, selon le mandataire, ceux qu'avait invoqué Orange devant le Tribunal de commerce de Paris dans son assignation du 18 mars 2015, éléments dont le Mandataire souligne qu'ils avaient été « déjà identifiés » dans son premier rapport en juillet 2014 ; qu'il était matériellement impossible que le Mandataire mentionne dans son premier rapport datant de juillet 2014, des emails qui ne lui seront communiqués qu'en janvier 2016 ; qu'en énonçant pourtant, que le mandataire dans son rapport n° 8, en faisant référence aux « cas remontés », qu'il avait déjà écartés dans son premier rapport, se fondait sur les deux mails adressés par Orange au mandataire en janvier 2016, soit postérieurement à l'établissement de son premier rapport et postérieurement à l'assignation devant le Tribunal de commerce de Paris, la Cour d'appel a dénaturé les deux rapports du Mandataire de l'Autorité de la Concurrence et violé les articles les articles 1134 du Code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce, 4 du Code de procédure civile, ensemble le principe selon lequel le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis.
3°) ALORS QUE, le juge ne peut accueillir ou rejeter les demandes dont il est saisi sans examiner tous les éléments de preuve qui lui sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que la qualification d'une pratique de ventes liées suppose la démonstration de l'existence de la subordination de la vente du produit liant à celle du produit lié qui s'exprime en pratique par une obligation d'achat à la charge du consommateur ; qu'en se fondant sur « deux procès-verbaux de constat établis le 30 avril et le 15 mai 2014 à la requête D'ORANGE REUNION retranscrivant les échanges téléphoniques entre deux préposés de la société ORANGE et un télévendeur de la société CANAL PLUS REUNION » pour en déduire que « la société CANAL PLUS REUNION a proposé à cette époque au mépris des engagements pris une offre d'abonnement groupé internet téléphone et télévision satellitaire et qu'il n'était pas possible de souscrire un abonnement internet et téléphone sans télévision, et sur « un mail adressé le 28 mai 2014 par le mandataire désigné par l'ADLC à plusieurs destinataires dont COS » et en conclure que « COS a indiscutablement utilisé sa position dominante sur le marché de la télévision payante étroitement lié au marché de l'internet haut débit, pour tenter de s'approprier des parts sur ce marché connexe afin d'y obtenir un avantage à moindre coût et sans rapport direct avec ses mérites », sans procéder à aucun examen des pièces produites par le Groupe Canal + constituées d'une part des productions n° 8, 16 et 19, respectivement la note de service en date du 23 mai 2014, un extrait du rapport n° 1 en date du 22 juillet 2014, et un courrier du mandataire en date du 28 mai 2014, d'où il ressortait que les comportements dénoncés par Orange étaient isolés, ne s'étaient jamais reproduits ce qui excluait toute volonté de mise en oeuvre d'une pratique de vente liée, d'autre part, de la reproduction des supports de présentation dans le corps même des conclusions, d'où il ressortait que le consommateur disposait d'un véritable choix, autant d'éléments de nature à priver de toute valeur probante les constats opposés aux exposantes et à exclure l'existence de toute obligation d'achat à la charge du consommateur, la Cour d'appel a violé 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR réformé le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 18 juin 2018 et statuant à nouveau, D'AVOIR jugé que les société Canal + Antilles, Canal + International, Canal + Réunion se sont rendues coupables d'abus de position dominante à l'égard de la société Orange et d'AVOIR condamné celles-ci à lui payer une somme de 50.000 euros.
