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12/10/2022 | FRANCE | N°21-11408

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 octobre 2022, 21-11408


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 octobre 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 728 FS-B

Pourvoi n° 21-11.408

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2022

M. [Z] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° 21-11.40

8 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [X] [C], domicilié [A...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 octobre 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 728 FS-B

Pourvoi n° 21-11.408

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2022

M. [Z] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° 21-11.408 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [X] [C], domicilié [Adresse 4],

2°/ à M. [O] [N], domicilié [Adresse 2], pris en qualité d'ayant droit de sa mère, [K] [C] épouse [N], décédée, et en qualité de représentant légal de M. [L] [N], placé sous mesure d'habilitation familiale,

3°/ à M. [L] [N], domicilié [Adresse 3], pris en qualité d'ayant droit de son épouse, [K] [C] épouse [N], décédée, représenté par M. [O] [N],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dard, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [F], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [C] et de MM. [O] et [L] [N], et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dard, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mmes Antoine, Poinseaux, M. Fulchiron, Mmes Beauvois, Agostini, conseillers, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, conseillers référendaires, Mme Caron-Déglise, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à M. [O] [N] et à M. [L] [N], représenté par M. [O] [N], de leur reprise d'instance en qualité d'ayants droit de [K] [C], décédée le 9 janvier 2021.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 28 janvier 2021), [G] [C], placée sous tutelle le 8 août 2015, est décédée le 6 octobre 2015, en laissant pour lui succéder ses frère et soeur, M. [X] [C] et [K] [C] (les consorts [C]).

3. Le 31 juillet 2014, en présence de deux témoins, la de cujus avait remis à M. [T], notaire, qui en avait dressé l'acte de suscription, un testament mystique dactylographié et signé par elle, instituant M. [F] en qualité de légataire universel.

4. Les consorts [C] ont assigné M. [F] en nullité du testament.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. M. [F] fait grief à l'arrêt de déclarer nul le testament de [G] [C], alors :

« 1°/ que, pour décider que le testament mystique était nul, les juges du fond ont considéré que l'acuité visuelle de [G] [C] veuve [F] ne lui permettait pas de lire les caractères dactylographiés, de taille normale, du document qu'elle avait présenté au notaire comme son testament, et qu'aucun élément de l'acte lui-même ou de l'acte de suscription n'éclairait sur le procédé technique qui aurait pu permettre à la testatrice de lire son testament ; qu'en statuant par ces motifs ne caractérisant pas l'impossibilité absolue de [G] [C] veuve [F] de lire son testament, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 978 du code civil ;

2°/ qu'en retenant la nullité du testament mystique au motif qu'aucun élément de l'acte lui-même ou de l'acte de suscription ne l'éclairait sur le procédé technique qui aurait pu permettre à [G] [C] veuve [F] de lire son testament, la cour d'appel, qui a fait peser à M. [F], défendeur à l'action en nullité, la charge de prouver la possibilité pour la testatrice de lire son testament, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 9 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Aux termes de l'article 978 du code civil, ceux qui ne savent ou ne peuvent lire, ne pourront faire de dispositions dans la forme mystique.

7. La cour d'appel a relevé que, dans l'acte de suscription du 31 juillet 2014, le notaire avait mentionné que le testament mystique litigieux lui avait été remis par « le testateur », qui avait déclaré lui présenter son testament et affirmé en avoir personnellement vérifié le libellé par la lecture qu'« il » en avait effectuée.

8. Elle a retenu qu'il ressortait du dossier de tutelle de [G] [C] et des pièces médicales produites que celle-ci, qui souffrait de la maladie neurodégénérative de Steel Richardson, était dans l'incapacité de lire elle-même le texte dactylographié sur le document présenté et qu'aucun élément intrinsèque ou extrinsèque, dont l'acte de suscription, ne venait l'éclairer sur la manière dont l'intéressée aurait pu lire le document qu'elle présentait comme son testament.

9. C'est donc sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de caractériser l'impossibilité absolue de [G] [C] de lire le document, en a déduit, en l'absence de certitude sur l'expression de ses dernières volontés, que l'acte devait être annulé.

10. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

11. M. [F] fait grief à l'arrêt de déclarer nul le testament de [G] [C] et de rejeter sa demande tendant à ce qu'il soit requalifié en testament international et à ce que sa régularité soit constatée, alors « que l'arrêt attaqué a constaté que le testament litigieux avait été dactylographié, qu'il comportait la signature de [G] [C] veuve [F], qu'il avait été remis au notaire qui l'avait cacheté en présence des deux témoins, et que le notaire avait consigné dans l'acte de suscription la déclaration de la testatrice selon laquelle il s'agissait de son testament et qu'elle en avait vérifié le contenu par la lecture qu'elle en avait faite ; qu'il en résultait qu'avaient été respectées toutes les formalités prévues par les articles 3 à 5 de la loi uniforme annexée à la Convention de Washington du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d'un testament international, de sorte que le testament litigieux devait être requalifié en testament international valable ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des textes susmentionnés de l'article 1 de la loi uniforme annexée à la Convention de Washington du 26 octobre 1973, qu'elle a ainsi violés. »

Réponse de la Cour

12. La cour d'appel a relevé que, dans l'acte de suscription du 31 juillet 2014, le notaire avait mentionné que le testament mystique litigieux lui avait été remis par « le testateur », qui avait déclaré lui présenter son testament et affirmé en avoir personnellement vérifié le libellé par la lecture qu'« il » en avait effectuée.

13. Ayant retenu que [G] [C] était dans l'incapacité de lire le document remis au notaire, de sorte qu'elle n'avait pas été en mesure de déclarer que ce document était son testament et qu'elle en connaissait le contenu, la cour d'appel en a exactement déduit que le document présenté, déclaré nul en tant que testament mystique, ne pouvait valoir comme testament international.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

REJETTE la requête ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [F] et le condamne à payer à M. [C] et MM. [L] et [O] [N] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. [F]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré nul le testament du 26 juillet 2014 de [G] [C] veuve [F] ;

alors 1°/ que pour décider que le testament mystique était nul, les juges du fond ont considéré que l'acuité visuelle de [G] [C] veuve [F] ne lui permettait pas de lire les caractères dactylographiés, de taille normale, du document qu'elle avait présenté au notaire comme son testament, et qu'aucun élément de l'acte lui-même ou de l'acte de suscription n'éclairait sur le procédé technique qui aurait pu permettre à la testatrice de lire son testament ; qu'en statuant par ces motifs ne caractérisant pas l'impossibilité absolue de [G] [C] veuve [F] de lire son testament, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 978 du code civil ;

alors 2°/ qu'en retenant la nullité du testament mystique au motif qu'aucun élément de l'acte lui-même ou de l'acte de suscription ne l'éclairait sur le procédé technique qui aurait pu permettre à [G] [C] veuve [F] de lire son testament, la cour d'appel, qui a fait peser à M. [F], défendeur à l'action en nullité, la charge de prouver la possibilité pour la testatrice de lire son testament, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 9 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré nul le testament du 26 juillet 2014 de [G] [C] veuve [F] et rejeté la demande de M. [F] tendant à ce que le testament soit requalifié en testament international et à ce que sa régularité soit constatée ;

alors que l'arrêt attaqué a constaté que le testament litigieux avait été dactylographié, qu'il comportait la signature de [G] [C] veuve [F], qu'il avait été remis au notaire qui l'avait cacheté en présence des deux témoins, et que le notaire avait consigné dans l'acte de suscription la déclaration de la testatrice selon laquelle il s'agissait de son testament et qu'elle en avait vérifié le contenu par la lecture qu'elle en avait faite ; qu'il en résultait qu'avaient été respectées toutes les formalités prévues par les articles 3 à 5 de la loi uniforme annexée à la Convention de Washington du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d'un testament international, de sorte que le testament litigieux devait être requalifié en testament international valable ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des textes susmentionnés de l'article 1 de la loi uniforme annexée à la Convention de Washington du 26 octobre 1973, qu'elle a ainsi violés.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 21-11408
Date de la décision : 12/10/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

TESTAMENT - Testament mystique - Nullité - Cas - Incapacité de lire le document

TESTAMENT - Testament mystique - Nullité - Effets - Validité de l'acte annulé en tant que testament international - Condition CONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention de Washington du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d'un testament international - Validité - Exclusion - Cas - Testateur dans l'incapacité de déclarer que le document est son testament et qu'il en connaît le contenu

Ayant relevé que, dans un acte de suscription, un notaire avait mentionné qu'un testament mystique lui avait été remis par une personne qui avait déclaré lui présenter son testament et affirmé en avoir personnellement vérifié le libellé par la lecture qu'elle en avait effectuée et ayant retenu que celle-ci était dans l'incapacité de lire le document remis au notaire, de sorte qu'elle n'avait pas été en mesure de déclarer que ce document était son testament et qu'elle en connaissait le contenu, une cour d'appel en déduit exactement que le document présenté, déclaré nul en tant que testament mystique, ne pouvait valoir comme testament international


Références :

Article 978 du code civil

Convention de Washington du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d'un testament international.

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 28 janvier 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 oct. 2022, pourvoi n°21-11408, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.11408
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