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26/10/2022 | FRANCE | N°21-21442

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 26 octobre 2022, 21-21442


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 740 F-D

Pourvoi n° R 21-21.442

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 OCTOBRE 2022

La société L'Envol, société civile immobilière, dont le siÃ

¨ge est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-21.442 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re sec...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 740 F-D

Pourvoi n° R 21-21.442

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 OCTOBRE 2022

La société L'Envol, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-21.442 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Norbail immobilier, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société L'Envol, de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Allianz IARD, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Norbail immobilier, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 22 juin 2021), le 14 novembre 2007, la société Norbail immobilier a donné en crédit-bail immobilier à la société L'Envol un bâtiment à usage industriel.

2. Une assurance destinée à garantir le bâtiment contre le risque d'incendie a été souscrite auprès de la société Allianz IARD.

3. Le 2 juin 2011, le bâtiment a été intégralement détruit par un incendie.

4. Après expertise ordonnée en référé, la société L'Envol a assigné la société Norbail immobilier pour obtenir sa condamnation à reconstruire le bien et la société Allianz IARD en indemnisation.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. La société L'Envol fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes à l'encontre de la société Norbail immobilier, alors « que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'aux termes du contrat de crédit-bail conclu entre la société Norbail immobilier, crédit-bailleur, et la société L'Envol, crédit-preneur, en cas de destruction totale de l'immeuble loué, le bailleur, lorsque la reconstruction à l'identique est possible, « s'oblige à reconstruire à l'identique le bien loué et en conséquence, encaissera, la ou les indemnités représentatives dudit bien » et le preneur devra continuer à payer loyer convenu et « devra supporter la totalité de l'exécution du coût des travaux de reconstruction dans le cas où l'indemnité d'assurance nette de tous impôts et taxes présent ou à venir serait insuffisante, et ceci, en contrepartie de l'entière responsabilité qu'il assume dans les déclarations des valeur assurés, comme il est dit précédemment » ; qu'en retenant néanmoins que la reconstruction à l'identique demandée par la société L'Envol était contractuellement conditionnée par un accord préalable tripartite entre le preneur, le bailleur et l'assureur, la cour d'appel, qui a ajouté au contrat une condition qu'il ne comportait pas, a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a constaté que le contrat stipulait que, lorsque la reconstruction à l'identique du bien était possible, le bailleur s'obligeait à y procéder et encaisserait, en conséquence, l'indemnité d'assurance, tandis que le preneur, qui devait continuer à payer le loyer convenu, devait supporter la totalité de l'exécution du coût des travaux de reconstruction dans le cas où l'indemnité d'assurance était insuffisante.

8. Elle a relevé que, alors qu'il résultait de ces stipulations que le crédit-bailleur ne devait pas supporter de coûts supérieurs au montant de l'indemnité d'assurance, la société L'Envol n'avait jamais manifesté son accord pour la prise en charge de la totalité du coût de la reconstruction en cas d'insuffisance de l'indemnité d'assurance, puisqu'elle exigeait la reconstruction sans contrepartie.

9. Elle a pu déduire, de ces seuls motifs, que la demande de reconstruction à l'identique et de financement par la société Norbail immobilier, présentée par la société L'Envol, devait être rejetée.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. La société L'Envol fait grief à l'arrêt de condamner la société Allianz IARD à lui payer la seule somme de 1 299 608 euros HT et de rejeter ses autres prétentions, alors :

« 1°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en déduisant de l'indemnité due par la société Allianz au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré une indemnité différée et en limitant la condamnation de l'assureur au versement de la seule somme de 1 299 608 euros HT sans donner aucune justification au rejet de la demande de la SCI L'Envol tendant au paiement de la totalité de l'indemnité de reconstruction due par l'assureur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'aux termes de l'article 6.1.2 de la police « tout risques sauf » n° 46 263 880, « l'assureur réglera dans un premier temps, la valeur vétusté déduite au jour du sinistre des biens sinistrés ou détruits et le complément pour valeur à neuf, limité à 33 % de la valeur de reconstruction, sera versée après justification de son investissement » ; que la SCI L'envol sollicitait la condamnation de la société Allianz à lui verser l'indemnité de reconstruction de l'immeuble sinistré en totalité ; qu'en déduisant de l'indemnité due par la société Allianz au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré une indemnité différée, pour débouter ensuite purement et simplement la SCI L'Envol de sa demande en paiement de la totalité de l'indemnité dont le contrat prévoyait pourtant le paiement en cas de justification de l'investissement de l'indemnité principale, la cour d'appel qui a méconnu la force obligatoire du contrat d'assurance, a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil. »

Réponse de la Cour

12. La cour d'appel a relevé que l'article 6.2.1 du contrat d'assurance stipulait que l'assureur réglerait dans un premier temps la valeur vétusté déduite au jour du sinistre des biens sinistrés ou détruits et que le complément pour valeur à neuf, limité à 33 % de la valeur de reconstruction, serait versé après justification de son investissement.

