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05/10/2022 | FRANCE | N°21-14227

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 octobre 2022, 21-14227


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 octobre 2022

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 565 F-D

Pourvoi n° Y 21-14.227

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 OCTOBRE 2022

1°/ La S

ociété hôtelière du Salako, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Montravers-[L], société d'exercice lib...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 octobre 2022

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 565 F-D

Pourvoi n° Y 21-14.227

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 OCTOBRE 2022

1°/ La Société hôtelière du Salako, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Montravers-[L], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [R] [L], agissant en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la Société hotelière du Salako,

ont formé le pourvoi n° Y 21-14.227 contre l'arrêt n° RG 19/00335 rendu le 19 janvier 2021 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige les opposant à la société Foncière des Caraïbes Guadeloupe, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la Société hôtelière du Salako et de la société Montravers-[L], ès qualités, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Foncière des Caraïbes Guadeloupe, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 28 juin 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 19 janvier 2021, RG n° 19/00335), le 10 novembre 2017, la Société hôtelière du Salako a été mise en redressement judiciaire, la société Montravers-[L] étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.

2. La société Foncière des Caraïbes Guadeloupe (la société Foncière des Caraïbes) a déclaré au passif de cette procédure collective une créance correspondant aux loyers échus dus par la société débitrice en exécution d'un bail commercial.

3. Cette créance a été contestée, au motif que la société Foncière des Caraïbes n'avait pas qualité pour procéder à la déclaration de cette créance, celle-ci ayant fait l'objet, le 4 août 2015, d'une cession de créances professionnelles au profit des sociétés BPCE international et Outre-mer, BPI France financement et Agence française de développement (les banques cessionnaires), cette cession étant notifiée à la Société hôtelière du Salako, débiteur cédé, le 3 mai 2018.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La Société hôtelière du Salako et son mandataire judiciaire font grief à l'arrêt d'écarter le moyen tiré du défaut de « capacité » à agir de la société Foncière des Caraïbes et, par suite, de retenir que la déclaration de créance est recevable, alors :

« 1°/ que même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie, la cession de créance transfère immédiatement au cessionnaire la propriété de la créance cédée, sans qu'il soit besoin d'autre formalité ; que la personne qui déclare la créance d'un tiers doit, si elle n'est pas avocat, être munie d'un pouvoir spécial, donné par écrit, avant l'expiration du délai de déclaration des créances ; qu'en mettant en avant, pour considérer qu'en qualité de cédant, la Foncière des Caraïbes pouvait régulièrement déclarer les créances cédées au nom des cessionnaires, la stipulation du contrat de cession aux termes de laquelle le cédant était constitué mandataire des cessionnaires jusqu'à la notification de la cession, pour encaisser les loyers et engager toutes mesures utiles à la conservation et au recouvrement des créances, quand cette stipulation ne donnait pas spécialement mandat à la Foncière des Caraïbes pour procéder à la déclaration de créance, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ;

2°/ que le juge est tenu de respecter le principe de la contradiction ; qu'à ce titre, il ne peut relever d'office un moyen sans interpeler préalablement les parties ; qu'en mettant en avant le fait qu'en application de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, le cédant reste tenu, en qualité de garant solidaire, du paiement de la créance, pour décider qu'il appartenait à la société Foncière des Caraïbes de préserver les droits des cessionnaires en procédant à la déclaration de la créance à la procédure collective, quand la Foncière des Caraïbes ne se prévalait pas de sa qualité de garant pour justifier de sa qualité à procéder à la déclaration de créance, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ que la personne qui déclare la créance d'un tiers doit, si elle n'est pas avocat, être munie d'un pouvoir spécial, donné par écrit, avant l'expiration du délai de déclaration des créances ; qu'en mettant en avant, pour considérer que la Foncière des Caraïbes pouvait régulièrement déclarer la créance au nom des cessionnaires, le fait qu'elle était, en vertu de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, garante du paiement des créances cédées, quand cette circonstance n'était pas de nature à suppléer à l'absence de mandat spécial, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ;

4°/ qu'en matière de déclaration de créance, l'article L. 622-24 du code de commerce régit spécifiquement la faculté pour le mandant de ratifier la déclaration faite irrégulièrement par son mandataire et conditionne cette faculté au fait que la déclaration initiale ait été faite en son nom ; que cette règle spéciale déroge aux règles générales régissant le contrat de mandat ; qu'en retenant que les cessionnaires avaient pu régulièrement ratifier la déclaration faite, en son nom personnel, par la Foncière des Caraïbes, au motif inopérant que selon les règles générales relatives au mandat, le fait que le mandataire ait déclaré agir en son nom personnel ne s'oppose pas à ce que le mandant ratifie ses actes, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 par refus d'application et l'article 1998 du code civil par refus d'application ;

5°/ que la Société hôtelière du Salako a soutenu que la ratification donnée par la CEPAC était irrégulière dans la mesure où la CEPAC ne justifiait pas d'un mandat spécial des établissements bancaires cessionnaires des créances litigieuses ; qu'en retenant que la CEPAC avait régulièrement ratifié la déclaration de créance sans s'expliquer sur ce moyen de nature à établir que la CEPAC n'avait pas le pouvoir de ratifier la déclaration de créance pour le compte des cessionnaires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. L'arrêt constate, d'abord, que la société Foncière des Caraïbes produit une attestation du 13 mai 2019, dont l'authenticité n'est pas contestée, qui a été établie par la Caisse d'épargne CEPAC, agissant au nom et pour le compte des banques cessionnaires, et qui certifie que « mandat a été donné à la SAS Foncière Caraïbes Guadeloupe de procéder à la déclaration de créances au titre des loyers échus au passif de la Société hôtelière du Salako (le débiteur) en redressement judiciaire. Compte tenu de la notification au débiteur, dans le cadre d'une cession Dailly, ratifions en tant que de besoin, ladite déclaration pour le compte des prêteurs. » L'arrêt relève, ensuite, que si la société Foncière des Caraïbes a déclaré la créance sans préciser qu'elle le faisait au nom d'un mandataire, il résulte cependant de l'application de l'article 1998 du code civil que le fait qu'un mandataire qui dépasse son mandat déclare agir en son nom personnel ne s'oppose pas à ce que le mandant ratifie ses actes.