AUX MOTIFS QUE « ORANGE rappelle que l'ADLC a fait de cette obligation un engagement à la charge de COS que celle-ci a violé ainsi que les deux constats d'huissier du 30 avril et du 15 mai 2014 en font foi ; que les constats produits par COS postérieurement au Référé d'heure à heure engagé par ORANGE sont peu probants alors que la non-conformité des pratiques commerciales de COS est avérée par le rapport n° 1 établi par le mandataire nommé par l'ADLC ; que les constats font la preuve de la présentation volontairement trompeuse des sites internet en charge de la commercialisation des offres CanalBox et CanalBox Internet Téléphone car aucune de ces présentations ne permet de souscrire à la seule offre MEDIASERV et que les offres entretiennent volontairement la confusion l'offre CanalBox étant systématiquement couplée à l'une des offres de télévision payante ; que les supports ont été présentés de manière volontairement trompeuse par COS pour faire la promotion des offres ce qui est reconnu par le mandataire nommé par l'ADLC ; que le tribunal s'est mépris sur la portée des constats et enfin que le cumul des pratiques litigieuses a pour effet d'aggraver l'effet d'éviction en résultant au préjudice d'ORANGE. Les engagements pris par COS au chapitre IV de la décision de l'ADLC ont été définis à l'issue de plusieurs tests sur le marché pour répondre aux préoccupations issues de l'analyse concurrentielle relativement à l'auto distribution des offres de COS et aux offres groupées de COS et MEDIASERV, au regard de la capacité du Groupe CANAL PLUS à rémunérer une exclusivité de distribution non seulement sur la plate-forme satellitaire mais également sur les réseaux ADSL fibre et satellite des fournisseurs d'accès à internet où Canalsat s'y autodistribue. La présentation détaillée des engagements proposés au point 269 de la Décision de l'ADLC observe que dans la mesure où les fournisseurs d'accès internet et les autres distributeurs concurrents du groupe CANAL PLUS ne peuvent proposer une exclusivité de distribution que sur leur propre plate-forme et qu'ils ne pourront le faire dans des conditions de concurrence normales, que si le groupe CANAL PLUS révèle la valeur associée à la distribution de chaîne au sein de l'offre Canalsat sur chaque plate-forme propriétaire. La décision a enjoint en conséquence à COS de ne pas coupler la distribution sur sa propre plate-forme satellite et sur les plateformes propriétaires d'opérateurs tiers présents dans les Départements et Régions d'Outre-Mer (DROM) pour les contrats de distribution avec les éditeurs conclus ou reconduits postérieurement à la date de décision. Le point 276 précise également que la partie notifiante s'engage à ne pas accorder à MEDIASERV d'exclusivité pour la distribution des chaînes qu'elle édite et de mettre à disposition les chaines qu'elle édite et qui seraient distribuées par MEDIASERV à tout FAI présent dans les DROM dans des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires, les concurrents de MEDIASERV étant ainsi assurés de pouvoir répliquer l'offre de MEDIASERV si celle-ci devait être enrichie à l'issue de l'opération par l'ajout de chaines éditées par GCP.ORANGE produit deux procès-verbaux de constat établis le 30 avril et le 15 mai 2014 à la requête d'ORANGE REUNION retranscrivant les échanges téléphoniques entre deux préposés de la société ORANGE et un télévendeur de la société CANAL PLUS REUNION, dont l'accord pour être enregistré en présence d'un huissier de justice a été préalablement recueilli, au sujet de la souscription de l'offre intitulée "CanalBox Internet et Téléphone" présentée sur le site web de CANAL PLUS. Ces échanges établissent que la société CANAL PLUS REUNION a proposé à cette époque au mépris des engagements pris une offre d'abonnement groupé internet téléphone et télévision satellitaire et qu'il n'était pas possible de souscrire un abonnement internet et téléphone sans télévision. ORANGE produit également un mail adressé le 28 mai 2014 par le mandataire désigné par l'ADLC à plusieurs destinataires dont COS ne conteste pas qu'ils ressortissent de son personnel, au sujet du respect des engagements pris à l'occasion d'un déplacement à La Réunion qui s'exprime en ses termes : "Au cours de notre déplacement à La Réunion du 19 au 22 mai dernier nous avons pu constater que conformément aux engagements : - les offres 2P et télévision payante de GCP sont proposées à des tarifs distincts, sans remise tarifaire de couplage. Nous notons en particulier que Ie tarif des abonnements des offres de télévision payantes dans le cadre d'une offre "associée" est strictement identique au tarif applicable pour des offres TV seules ; - une offre 3P souscrite par un prospect fait bien l'objet de deux contrats distincts ; - les systèmes d'informations de COS ont été paramétrés afin d'identifier les abonnés 2P et permettre l'application ultérieure éventuelle