13. Ayant ainsi constaté que la police d'assurance prévoyait que le complément pour valeur à neuf ne serait versé que sur justification de l'investissement et relevé que le montant proposé par l'assureur ne faisait pas l'objet de critiques particulières de la part de la société Norbail immobilier ou de la société L'Envol, la cour d'appel, qui a motivé sa décision, en a exactement déduit, que, à défaut de justification de l'investissement de l'indemnité d'assurance dans la reconstruction de l'immeuble détruit, la société L'Envol n'avait pas droit au paiement de l'indemnité différée.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société L'Envol aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société L'Envol

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la SCI L'envol de toutes ses prétentions à l'encontre de la société Norbail immobilier ;

AUX MOTIFS QUE sur les demandes dirigées contre Norbail Immobilier sur l'obligation de reconstruire Aux termes des articles 1156 et 1161 ancien du code civil applicable au contrat, : "On doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes," et " Toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier." Il est donc nécessaire de se référer à la commune intention des parties résultant du contrat de crédit-bail immobilier dans son ensemble, et ce d'autant plus que le contrat lui-même rappelle ce principe légal en ces termes : "Les parties conviennent dans tous les cas de se référer à cette déclaration pour justifier, entre elles, de la répartition des charges, obligations et risques, et pour rechercher, si besoin est, leur commune intention." A cet égard, lesdites "déclarations" des parties sont les suivantes : article 2 : " Engagements du PRENEUR - Transfert de risques " (chapitre 1 des conditions générales page 6 du contrat) " b. transferts de risques En outre le PRENEUR : qui a pris l'initiative du choix de l'immeuble, objet du contrat ; qui a négocié, directement sans l'intermédiaire et le concours du BAILLEUR, les conditions de son achat ou de sa construction ; qui sera l'utilisateur de l'immeuble et, s'il le désire en deviendra propriétaire, assumera malgré l'appropriation de ce BIEN Immobilier par le BAILLEUR pendant la durée du financement, la responsabilité entière de l'opération au point de vue technique et économique. De son côté, le BAILLEUR reconnaît que, pendant la durée de l'opération, son rôle se bornera bien que juridiquement propriétaire de l'immeuble, à assurer dans les limites arrêtées entre les parties, et sous réserve que le PRENEUR remplisse exactement ses obligations contractuelles, le financement de l'immeuble tel que construit ou vendu. Dans ces conditions, il a paru légitime non seulement que le PRENEUR assume les risques qui découlent de sa situation juridique mais que lui soient également transférés tous risques et obligations, quels qu'ils soient, même résultant du cas de force majeure, qui, selon le droit commun aurait dû incomber au constructeur et au propriétaire du BIEN Immobilier. " pages 14 et 15 : " INTERVENTION DU PRENEUR A CREDIT-BAIL ... /. .. La société qu'il représente a convenu avec l 'Acquéreur de régulariser un contrat de crédit-bail Immobilier portant sur l'immeuble sus-désigné, dans des conditions indépendantes des présentes quant aux rapports de l 'Acquéreur avec Le Vendeur, mais indissolublement liées aux présentes en ce 1 8 N° RG 19/00340 - N° Portalis DBVY-V-B7D-GFGP qui concerne les rapports de l'acquéreur et de La société intervenante. En effet, les opérations de crédit-bail Immobilier constituent juridiquement des opérations spécifiques qui sont régies par La loi du 2 juillet 1966 modifiées par L 'ordonnance numéro 67-837 du 28 septembre 1967 et les textes subséquents et par l'article 57 de la loi n°95.115 du 4 février à l'exclusion notamment des dispositions des articles I ; 146-1 et suivants du Code de commerce réglant les rapports entre bailleurs et locataires. La Sci L'Envol, - qui a pris l'initiative du choix de l'immeuble objet du contrat, - qui a négocié directement, sans l'intermédiaire ou le concours de L'ACQUEREUR, les conditions de son achat, - qui sera l'utilisateur de l'immeuble, et si elle le désire, en deviendra propriétaire, Reconnaît que les clauses et conditions du présent acte reflètent exactement celles qu'elle a librement débattues avec le VENDEUR et entend, malgré le transfert de propriété réalisé au profit du BAILLEUR, pendant la durée du financement, conserver la maîtrise entière de l'opération au point de vue technique et économique. De son côté, le BAILLEUR reconnaît que, pendant la durée de l'opération, son rôle se borne, bien que juridiquement propriétaire de l'immeuble, à assurer dans les limites arrêtées entre les parties et sous réserve que le Preneur remplisse exactement ses obligations contractuelles, le financement de l'immeuble. Dans ces conditions, il a paru légitime, non seulement que le PRENEUR assume les risques qui découlent de sa situation juridique, mais que lui soient également transférés tous risques et obligations quels qu'ils soient, notamment ceux afférents aux vices de l'immeuble et ceux résultant des cas de force majeure qui selon le droit commun, auraient dû ou pu incomber au propriétaire de l'immeuble. Les parties conviennent dans tous les cas de se référer à cette déclaration pour justifier, entre elles, de la répartition des charges, obligations et risques, et pour rechercher, si besoin est, leur commune intention. Messieurs [U] font la présente déclaration à l'effet de rendre la société qu'il représente garante et répondante du BAILLEUR quant à l'ensemble des obligations que ce dernier prend aux présentes." b) Entretien et réparations (chapitre I article 4 point 2 des conditions générales page 10 du contrat) " ( ... ) En outre, le PRENEUR, assumera seul la charge de tous les travaux généralement quelconques, y compris la reconstruction ou la transformation qui s'avéreraient nécessaires pour que les locaux soient exploitables conformément à leur destination contractuelle, y compris pour mise en conformité avec des règles ou normes de sécurité anciennes ou nouvelles ( ... ) " En ce qui concerne les dispositions tenant à la perte du bien immobilier (page 26 du contrat) il est stipulé à l'acte : " Par dérogation aux dispositions de l'article 1722 du Code Civil