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09/11/2022 | FRANCE | N°20-22126

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 novembre 2022, 20-22126


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 novembre 2022

Rejet

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 660 F-D

Pourvoi n° P 20-22.126

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 NOVEMBRE 2022

M. [T] [

E], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 20-22.126 contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 novembre 2022

Rejet

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 660 F-D

Pourvoi n° P 20-22.126

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 NOVEMBRE 2022

M. [T] [E], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 20-22.126 contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société UBS France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [E], de la SCP Spinosi, avocat de la société UBS France, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2022 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 octobre 2020), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 25 septembre 2019, n° 16-24.151), après avoir transféré son plan d'épargne en actions dans les livres de la société UBS France (la banque), M. [E] a conclu avec elle, le 1er août 2007, un contrat de conseil en investissement.

2. Reprochant à la banque d'avoir manqué à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde et d'avoir enfreint la réglementation applicable à l'occasion de recommandations qu'elle lui avait délivrées les 19 septembre 2007, 26 septembre 2007, 4 décembre 2007 et 1er août 2008, M. [E] l'a assignée en paiement de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, sur le deuxième moyen, pris en ses première et cinquième branche, sur le troisième moyen, pris en sa première branche, et sur le quatrième moyen, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen pris en ses troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

4. M. [E] fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de dommages-intérêts qu'il a formées contre la banque, alors :

« 3°/ que si, déterminant les informations que la banque avait sollicitées et obtenues, les juges du fond évoquent le patrimoine de M. [E], en revanche, ils omettent de se prononcer sur le point de savoir si le prestataire était informé des revenus réguliers de M. [E], de ses engagements financiers réguliers, et de la composition de ses actifs (liquidités, investissements et biens immobiliers) ; qu'à cet égard, l'arrêt encourt la censure pour défaut de base légale au regard des articles L. 533-11 et L. 533-13, I, alinéas 1 et 2, du code monétaire et financier, de l'article 314-46 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ainsi que de l'article 1145 ancien du code civil ;

4°/ que, tenus de rechercher si, à la date de la recommandation, le prestataire était bien en possession des éléments requis, il était inopérant de constater qu'au cours de la procédure en réparation, il apparaissait que les revenus de M. [E] et de son épouse atteignaient un certain montant ; que s'étant mépris sur la date à laquelle ils devaient se placer, les juges du fond ont à nouveau violé les articles L. 533-11 et L. 533-13, I, alinéas 1 et 2, du code monétaire et financier, de l'article 314-46 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ainsi que de l'article 1145 ancien du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte de l'article L. 533-13, I, du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007, que le prestataire de services d'investissement a l'obligation de s'enquérir, auprès de ses clients ou de ses clients potentiels, de leurs connaissances et de leur expérience en matière d'investissement, ainsi que de leur situation financière et de leurs objectifs d'investissement pour, notamment, pouvoir leur recommander les instruments financiers adaptés à leur situation.

6. Conformément aux articles 314-46 et 314-47 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, dans leur rédaction applicable au litige, les renseignements sur la situation financière du client et ceux sur ses objectifs d'investissement ne doivent inclure, les premiers, des informations sur la source et l'importance des revenus réguliers du client, la composition de ses actifs et ses engagements financiers, les seconds, des informations sur la durée pendant laquelle le client souhaite conserver l'investissement, ses préférences en matière de risques, son profil de risque et le but de l'investissement, que si ces informations sont pertinentes pour que le prestataire de service d'investissement puisse faire une recommandation en adéquation avec la situation personnelle du client, son expérience en matière d'investissement et ses objectifs.

7. L'arrêt retient que la banque a pu se convaincre de la qualité d'investisseur averti de M. [E] au regard des échanges qu'elle avait eus avec lui dans le cadre du mandat de gestion souscrit en 2004, des opérations qu'il avait réalisées seul et qu'elle avait exécutées d'octobre 2006 à août 2007 et de sa qualité d'avocat spécialiste en conseil en investissement, en droit des affaires et financier et en conseil d'opérations de LBO et de capital risque.