de I ‘Engagement 8 (résiliation anticipée des contrats télévision payante) : - Les courriers de prospection relatifs à l'Offre CanalBox ont été adressés aux abonnés directs de Canal +/Canalsat, à l'exclusion des abonnés via les FAI.. ». En revanche, nous avons également constaté les points suivants : 1) Un distributeur local nous a communiqué l'enregistrement récent d'un appel au centre d'appels ([XXXXXXXX01]) au cours duquel le télévendeur a indiqué que l'offre CanalBox n'était disponible uniquement qu‘en cas de souscription à une offre TV par satellite. Cette pratique commerciale est, comme vous le savez, contraire aux Engagements ; 2) L'offre 2P (téléphone + internet) n'est pas commercialisée par Mediaserv : ni dans le réseau de distribution (espaces de vente dédiés et appels entrants au numéro de Mediaserv) ni sur le site internet. Par ailleurs, dans les boutiques Canal+, nous avons constaté l'absence de mise en avant de l'offre CanalBox sans Ia composante télévision : 3) Enfin, la promotion de la marque CanalBox à la fois pour une offre 2P et pour une offre 3P incluant la télévision par satellite ("Canal Box librement" "CanalBox Premium" etc.) est susceptible, par son ambiguïté, de suggérer des obligations d'achat entre les offres TV et les offres Mediaserv (Cf. campagnes promotionnelles en cours (affichage, presse, TV et radio), dépliants et autres supports de communication). En conséquence, nous sommes convenus que vous prendrez rapidement les mesures suivantes : i. Rappeler immédiatement à l'ensemble du réseau de distribution (y compris les centres d'appels) l'indépendance des deux offres (ZP d'une part et TV par satellite d'autre part). En particulier : - Aucune obligation d'achat ne doit être suggérée ; - Aucune remise ne doit être accordée en cas de souscription à l''ensemble des offres internet +téléphone + télévision (offre de pack cinéma en option par exemple) ; - Le cas échéant, des sanctions devront être prises a l'encontre du personnel qui ne respecterait pas ces consignes ; ii. Commercialiser l'offre 2P dans le réseau de distribution de Mediaserv et sur le site internet de Mediaserv, à un tarif équivalent en ce compris les opérations promotionnelles (actuellement : option mobile offerte pendant 6 mois) ; iii. Mettre en avant l'offre CanalBox 2P dans les réseaux de distribution de GCP au même tarif, y compris offres promotionnelles, notamment : - dans les boutiques Canal+ (PLV dédiée, corners spécifiques, promotions de l'offre 2P seule sur les flyers, etc.) ; - sur les sites internet (Canal+ Réunion et Canalsat Caraïbes) : iv. Revoir vos plans de communication en conséquence du point 3) ci-dessus. S'agissant du réseau de distribution (cf. i.), nous notons que vous avez déjà transmis une note de service le 23 mai dernier à Mediacall (centre d'appels CanalBox / Mediaserv) et aux Centres de Relation Clients Caraïbes et Réunion. Nous comprenons que vous relayerez également cette note à vos prestataires externes. Nous notons également que la décision a été prise de commercialiser l'offre 2P chez Mediaserv. Enfin, s'agissant des deux derniers points (cf. iii et iv), COS s'est engagé a : - mettre en avant l'offre CanalBox 2P dans les Canal + Store (cf. relevé de décisions du 22 mai) et modifier les sites Internet des filiales de COS dans ces territoires ; - annuler les campagnes de publicité en cours et les remplacer par des campagnes ciblées sur l'offre 2P. Nous comprenons que ces campagnes devraient avoir lieu prochainement dans les Caraïbes (4x3, presse, radio, web) et à la Réunion (presse, radio). Vous voudrez bien nous rendre compte régulièrement de la mise en place de ces actions correctives. «Le rapport n° 8 établit par le mandataire de l'ADLC le 22 avril 2016 dont COS se prévaut et qui a fondé la décision des premiers juges de ne pas retenir le grief de ventes liées, ne se réfère ni aux mêmes constats d'huissiers ni au mail précité et lorsque le mandataire fait état, dans le cadre de ce rapport, des remontées d'ORANGE se fondant sur des mails adressés par COS aux abonnés internet d'ORANGE il apparaît qu'il s'agit de deux abonnés satellites de COS en direct et non en auto distribution qui ne relèvent donc pas des engagements pris au titre de l'interdiction des ventes liées. Il est par conséquent établi que contrairement aux engagements pris, jusqu'au 23 mai 2014, date à laquelle COS a adressé, à la suite des instructions du mandataire une note interne à ses équipes rappelant "l'interdiction de créer une obligation d'achat quelconque entre les offres TV par satellite Canalsat et les offres Canalbox internet téléphone", COS a indiscutablement utilisé sa position dominante sur le marché de la télévision payante étroitement lié au marché de l'internet haut débit, pour tenter de s'approprier des parts sur ce marché connexe afin d'y obtenir un avantage à moindre coût et sans rapport direct avec ses mérites ».