qui prévoit la résiliation de plein droit du bail en cas de destruction totale pour cas fortuit de la chose louée pendant la durée du bail et la possibilité pour le preneur, en cas de destruction partielle de demander, soit une diminution du prix du bail, soit la résiliation du même bail, sans dédommagement, il est expressément convenu entre les parties que le présent crédit-bail ne sera pas résolu de plein droit par la perte même totale du bien loué, pour quelque cause que ce soit et ceci, que la perte soit totale ou partielle. Premier cas - La reconstruction à l'identique du bien est possible Dans ce cas, le BAILLEUR s'oblige à reconstruire à l'identique le bien loué et en conséquence, encaissera, la ou les indemnités représentatives dudit bien. De son côté, le PRENEUR devra continuer à payer le loyer convenu, sauf à percevoir selon les conditions prévues au contrat, l'indemnité de perte de loyers qui lui sera versée par les assureurs. De plus, le PRENEUR devra supporter la totalité de l'exécution du coût des travaux de reconstruction dans le cas où l'indemnité d'assurance nette de tous impôts et taxes présent ou à venir serait insuffisante, et ceci, en contrepartie de l'entière responsabilité qu'il assume dans les déclarations des valeurs assurées, comme il est dit précédemment. Dans ce cas, l'indemnité de perte de loyers viendra compléter à due concurrence le montant de l'indemnité versé au BAILLEUR Deuxième cas - la reconstruction du bien loué n'est pas réalisée par suite d'interdiction administrative ou autres ou quelque cause que ce soit. Dans ce cas, le BAILLEUR s'oblige à réaliser au profit du PRENEUR la promesse de vente des biens, objet du présent contrat, au prix conventionnel diminué du montant des indemnités perçues après imputation sur ces dernières de toutes taxes, indemnités et débours supportés par le BAILLEUR du fait du sinistre comme de toutes sommes qui seraient dues par le PRENEUR du fait du présent contrat. De son côté le preneur pourra opter : Soit pour la réalisation anticipée de la promesse de vente dont il est parlé ci-après à son profit, en manifestant son intention par lettre recommandée avec avis de réception adressée au BAILLEUR dans le délai de deux mois suivant le jour de la perte du bien donné. Soit pour le maintien des présentes conventions, lesquelles continueraient à produire tous leurs effets, le PRENEUR pouvant néanmoins demander à tout moment la réalisation anticipée de la promesse de vente avec un préavis de six mois " Il résulte ainsi des dispositions susvisées du contrat de crédit-bail immobilier conclu entre les parties le 14 novembre 2007 que : - l'intervention de la société Norbail se borne au financement de l'immeuble, - la société l'Envol doit supporter les risques de la force majeure qui incomberaient normalement au propriétaire, - la Sci l'Envol doit assumer seule la charge de tous les travaux , y compris la reconstruction ou la transformation qui s'avéreraient nécessaires ; ainsi le contrat prévoit les cas suivants : - soit la reconstruction par la société Norbail Immobilier au montant de l'indemnité d'assurance, - soit la reconstruction par Norbail Immobilier mais avec obligation pour la sci l'Envol de supporter l'exécution de la totalité du coût des travaux de reconstruction en cas d'insuffisance de l'indemnité d'assurance, - soit la levée d'option par la sci l'Envol dans les deux mois de la perte du bien, déduction faite de l'indemnité d'assurance, - soit la poursuite du contrat et maintien de tous ses effets, avec la levée d'option ultérieure à tout moment sous préavis de 6 mois. ; il convient de rappeler que selon l'expertise de M. [N] le bâtiment, choisi par la société l'Envol, présentait un entretien succinct, assez limité, sans plans de l'installation électrique, ni dossier de contrôle de cette installation, alors que cette installation, toujours sous tension, était "très vétuste", complexe et d'origine (1973), avec plusieurs tableaux divisionnaires, alimentant les différents secteurs d'activités, qu'il n'y avait pas d'alarme incendie. Cet expert a relevé également que la porte d'entrée des bureaux n'était pas verrouillée. Le transfert des risques dans ces conditions est un élément absolument essentiel du contrat de crédit-bail. La clause par laquelle il est indiqué que le bailleur, en cas de perte "s'oblige" à reconstruire à l'identique le bien loué, ne peut se comprendre au vu des clauses ci-dessus comme nécessitant un accord préalable des parties sur le coût de la reconstruction et le montant de l'indemnité d'assurance ; pour le cas où l'indemnité d'assurance serait insuffisante, les parties se trouvent nécessairement dans la situation prévue au 2e alinéa du cas n° 1 à savoir qu'en cas d'insuffisance de l'indemnité d'assurance au regard du coût de la reconstruction, le preneur devra : supporter la totalité de l'exécution du coût des travaux de reconstruction. En réalité, les termes du contrat sont clairs en ce sens que le crédit bailleur au final ne supporte pas de coûts supérieurs au montant de l'indemnité d'assurance, ni dans le cas n° 1, ni dans le cas n° 2, l'insuffisance d'assurance étant de la responsabilité du preneur (page 25 du contrat) ; or la sci l'Envol n'a jamais manifesté son accord pour la prise en charge de la totalité du coût de la reconstruction en cas d'insuffisance de l'indemnité d'assurance, ni n'a jamais manifesté son accord sur le montant de l'indemnisation de la société Allianz ensuite des premières investigations des experts. Au contraire, elle a toujours exigé la reconstruction sans contrepartie, en faisant une lecture incomplète du contrat, préférant agir judiciairement et aux fins d'être indemnisée de "tous ses préjudices", alors qu'il convenait plutôt de s'en remettre au contrat pour déterminer les modalités de financement de la reconstruction ; en conclusion, il convient de juger que la reconstruction à l'identique demandée par la Sci l'Envol était contractuellement conditionnée, aux termes de l'alinéa 2 du cas 1, par un accord préalable triparti entre le preneur, le bailleur et l'assureur, de sorte que la société Norbail Immobilier n'était pas tenue de procéder à la reconstruction, faute d'un tel accord ; ainsi la Sci l'Envol sera déboutée de sa demande de reconstruction et de financement de la reconstruction par la société Norbail ;

ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'aux termes du contrat de crédit-bail conclu entre la société Norbail immobilier, crédit-bailleur, et la SCI l'Envol, crédit-preneur, en cas de destruction totale de l'immeuble loué, le bailleur, lorsque la reconstruction à l'identique est possible, « s'oblige à reconstruire à l'identique le bien loué et en conséquence, encaissera, la ou les indemnités représentatives dudit bien » et le preneur, devra continuer à payer loyer convenu et « devra supporter la totalité de l'exécution du coût des travaux de reconstruction dans le cas où l'indemnité d'assurance nette de tous impôts et taxes présent ou à venir serait insuffisante, et ceci, en contrepartie de l'entière responsabilité qu'il assume dans les déclarations des valeur assurés, comme il est dit précédemment » (contrat de crédit-bail, p. 26) ; qu'en retenant néanmoins que la reconstruction à l'identique demandée par la Sci l'Envol était contractuellement conditionnée par un accord préalable tripartite entre le preneur, le bailleur et l'assureur, la cour d'appel, qui a ajouté au contrat une condition qu'il ne comportait pas, a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la société Allianz Iard doit sa garantie au titre de la police 46 263 880 souscrite par la société Norbail immobilier et aux droits de laquelle est subrogée la SCI L'envol, d'AVOIR condamné la société Allianz à payer à la SCI L'envol la seule somme de 1 299 608 euros HT et d'AVOIR débouté la SCI L'envol de ses autres prétentions ;

