LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
BD4
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 novembre 2022
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1188 F-D
Pourvoi n° Y 21-13.629
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 NOVEMBRE 2022
M. [Z] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-13.629 contre l'arrêt rendu le 22 janvier 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à la société Thales Alenia Space France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [G], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Thales Alenia Space France, après débats en l'audience publique du 21 septembre 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Sommé, conseiller, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 22 janvier 2021), M. [G] a été engagé, en qualité de contrôleur mécanique, par la société Gert devenue la société Gert Ingenierie, par un contrat de travail à durée déterminée à compter du 1er juillet 2002, puis, à compter du 15 septembre 2003, par un contrat à durée indéterminée de chantier.
2. Par avenant du 13 octobre 2010, un contrat de travail à durée indéterminée de droit commun a été substitué au contrat de travail de chantier.
3. Le 1er juillet 2011, la société Gert Ingenierie a été rachetée par la société Geci services, qui a repris le contrat de travail du salarié.
4. Ce dernier a constamment été mis à disposition de la société Alcatel Space devenue la société Thales Alenia Space France (la société Thales), sur son site cannois.
5. Le 8 novembre 2010, le syndicat CGT de la société Thales a transmis à la société Thales la liste des candidats CGT aux élections des délégués du personnel sur laquelle figurait M. [G], en qualité de travailleur mis à disposition sur ce site.
6. Le 3 janvier 2011, la société Gert Ingenierie a informé le salarié du terme de sa mission sur le même site.
7. Le salarié a été licencié par lettre du 12 décembre 2013.
8. Il a répondu les 7 mars et 13 mai 2011, 20 décembre 2012, 30 mai 2013, ainsi qu'en 2016 et en 2020 à divers appels à candidatures de la société Thales.
9. Par requête du 10 décembre 2015, M. [G] a fait attraire la société Thales devant la juridiction prud'homale en invoquant une discrimination syndicale et sollicité le paiement de diverses sommes à ce titre, ainsi que son intégration au sein des effectifs de cette société comme technicien non cadre forfaitisé, niveau 3, coefficient 365, avec un salaire moyen correspondant à celui d'un salarié appartenant à cette catégorie et des mêmes tranche d'âge et ancienneté que lui.
10. Le syndicat CGT Thales Space Cannes est intervenu volontairement à l'instance.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
11. M. [G] fait grief à l'arrêt de seulement condamner la société Thales au titre de la réparation des faits de discrimination à l'embauche et de le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice économique du fait de la discrimination syndicale, alors « qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, en raison de ses activités syndicales ; qu'il en résulte que la responsabilité civile d'une entreprise utilisatrice pour des faits de discrimination à l'encontre d'un salarié mis à sa disposition peut être poursuivie ; qu'en retenant au contraire que le fait d'avoir contribué à l'éviction du salarié en raison de sa candidature aux élections professionnelles ne peut être valablement invoqué à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, aux motifs que la protection contre la discrimination, à l'exception de la protection du candidat au recrutement, renvoie à l'obligation de l'employeur, ce qui suppose l'existence d'un contrat de travail entre les parties, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, ensemble le principe de la liberté syndicale. »
Réponse de la Cour
12. Ayant relevé que M. [G] sollicitait des dommages-intérêts pour préjudice économique en application de l'article L. 1132-1 du code du travail en soutenant qu'il avait été évincé pour un motif discriminatoire, en janvier 2011, du site cannois de la société Thales, la cour d'appel a retenu à bon droit que cet agissement, intervenu dans le cadre de l'exécution du contrat de travail du salarié avec son employeur, la société Gert Ingenierie, ne pouvait être invoqué à l'encontre de la société Thales, entreprise utilisatrice.
13. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
14. M. [G] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il rejette sa demande d'intégration au sein des effectifs de la société Thales, alors « que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en jugeant qu'elle n'a pas le pouvoir d'imposer à l'entreprise utilisatrice, d'intégrer le salarié dans ses effectifs à titre de sanction de la discrimination à l'embauche dont ce dernier a été victime, la cour d'appel a méconnu son office et violé le principe de la réparation intégrale, ensemble le principe de la liberté syndicale. »
Réponse de la Cour
15. Aux termes de l'article 1102, alinéa 1, du code civil, chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi.
16. Il en résulte que, après avoir relevé que trois des refus d'embauche opposés par la société Thales aux candidatures de M. [G] étaient constitutifs de discrimination syndicale et octroyé à M. [G] une certaine somme en réparation des préjudices moraux et économiques en résultant, la cour d'appel a rejeté à bon droit, sans méconnaître son office, la demande d'intégration au sein de la société Thales.
17. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [G] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [G]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. [G] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR seulement condamné la société Thales Alenia Space France en réparation des faits de discrimination à l'embauche et de l'AVOIR débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice économique du fait de la discrimination syndicale.
ALORS QU'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, en raison de ses activités syndicales ; qu'il en résulte que la responsabilité civile d'une entreprise utilisatrice pour des faits de discrimination à l'encontre d'un salarié mis à sa disposition peut être poursuivie ; qu'en retenant au contraire que le fait d'avoir contribué à l'éviction du salarié en raison de sa candidature aux élections professionnelles ne peut être valablement invoqué à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, aux motifs que la protection contre la discrimination, à l'exception de la protection du candidat au recrutement, renvoie à l'obligation de l'employeur, ce qui suppose l'existence d'un contrat de travail entre les parties, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, ensemble le principe de la liberté syndicale.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
M. [G] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande d'intégration au sein des effectifs de la société Thalès alenia space.
ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en jugeant qu'elle n'a pas le pouvoir d'imposer à l'entreprise utilisatrice, d'intégrer le salarié dans ses effectifs à titre de sanction de la discrimination à l'embauche dont ce dernier a été victime, la cour d'appel a méconnu son office et violé le principe de la réparation intégrale, ensemble le principe de la liberté syndicale.