8. L'arrêt relève encore que M. [E] a, à l'occasion de la conclusion du contrat de conseil le 1er août 2007, répondu à un questionnaire intitulé « risks compass », qui avait pour objectif de déterminer sa propension personnelle au risque et la stratégie d'investissement qui lui convenait le mieux, en indiquant qu'il effectuait des placements financiers, seul ou avec l'assistance d'un conseiller financier, depuis plus de cinq ans, qu'il avait une expérience moyenne dans l'investissement financier, que l'objectif qu'il assignait à la plus grande partie du placement qu'il prévoyait d'effectuer pour une durée comprise entre un et cinq ans était un « accroissement extraordinaire du capital avec risques significatifs », et que l'investissement qu'il prévoyait d'effectuer correspondait au montant de son plan d'épargne en actions évalué, lors de la conclusion du contrat de conseil, à la somme de 1,8 millions d'euros, représentant entre 11 et 25 % de son patrimoine. L'arrêt en déduit que la banque avait une connaissance suffisante des éléments essentiels et pertinents de la situation financière de M. [E] et des objectifs qu'il a déclaré vouloir poursuivre.

9. En l'état de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel, se livrant à la recherche prétendument omise invoquée par la troisième branche, a pu retenir que la banque avait recueilli les informations pertinentes légalement et réglementairement requises concernant M. [E], lui permettant de délivrer un conseil adéquat.

10. Le moyen, inopérant en sa quatrième branche en ce qu'elle critique des motifs surabondants, n'est donc pas fondé pour le surplus.

Sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

11. M. [E] fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 2°/ que, dès lors que douze des valeurs proposées le 4 décembre 2007 ne figuraient pas au CAC 40, la banque ne pouvait se borner à fournir des informations concernant l'indice du CAC 40 et avait l'obligation de soumettre à M. [E] des données concernant les indices pertinents pour les valeurs non référencées au CAC 40 ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 533-12, du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007, ainsi que l'article 314-12 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers et les articles 1134 et 1147 anciens du code civil ;

3°/ que, s'agissant des performances passées, M. [E] se prévalait de ce qu'elles ne couvraient pas cinq années, de ce que les sources n'étaient pas indiquées et de ce qu'elles ne comportaient pas davantage de rappels de ce que les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures ; qu'en se bornant à énoncer que les informations passées ne constituaient pas l'essentiel des données, sans s'expliquer sur les manquements ainsi invoqués, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 533-12, II, du code monétaire et financier, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007, ainsi qu'au regard de l'article 314-13 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers et des articles 1134 et 1147 anciens du code civil ;

4°/ que, concernant les perspectives d'avenir mentionnées, les juges du fond ont omis de dire si les données reposaient sur des hypothèses raisonnables, elles-mêmes élaborées à partir de données objectives ; qu'à cet égard, l'arrêt est entaché d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 533-12 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007, ainsi qu'au regard de l'article 314-15 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers et des articles 1134 et 1147 anciens du code civil. »

Réponse de la Cour

12. En premier lieu, après avoir exactement énoncé que le manquement du prestataire de services d'investissement à ses obligations d'information résultant du règlement général de l'AMF ne conduit pas à lui seul à l'engagement de sa responsabilité, laquelle est en outre subordonnée à l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité, la cour d'appel a souverainement retenu que le défaut d'indication de la méthode ayant conduit à l'édiction des performances futures contenues dans les recommandations de Bloomberg et d'UBS IB et jointes à la recommandation du 4 décembre 2007, étaient, en tout état de cause, sans lien avec le préjudice invoqué par M. [E].