AUX MOTIFS QUE sur le contrat applicable : l'assureur (Allianz) produit en pièce 2, un courrier du 20 novembre 2012 de son avocat à celui de la Sci l'Envol, par lequel il est transmis en annexe la police n° 46 263 880, l'avis d'aliment signé le 4 décembre 2007 ainsi que l'avis de renouvellement du 23 mars 2011a effet au 1 janvier 2011 ; cet avis de renouvellement est signé par la Sci l'Envol ; le montant de la prime annuelle est 2 195,17 euros ; la police tous risques sauf, mentionne un montant de prime annuel à la charge de Norbail Immobilier de 525 285,85 euros (contrat flotte de biens immobiliers) ; dans un courrier du 6 décembre 20212, l'avocat de la société Allianz confirme avoir communiqué le 20 novembre " la police en vigueur à la date du sinistre" ; cependant, dans ses conclusions elle soutient que la police applicable est celle produite en pièce 18 signée le 14 juin 2011 (postérieurement au sinistre) à effet au 1 janvier 2011, sans explication sur le sort du renouvellement du 31 mars 2011 étant er observé que ces "dispositions particulières mentionnent comme souscripteur : " société générale agissant pour le compte de sa filiale en crédit-bail Norbail Immobilier immobilier " et un montant de prime de 525 285 ,85 euros ; de surcroît, si ces conditions particulières comportent le même n° 46 263 880 de contrat, elles ne mentionnent pas le bien assuré, ni même la société Sci l'Envol, laquelle avait pourtant reçu mandat aux termes du contrat de crédit-bail ( page 25) de signer la police d'assurance et laquelle se voyait transférer : " toutes les obligations incombant généralement à l'assuré" ; la société Norbail Immobilier produit et invoque les documents correspondant à ceux annexé au courrier du 20 novembre 2012 ; la Sci l'Envol quant à elle produit un document intitulé "Conventions Spéciales" CS/TRS 200'" faisant référence à des échéances dues à compter de faisant état en page 7 de certains nouvelles conditions applicables " à compter de l'échéance 2004" !, ce qui signifie clairement que ces dispositions étaient en vigueur antérieurement et ne correspondent pas au contrat d'assurance du bien en question souscrit à compter du 14 novembre 2007 ; de surcroît ce document ne comporte aucune référence concernant le souscripteur ou l'assuré ou le bénéficiaire, ni aucune signature, ni n° de police ; ce document sera rejeté ; au vu de ces éléments, il sera retenu la version transmise le 20 novembre 2012, en ce qu'elle est signée par la Sci l'Envol, qu'elle mentionne expressément le bien assuré et a été communiquée et reconnue applicable au sinistre par la société Allianz elle-même ;