ALORS QUE, la pratique d'une vente liée requiert, pour être constitutive d'un abus de position dominante, de démonter qu'elle a provoqué ou était susceptible de provoquer un effet d'éviction concurrentielle suffisamment sensible ; qu'en l'espèce, pour condamner le Groupe Canal + en raison d'agissements prétendument anticoncurrentiels, la cour d'appel se contente d'énoncer, que « COS a indiscutablement utilisé sa position dominante sur le marché de la télévision payante étroitement lié au marché de l'internet haut débit, pour tenter de s'approprier des parts sur ce marché connexe afin d'y obtenir un avantage à moindre coût et sans rapport direct avec ses mérites » ; que la cour d'appel constate dans le même temps qu'Orange n'établit pas que les agissements qu'elle impute au Groupe Canal + auraient eu pour elle une incidence économique faute de démontrer l'existence d'une perte de chiffre d'affaires en résultant, et qu'Orange n'établit pas davantage que les pratiques reprochées auraient été à l'origine de résiliations d'abonnement émanant de ses clients, pas plus qu'elle ne démontre que ces pratiques l'auraient contrainte à une modification de son modèle de distribution de ses offres ; qu'en l'état de ces constatations, qui ne permettent pas de déduire, ni que les agissements fautifs reprochés au Groupe Canal +, consistant seulement dans le fait d'avoir « utilisé sa position dominante pour s'approprier des parts sur un marché connexe », auraient eu, dans les circonstances de l'espèce, un effet d'éviction concurrentiel, fût-il potentiel, ni que cette affectation du marché aurait eu un caractère suffisamment sensible, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'abus de position dominante auquel les exposantes se seraient livrées, a privé sa décision de base légale au regard des articles 102 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne et L. 420-2 du Code de commerce.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné les société Canal + Antilles, Canal + International et Canal + Réunion à payer une somme de 50.000 euros à la société Orange au titre de la réparation de son préjudice moral.
AUX MOTIFS QUE « Le préjudice subi par ORANGE par le fait du trouble économique imputable à la pratique des ventes liées est essentiellement moral et sera justement réparé par une somme de 50 000 euros que chacune des sociétés intimées sera condamnée à lui régler ».
1°) ALORS QUE, la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que la Cour d'appel a débouté la demande d'Orange en paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique en retenant que Orange n'établissait « ni un déclin objectif de nouveaux abonnements ni une croissance des résiliations sur la période litigieuse et ne saurait être suivie en sa demande de réparation du préjudice économique » ; que la Cour d'appel a pourtant condamné les exposantes à payer chacune à Orange la somme de euros en réparation d'un préjudice moral qui résulterait d'un « trouble économique imputable à la pratique des ventes liées » ; qu'en statuant ainsi, en excluant puis en retenant l'existence d'un dommage économique, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile.
2°) ALORS QUE, la responsabilité civile délictuelle suppose que soit rapportée la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice ; que le droit de la concurrence, destiné à réguler les relations entre opérateurs économiques, exclut la réparation de préjudices « de principe », le concurrent qui se prétend lésé devant établir la réalité, la consistance, et le quantum du dommage qu'il allègue avoir subi ; qu'en l'espèce, la société Orange se contentait de solliciter dans le dispositif de ses conclusions, la réparation d'un préjudice « fût-il seulement moral » préjudice auquel ses motifs ne consacrent aucun développement ; qu'en jugeant pourtant qu'Orange avait, en raison du « trouble économique imputable à la pratique des ventes liées » subi un préjudice « essentiellement moral » et en condamnant les exposantes à payer à Orange la somme de 50.000 euros chacune, sans s'expliquer sur la réalité et le quantum de ce préjudice, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 ancien devenu 1240 et 1315 ancien devenu 1353 du Code civil.
3°) ALORS QU'en qualifiant d'« essentiellement moral » le préjudice qu'elle indemnise, sans donner aucun motif permettant de connaître la consistance et la mesure d'un tel préjudice, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation à même d'exercer son contrôle sur la véritable nature du dommage qu'elle a condamné les exposantes à réparer, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 1382 ancien devenu 1240 et 1315 ancien devenu 1353 du Code civil.