13. En second lieu, l'arrêt retient, tout d'abord, par motifs propres et adoptés, que les performances passées ne constituent pas le message essentiel de la recommandation du 4 décembre 2007, que la banque a en effet recommandé l'acquisition de valeurs classiques non spéculatives, soumises au seul risque boursier ordinaire, soit un risque connu, certes dépréciées lors du conseil mais disposant, comme elle l'indiquait, d'un fort potentiel de rebond, lequel ne s'est pas produit, du fait de l'ampleur de la crise financière qui n'a été prévisible pour aucun acteur majeur du secteur. L'arrêt relève ensuite que, sur les neuf valeurs recommandées par la banque, M. [E] a acquis cinq valeurs faisant partie de l'indice du CAC 40. L'arrêt retient, encore, que la banque a pu se convaincre de la qualité d'investisseur averti de M. [E] au regard des échanges qu'elle avait eus avec lui dans le cadre du mandat de gestion souscrit en 2004, des opérations qu'il avait réalisées seul et qu'elle avait exécutées d'octobre 2006 à août 2007 et de sa qualité d'avocat spécialiste en conseil en investissement, en droit des affaires et financier et en conseil d'opérations de LBO et de capital risque. L'arrêt relève, enfin, que M. [E] a, à l'occasion de la conclusions du contrat de conseil avec la banque, le 1er août 2007, paraphé et signé une annexe 2 comprenant une information claire sur les risques de perte en capital des produits dérivés sur les marchés à terme et sur la gestion alternative, et qu'il a, le même jour, répondu à un questionnaire intitulé « risks compass » par lequel, notamment, il indiquait qu'il effectuait des placements financiers, seul ou avec l'assistance d'un conseiller financier, depuis plus de cinq ans, qu'il avait une expérience moyenne dans l'investissement financier, que l'objectif qu'il assignait à la plus grande partie du placement qu'il prévoyait d'effectuer pour une durée comprise entre un et cinq ans était un « accroissement extraordinaire du capital avec risques significatifs », et, à la question posée sur les types d'instruments financiers dans lesquels il avait placé la majeure partie de ses avoirs, il avait coché les actions spécifiques, les fonds en actions, les dérivés, tels qu'options, futures, opérations à terme sur actions, indices, matières premières, devises, etc., et à la question lui demandant de porter un jugement sur le niveau de risque de ce placement, il avait indiqué « risque élevé ».

14. En l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que M. [E] n'avait pu se méprendre sur le fait que les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures, qu'il n'avait pu être induit en erreur par les lacunes de la recommandation du 4 décembre 2007 quant aux indices financiers de référence et quant aux sources et à l'ancienneté des performances passées et que, par suite, la non-conformité, sur ces points, de la recommandation à la réglementation en vigueur n'avait pu influer sur ses choix, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

16. M. [E] fait le même grief à l'arrêt, alors que « faute d'avoir recherché si la banque avait satisfait à son obligation de suivi, telle que prévue à la convention de conseil du 1er août 2007, impliquant qu'elle l'alerte sur la nécessité de vendre les trackers à bref délai une fois ceux-ci acquis, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L.533-12 du code monétaire et financier tel qu'issu de l'ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007, ainsi que des articles 1134 et 1147 anciens du code civil. »

Réponse de la Cour

17. L'arrêt, après avoir relevé, tout d'abord, qu'en application de la convention de conseil du 1er août 2007, la banque ne s'est engagée à surveiller que les placements réalisés « sur la base d'une recommandation concrète d'UBS », ensuite, que, dans son courriel du 1er août 2008, la banque s'est bornée à indiquer, s'agissant des trackers CAC 40, « Une solution s'offre à vous : trackers CAC ou Eurostoxx leverage X 2 : en cas de remontée des indices tirés par les bancaires, nous pourrions rattraper plus vite les pertes. Attention néanmoins à cet effet de levier qui marche dans les deux sens, mais qui ne connaît d'échéance ni de barrière désactivante. Les marchés pourraient revenir tester les 4 000 points. Je vous proposerais dans ces niveaux de rentrer progressivement sur ces produits. On en reparle à votre convenance », enfin, que M. [E] n'a procédé à des investissements sur le tracker CAC 40 qu'à compter du 24 mars 2009, sans évoquer ce fait avec la banque ni solliciter son conseil comme elle l'y invitait dans son courriel et qu'il a réalisé, de son propre chef, de très nombreuses opérations sur ce produit, à la fois à l'achat et à la vente, de cette date jusqu'au 7 avril 2010, avant de se défaire de celles subsistantes entre les 18 et 26 octobre 2011, retient que les opérations litigieuses sur le tracker CAC 40 ne peuvent être regardées comme en lien avec le conseil donné entre huit mois et plusieurs années auparavant.