ALORS QUE les juges ne doivent pas méconnaître les termes du litige, qui sont déterminés par les conclusions des parties ; que la SCI L'envol faisait valoir que, s'agissant du sinistre survenu le 2 juin 2014, le document police tout risques sauf n° 46.263.880 s'appliquait conjointement avec les conventions spéciales CS-TRS2004 qu'elle versait aux débats (conclusions n°3 de la Sci L'envol, p.81) ; que de son côté, la société Norbail immobilier se bornait à invoquer et à verser aux débats la police tout risques sauf n° 46.263.880 sans se prononcer sur l'application des conventions particulières invoquées par la SCI L'envol ; quant à la société Allianz, elle faisait valoir que seuls des documents datés du 14 juin 2011 et à effet au 1er janvier 2011 dont la police tout risques sauf n° 46.263.880 devaient trouver application et non les conventions spéciales invoquées par la SCI L'envol, applicables uniquement jusqu'au 31 décembre 2010 (conclusions de la société Allianz p.15, §1 et s.) ; qu'en retenant que le document joint au courrier du 20 novembre 2012 - la police tout risque sauf n° 46.263.880 - était seul applicable, la cour d'appel qui a tout à la fois écarté les documents produits par la société Allianz en pièce n°18, dont celle-ci soutenait qu'ils étaient seuls applicables et les conventions spéciales CS/TRS 2004 versées aux débats par la SCI L'envol, a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Allianz à payer à la SCI L'envol la seule somme de 1 299 608 euros HT et d'AVOIR débouté la SCI L'envol de ses autres prétentions ;

AUX MOTIFS QUE sur l'indemnité principale : la société Allianz intervient en l'espèce, dans le cadre d'une assurance de dommage et non de responsabilité ; l'indemnisation doit être fixée au regard des clauses contractuelles et dans les limites de la garantie ; cet assureur soutient que l'indemnité totale à laquelle elle est tenue au terme de la police d'assurance souscrite par la société Norbail Immobilier s'élève à 1 955 830 HT, franchise déduite et hors pertes indirectes ; ce montant qui est inférieur au montant de l'expert (2 035 000 HT), ne fait pas l'objet de critiques particulières de la part de la société Norbail Immobilier ou de la Sci l'Envol au regard des clauses contractuelles ; en effet, ce montant apparaît conforme aux modalités de calcul prévues à l'article 6.2.1 du contrat d'assurance : " indemnisation valeur à neuf", qui prévoit que : ‘"l'assureur réglera dans un premier temps , la valeur vétusté déduite au jour du sinistre des biens sinistrés ou détruits et le complément pour valeur à neuf , limité à 33% de la valeur de reconstruction, sera versée après justification de son investissement " ; ainsi il sera retenu l'offre de la société Allianz sous réserve des postes ci-après ; (?) 3°) le montant de l'indemnité due par Allianz à la sci l'Envol doit êter fixé de la manière suivante : indemnité totale selon offre Allianz (comprenant les frais d'expertise de 22 014 euros) : 2 075 636 eurors, perte d'usage 426 156 euros, frais de sécurisation (avancés par Norbail) : 336 072 euros, Total : 2 837 864 euros, à déduire, - indemnité différée – 538 256 euros, provision – 1 000 000 euros, solde : 1 299 608 euros HT ;

1) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en déduisant de l'indemnité due par la société Allianz au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré une indemnité différée et en limitant la condamnation de l'assureur au versement de la seule somme de 1 299 608 euros HT sans donner aucune justification au rejet de la demande de la SCI l'Envol tendant au paiement de la totalité de l'indemnité de reconstruction due par l'assureur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2) ALORS, en toute hypothèse, QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'aux termes de l'article 6.1.2 de la police « tout risques sauf » n° 46 263 880, « l'assureur réglera dans un premier temps, la valeur vétusté déduite au jour du sinistre des biens sinistrés ou détruits et le complément pour valeur à neuf, limité à 33% de la valeur de reconstruction, sera versée après justification de son investissement » ; que la SCI L'envol sollicitait la condamnation de la société Allianz à lui verser l'indemnité de reconstruction de l'immeuble sinistré en totalité ; qu'en déduisant de l'indemnité due par la société Allianz au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré une indemnité différée, pour débouter ensuite purement et simplement la SCI l'Envol de sa demande en paiement de la totalité de l'indemnité dont le contrat prévoyait pourtant le paiement en cas de justification de l'investissement de l'indemnité principale, la cour d'appel qui a méconnu la force obligatoire du contrat d'assurance, a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 21-21442
Date de la décision : 26/10/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 22 juin 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 26 oct. 2022, pourvoi n°21-21442


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP Marlange et de La Burgade, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 01/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.21442
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