6. De ces énonciations, constatations et appréciations, et abstraction faite des critiques des première, deuxième et troisième branches, dirigées contre des motifs surabondants, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, qui a répondu en les écartant aux conclusions invoquées par la cinquième branche, a déduit que, par son attestation du 13 mai 2019, la Caisse d'épargne CEPAC avait valablement ratifié, pour le compte des banques cessionnaires, la déclaration de créance irrégulière effectuée par la société Foncière des Caraïbes, en son nom, au passif de la procédure collective de la Société hôtelière du Salako.

7. Le moyen, inopérant en ses première, deuxième et troisième branches, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société hôtelière du Salako et la société Montravers-[L], en qualité de mandataire judiciaire de la première, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du cinq octobre deux mille vingt-deux et signé par Mme Vaissette, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la Société hôtelière du Salako et la société Montravers-[L], en la personne de M. [R] [L], agissant en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la Société hôtelière du Salako.

La société HOTELIERE DU SALAKO et la SELARL MONTRAVERS [L], ès qualités font grief l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir écarté le moyen tiré du défaut de capacité à agir de la FONCIERE DES CARAIBES et par suite d'avoir retenu que la déclaration de créance était recevable ;

1°/ ALORS QUE, même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie, la cession de créance transfère immédiatement au cessionnaire la propriété de la créance cédée, sans qu'il soit besoin d'autre formalité ; que la personne qui déclare la créance d'un tiers doit, si elle n'est pas avocat, être munie d'un pouvoir spécial, donné par écrit, avant l'expiration du délai de déclaration des créances ; qu'en mettant en avant, pour considérer qu'en qualité de cédant, la FONCIERE DES CARAIBES pouvait régulièrement déclaré les créances cédées au nom des cessionnaires, la stipulation du contrat de cession aux termes de laquelle le cédant était constitué mandataire des cessionnaires jusqu'à la notification de la cession, pour encaisser les loyers et engager toutes mesures utiles à la conservation et au recouvrement des créances, quand cette stipulation ne donnait pas spécialement mandat à la FONCIERE DES CARAIBES pour procéder à la déclaration de créance, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ;

2°/ ALORS QUE le juge est tenu de respecter le principe de la contradiction ; qu'à ce titre, il ne peut relever d'office un moyen sans interpeler préalablement les parties ; qu'en mettant en avant le fait qu'en application de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, le cédant reste tenu, en qualité de garant solidaire, du paiement de la créance, pour décider qu'il appartenait à la société FONCIERE DES CARAIBES de préserver les droits des cessionnaires en procédant à la déclaration de la créance à la procédure collective, quand la FONCIERE DES CARAIBES ne se prévalait pas de sa qualité de garant pour justifier de sa qualité à procéder à la déclaration de créance, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ ALORS QUE la personne qui déclare la créance d'un tiers doit, si elle n'est pas avocat, être munie d'un pouvoir spécial, donné par écrit, avant l'expiration du délai de déclaration des créances ; qu'en mettant en avant, pour considérer que la FONCIERE DES CARAIBES pouvait régulièrement déclarer la créance au nom des cessionnaires, le fait qu'elle était, en vertu de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier, garante du paiement des créances cédées, quand cette circonstance n'était pas de nature à suppléer à l'absence de mandat spécial, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ;

4°/ ALORS QUE qu'en matière de déclaration de créance, l'article 622-24 du code de commerce régit spécifiquement la faculté pour le mandant de ratifier la déclaration faite irrégulièrement par son mandataire et conditionne cette faculté au fait que la déclaration initiale ait été faite en son nom ; que cette règle spéciale déroge aux règles générales régissant le contrat de mandat ; qu'en retenant que les cessionnaires avaient pu régulièrement ratifier la déclaration faite, en son nom personnel, par la FONCIERE DES CARAIBES, au motif inopérant que selon les règles générales relatives au mandat, le fait que le mandataire ait déclaré agir en son nom personnel ne s'oppose pas à ce que le mandant ratifie ses actes, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 par refus d'application et l'article 1998 du code civil par refus d'application ;

5°/ ALORS QUE la société HOTELIERE du SALAKO a soutenu que la ratification donnée par la CEPAC était irrégulière dans la mesure où la CEPAC ne justifiait pas d'un mandat spécial des établissements bancaires cessionnaires des créances litigieuses (conclusions d'appel, p. 12 in fine et p. 13) ; qu'en retenant que la CEPAC avait régulièrement ratifié la déclaration de créance sans s'expliquer sur ce moyen de nature à établir que la CEPAC n'avait pas le pouvoir de ratifier la déclaration de créance pour le compte des cessionnaires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-14227
Date de la décision : 05/10/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 19 janvier 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 oct. 2022, pourvoi n°21-14227


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 11/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.14227
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