18. En l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que la banque n'était pas tenue contractuellement à une obligation de suivi des investissements de M. [E] sur le tracker CAC 40, qui n'avaient pas été réalisés sur la base d'une recommandation de la banque au sens et pour l'application de la convention de conseil, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

19. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [E] et le condamne à payer à la société UBS France la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. [E].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué, critiqué par Monsieur [E], encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts qu'il a formées contre UBS FRANCE ;

ALORS QUE, premièrement, en vertu de l'article L.533-13, paragraphe I, alinéa 2, du Code monétaire et financier, si le prestataire n'a pas sollicité et obtenu les éléments relatifs à son client qui lui sont nécessaires pour pouvoir agir, il lui est interdit de formuler une recommandation ; qu'en refusant de considérer que le manquement à l'obligation de ne pas faire révélait une faute susceptible d'ouvrir par lui-même un droit à réparation, les juges du fond ont violé les articles L. 533-11 et L. 533-13, I, alinéas 1 et 2 du Code monétaire et financier, ainsi que l'article 1145 ancien du Code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, à supposer que l'on puisse faire abstraction de l'obligation de ne pas faire, telle que précédemment invoquée, en tout cas l'arrêt méconnait la circonstance que le recueil d'informations sur le client aux fins de son profilage – tel que voulu par la Directive n° 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 (art. 19.4), et de sa directive d'application du 10 août 2006 (Directive 2006/73/CE, art. 35.) – constitue une garantie de la protection de celui-ci, participant d'un ordre public de protection dont la méconnaissance caractérise une faute civile et présume de son lien de causalité avec le dommage souffert par l'investisseur ; que ce faisant, les juges du fond ont violé les articles L. 533-11 et L. 533-13, I, alinéas 1 et 2 du Code monétaire et financier, l'article 314-46 du Règlement général de l'Autorité des Marchés Financiers, ainsi que les articles 1145 et 1147 anciens du Code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, si, déterminant les informations qu'UBS FRANCE avait sollicitées et obtenues, les juges du fond évoquent le patrimoine de Monsieur [E], en revanche, ils omettent de se prononcer sur le point de savoir si le prestataire était informé des revenus réguliers de Monsieur [E], de ses engagements financiers réguliers, et de la composition de ses actifs (liquidités, investissements et biens immobiliers) ; qu'à cet égard, l'arrêt encourt la censure pour défaut de base légale au regard des articles L. 533-11 et L.533-13, I, alinéas 1 et 2 du Code monétaire et financier, de l'article 314-46 du Règlement général de l'Autorité des Marchés Financiers ainsi que de l'article 1145 ancien du Code civil ;

ALORS QUE, quatrièmement, tenus de rechercher si, à la date de la recommandation, le prestataire était bien en possession des éléments requis, il était inopérant de constater qu'au cours de la procédure en réparation, il apparaissait que les revenus de Monsieur [E] et de son épouse atteignaient un certain montant ; que s'étant mépris sur la date à laquelle ils devaient se placer, les juges du fond ont à nouveau violé les articles L. 533-11 et L.533-13, I, alinéas 1 et 2 du Code monétaire et financier, de l'article 314-46 du Règlement général de l'Autorité des Marchés Financiers ainsi que de l'article 1145 ancien du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué, critiqué par Monsieur [E], encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts qu'il a formées contre UBS FRANCE ;

ALORS QUE, premièrement, en énonçant que Monsieur [E] ne rapportait pas la preuve du manquement d'UBS quant au conseil contenu dans son courrier du 4 décembre 2007 (arrêt p. 20 § 3), quand cette charge pesait sur UBS, débitrice d'une obligation d'information, les juges du fond ont violé les règles de la charge de la preuve ;

ALORS QUE, deuxièmement, dès lors que douze des valeurs proposées le 4 décembre 2007 ne figuraient pas au CAC 40, UBS FRANCE ne pouvait se borner à fournir des informations concernant l'indice du CAC 40 et avait l'obligation de soumettre à Monsieur [E] des données concernant les indices pertinents pour les valeurs non référencées au CAC 40 ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L.533-12, paragraphe II du Code monétaire et financier tel qu'issu de l'ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007 ainsi que l'article 314-12 du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers et les articles 1134 et 1147 anciens du Code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, s'agissant des performances passées, Monsieur [E] se prévalait de ce qu'elles ne couvraient pas cinq années, de ce que les sources n'étaient pas indiquées, et de ce qu'elles ne comportaient pas davantage de rappels de ce que les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures (conclusions du 29 juin 2020 p. 84 et s., § C-1-1-3) ; qu'en se bornant à énoncer que les informations passées ne constituaient pas l'essentiel des données, sans s'expliquer sur les manquements ainsi invoqués, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L.533-12, II du Code monétaire et financier dans sa version issue de l'ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007, ainsi qu'au regard de l'article 314-13 du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers et des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil ;

