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12/10/2022 | FRANCE | N°21-14662

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 octobre 2022, 21-14662


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 octobre 2022

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 730 F-D

Pourvoi n° W 21-14.662

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2022

Mme [U] [G], divorcée [L], domiciliée [Adresse 2], a formé

le pourvoi n° W 21-14.662 contre l'arrêt rendu le 4 février 2021 par la cour d'appel d'Amiens (chambre de la famille), dans le litige l'opposant ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 octobre 2022

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 730 F-D

Pourvoi n° W 21-14.662

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2022

Mme [U] [G], divorcée [L], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 21-14.662 contre l'arrêt rendu le 4 février 2021 par la cour d'appel d'Amiens (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. [I] [L], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Hascher, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de Mme [G], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [L], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Hascher, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 4 février 2021), M [L], de nationalité algérienne et Mme [G], de nationalité franco-algérienne, se sont mariés le 7 septembre 1992, en Algérie. Ils se sont installés en France.

2. Le 18 avril 2019, M. [L] a saisi le juge aux affaires familiales d'une requête en divorce.

3. Un jugement rendu le 4 décembre 2019 par le tribunal de Tigzirt (Algérie), saisi le 18 juin 2019 par Mme [G], a prononcé leur divorce par Khol'â.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. Mme [G] fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'autorité de la chose jugée du jugement algérien de divorce en France, alors « que, selon l'article 1er, a), de la Convention franco algérienne, les décisions gracieuses ou contentieuses rendues par les juridictions siégeant en France ou en Algérie ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre Etat si la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée ; que pour infirmer l'ordonnance reconnaissant le jugement rendu le 4 décembre 2019 par le tribunal de Tigzirt en Algérie, prononçant le divorce des deux époux par Khol'â, la Cour d'appel a affirmé que le juge algérien aurait dû se déclarer incompétent au visa des dispositions du code de procédure civile et administrative algérien ; qu'en statuant ainsi, en recherchant la compétence du juge algérien conformément aux règles algériennes de conflit de compétence, quand le juge français doit apprécier la compétence indirecte du juge étranger selon les règles de conflits de compétences indirectes de l'ordre juridique français, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 1er de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1er, a), de la Convention franco-algérienne relative à l'exequatur et à l'extradition du 27 août 1964 et les principes qui régissent la compétence internationale :

5. Selon ce texte, les décisions rendues par les juridictions siégeant en France ou en Algérie ont de plein droit l'autorité de la chose jugée à condition que la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée.

6. Pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement de divorce algérien, l'arrêt retient que, nonobstant la nationalité algérienne des époux, l'article 40 du code de procédure civile et administrative algérien indiquant que les actions en matière de divorce sont portées à titre exclusif devant la juridiction du lieu du domicile conjugal devait conduire la juridiction algérienne à se déclarer incompétente, de sorte que la condition de l'article 1er, a) fait défaut.

7. En statuant ainsi, alors que la compétence indirecte du juge algérien conditionnant la régularité internationale du jugement algérien de divorce devait s'apprécier d'après les (seules) règles de conflits de compétence de droit français, la cour d'appel a violé le texte et les principes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne M. [L] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [L] et le condamne à payer à Mme [G] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour Mme [G].

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le jugement rendu le 4 décembre 2019 par la section des affaires familiales du tribunal de Tigzirt en Algérie n'a pas autorité de la chose jugée sur le territoire français et d'avoir, en conséquence, renvoyé les parties devant le juge aux affaires familiales en charge du cabinet 2 du tribunal judiciaire d'Amiens pour qu'il soit statué au fond sur la requête en divorce introduite par M. [L] et leurs demandes respectives relatives aux mesures provisoires durant l'instance en divorce ;

1) ALORS QUE, selon l'article 1er, a), de la Convention franco algérienne, les décisions gracieuses ou contentieuses rendues par les juridictions siégeant en France ou en Algérie ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre Etat si la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée ; que pour infirmer l'ordonnance reconnaissant le jugement rendu le 4 décembre 2019 par le tribunal de Tigzirt en Algérie, prononçant le divorce des deux époux par Khol'â, la Cour d'appel a affirmé que le juge algérien aurait du se déclarer incompétent au visa des dispositions du code de procédure civile et administrative algérien ; qu'en statuant ainsi, en recherchant la compétence du juge algérien conformément aux règles algériennes de conflit de compétence, quand le juge français doit apprécier la compétence indirecte du juge étranger selon les règles de conflits de compétences indirectes de l'ordre juridique français, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;

2) ALORS QUE , selon l'article 1er, a), de la Convention franco algérienne, les décisions gracieuses ou contentieuses rendues par les juridictions siégeant en France ou en Algérie ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre Etat si la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée ; que pour infirmer l'ordonnance reconnaissant le jugement rendu le 4 décembre 2019 par le tribunal de Tigzirt en Algérie, prononçant le divorce des deux époux par Khol'â, la Cour d'appel a affirmé que le juge algérien aurait dû se déclarer incompétent au visa des dispositions du code de procédure civile et administrative algérien ; qu'en statuant ainsi, en recherchant la compétence du juge algérien conformément aux règles algériennes de conflit de compétence, quand le juge français doit apprécier la compétence indirecte du juge étranger selon les règles de conflits de compétences indirectes de l'ordre juridique français, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 1er de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964.

3) ALORS QUE, selon l'article 1er, a), de la Convention franco algérienne, les décisions gracieuses ou contentieuses rendues par les juridictions siégeant en France ou en Algérie ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre Etat si la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée ; que tel est le cas lorsque le litige se rattache de manière caractérisée au pays dont le juge a été saisi, notamment, en matière de divorce, à raison de la nationalité commune des époux ; que pour refuser de faire produire ses effets au jugement rendu le 4 décembre 2019 par le tribunal de Tigzirt en Algérie, la Cour d'appel a procédé à l'examen de la compétence du juge étranger conformément aux règles algériennes de conflit de compétence ce en quoi elle a violé, par fausse application, l'article 1er de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964.

4) ALORS ENFIN QU'EN TOUTE HYPOTHESE, le juge doit, en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut soulever d'office un moyen sans provoquer préalablement la discussion des parties ; qu'en retenant, pour décider que le jugement du tribunal de Tigzirt ne pouvait produire ses effets en France, que l'article 40 du code de procédure civile et administrative algérien devait conduire la juridiction algérienne à se déclarer incompétente, sans provoquer le débat des parties sur l'application de cette disposition du droit étranger qui n'était pas dans la cause, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 21-14662
Date de la décision : 12/10/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 04 février 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 oct. 2022, pourvoi n°21-14662


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Doumic-Seiller, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.14662
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