ET ALORS QUE, quatrièmement, concernant les perspectives d'avenir mentionnées, les juges du fond ont omis de dire si les données reposaient sur des hypothèses raisonnables, elles-mêmes élaborées à partir de données objectives (conclusions du 29 juin 2020 p. 85 et s. § C-1-1-4) ; qu'à cet égard, l'arrêt est entaché d'un défaut de base légale au regard de l'article L.533-12 du Code monétaire et financier dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007, ainsi qu'au regard de l'article 314-15 du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers et des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil ;

ET ALORS QUE, cinquièmement, le tableau annexé au courriel du 4 décembre 2007 devait être analysé comme une analyse financière, dès lors que les éléments qui y figuraient étaient de nature à orienter la décision du client ; qu'à ce titre, le prestataire devait préciser le nom et la fonction de la personne ayant élaboré le document, les principales hypothèses retenues et la méthode utilisée pour fixer les objectifs ; que les juges du fond devaient s'expliquer sur tous ces points avant que de pouvoir se prononcer sur le lien de cause à effet ; que faute de ce faire, l'arrêt est entaché d'un défaut de base légale au regard des articles L.533-12 et L. 544-1, du Code monétaire et financier dans leur rédaction issue de l'ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007, ainsi qu'au regard des articles 315-1, 315-2, 315-3 3°, 315-3 5°, 315-3 7° et 315-3 9° du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers et des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué, critiqué par Monsieur [E], encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts qu'il a formées contre UBS FRANCE ;

ALORS QUE, premièrement, faute d'avoir informé Monsieur [E] de ce que les trackers CAC devaient être vendus à très bref délai lors de la recommandation du 1er août 2008, UBS FRANCE a nécessairement commis une faute à l'origine directe des pertes dès lors que, faute d'information, Monsieur [E] a conservé les trackers pendant plusieurs années ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L.533-12 du Code monétaire et financier tel qu'issu de l'ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007, des articles 314-10, 314-11 et 314-18 du Règlement général de l'autorité des marchés financiers, ainsi que des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, faute d'avoir recherché si UBS FRANCE avait satisfait à son obligation de suivi, telle que prévue à la convention de conseil du 1er août 2007, impliquant qu'elle alerte Monsieur [E] sur la nécessité de vendre les trackers à bref délai une fois ceux-ci acquis, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L.533-12 du Code monétaire et financier tel qu'issu de l'ordonnance n°2007-544 du 12 avril 2007 ainsi que des articles 1134 et 1147 anciens du Code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué, critiqué par Monsieur [E], encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts qu'il a formées contre UBS FRANCE ;

ALORS QUE, premièrement, en application de l'article L.533-4 du Code monétaire et financier, tel qu'en vigueur à l'époque, le prestataire était tenu, face à une sollicitation du client, de formuler une recommandation au mieux des intérêts de son client, sachant qu'en cas de doute quant aux intentions du client, il incombe au prestataire de l'interroger pour lever l'équivoque ; qu'ayant refusé de retenir l'existence d'une faute quand ils constataient qu'aucune recommandation n'avait été faite lorsque Monsieur [E] l'a interrogée le 26 septembre 2007 sur l'achat de trackers, les juges du fond ont violé l'article L. 533-4 ancien du Code monétaire et financier ensemble l'article 1147 ancien du Code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, il importait peu qu'à la revente certains trackers aient été le siège de plus-value, dès lors que d'autres trackers acquis sans que la sollicitation du client ait donné lieu à une recommandation, avaient subi de lourdes pertes ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L.533-4 ancien du Code monétaire et financier ensemble l'article 1147 ancien du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-22126
Date de la décision : 09/11/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 octobre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 nov. 2022, pourvoi n°20-22126


Composition du Tribunal
Président : M. Mollard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.22126
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