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29/09/2022 | FRANCE | N°20-23346

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 29 septembre 2022, 20-23346


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 septembre 2022

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 991 F-D

Pourvoi n° Q 20-23.346

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 SEPTEMBRE 2022

Mme [O] [P], divorcée [G], domiciliée [Adresse 1], a form

é le pourvoi n° Q 20-23.346 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige l'opposan...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 septembre 2022

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 991 F-D

Pourvoi n° Q 20-23.346

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 SEPTEMBRE 2022

Mme [O] [P], divorcée [G], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 20-23.346 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société EARL du Montrond, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à M. [X] [G], domicilié [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [P], divorcée [G], de la SCP Alain Bénabent , avocat de la société EARL du Montrond et de M. [G], après débats en l'audience publique du 5 juillet 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 17 décembre 2019), l'EARL du Montrond (la société), dont le gérant est M. [G], a fait pratiquer, le 15 mars 2018, une saisie-vente à l'encontre de Mme [P] qui a saisi un juge de l'exécution d'une contestation en invoquant la compensation légale avec une créance résultant de son compte courant d'associée.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

2. Mme [P] fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes, alors « que la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes ; qu'elle s'opère sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies, à savoir à la date à laquelle les créances réciproques sont certaines, liquides et exigibles ; que le solde créditeur d'un compte courant d'associé qui en l'absence de convention particulière est remboursable à tout moment, constitue une dette échue exigible et susceptible de compensation sur simple demande de remboursement ; qu'ainsi, la créance de l'EARL du Montrond exigible à la date du jugement du 9 juin 2011, objet de la saisie litigieuse en date du 15 mars 2018, s'est trouvée en tout état de cause éteinte par compensation avec le solde créditeur du compte courant d'associée de Mme [P] à la date de la demande en remboursement de ce solde créditeur, soit le 25 octobre 2017 ; qu'en se fondant pour écarter la compensation sur le caractère prétendument incertain du solde du compte courant non pas à cette date mais à celle de la saisie le 15 mars 2018, la Cour d'appel a violé les articles 1347 et 1347-1, anciennement 1289, 1290 et 1291 du code civil et L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour

Vu l'article 1347 du code civil :

3. Selon ce texte, la compensation s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.

4. Pour débouter Mme [P] de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient que le solde d'un compte courant d'associé évolue constamment en fonction des opérations passées en débit et en crédit, de sorte que seule la balance finale permet d'en déterminer un éventuel solde créditeur en faveur de l'associé et qu'un associé peut à tout moment solliciter le remboursement de son compte courant. Il ajoute que si Mme [P] indique avoir réclamé ce remboursement par lettre recommandée du 25 octobre 2017, pour un montant de 6 665,09 euros, sous réserve des opérations effectuées depuis le 1er janvier 2017, il demeure constant qu'à ce jour aucun remboursement n'est intervenu, en raison du différend ancien qui oppose les parties, notamment s'agissant des comptes de la société que Mme [P] refuse d'approuver, que les pièces versées aux débats par l'appelante ne permettent par ailleurs pas de déterminer le solde du compte courant à la date de la saisie, les pièces comptables produites s'arrêtant à l'exercice 2017, et diverses opérations ayant pu être comptabilisées postérieurement à la clôture de cet exercice, tant au débit qu'au crédit du compte et que les sommes imputées sur ce compte courant sont manifestement elles-mêmes sujet à litige, Mme [P] indiquant que c'était sans son accord que les sommes lui étant dues par la société au titre de fermages avaient été portées par celui-ci à son compte courant d'associée. Il en déduit que la créance invoquée par Mme [P] est incertaine dans son montant.

5. En statuant ainsi, alors que le compte courant d'associé constitue un prêt consenti par l'associé dont la spécificité est d'être, sauf disposition statutaire ou conventionnelle contraire, remboursable à tout moment et que la demande de remboursement rend la créance exigible, la cour d'appel, qui devait dès lors se placer, pour apprécier si les conditions de la compensation étaient réunies, à la date de cette demande et non au jour de la saisie, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne l'EARL du Montrond aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'EARL du Montrond et M. [G] et condamne l'EARL du Montrond à payer à Mme [P] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme [P], divorcée [G].

Mme [P] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

1°- Alors que la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes ; qu'elle s'opère sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies, à savoir à la date à laquelle les créances réciproques sont certaines, liquides et exigibles ; qu'en l'espèce, Mme [P] invoquait l'extinction de la créance de 2.839,40 euros de l'EARL du Montrond exigible à la date du jugement du 9 juin 2011, objet de la saisie litigieuse en date du 15 mars 2018, par compensation avec sa créance de fermages de 2013 d'un montant de 3.155,39 euros, devenue exigible dès avant le 31 décembre 2013, demeurée impayée ; qu'en se bornant à relever le caractère incertain du solde du compte courant d'associée de Mme [P] au sein de l'EARL du Montrond à la date de la saisie le 15 mars 2018, sans s'expliquer sur l'extinction de la créance de cette dernière par compensation avec la créance de loyers à la date d'exigibilité de cette créance au plus tard le 31 décembre 2013, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1347 et 1347-1, anciennement 1289, 1290 et 1291 du code civil et L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

2°- Alors que la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes ; qu'elle s'opère sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies, à savoir à la date à laquelle les créances réciproques sont certaines, liquides et exigibles ; que le solde créditeur d'un compte courant d'associé qui en l'absence de convention particulière est remboursable à tout moment, constitue une dette échue exigible et susceptible de compensation sur simple demande de remboursement ; qu'ainsi, la créance de l'EARL du Montrond exigible à la date du jugement du 9 juin 2011, objet de la saisie litigieuse en date du 15 mars 2018, s'est trouvée en tout état de cause éteinte par compensation avec le solde créditeur du compte courant d'associée de Mme [P] à la date de la demande en remboursement de ce solde créditeur, soit le 25 octobre 2017 ; qu'en se fondant pour écarter la compensation sur le caractère prétendument incertain du solde du compte courant non pas à cette date mais à celle de la saisie le 15 mars 2018, la Cour d'appel a violé les articles 1347 et 1347-1, anciennement 1289, 1290 et 1291 du code civil et L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

3°- Alors qu'en se fondant pour exclure la compensation, sur l'existence d'un différend qui oppose les parties s'agissant des comptes de l'EARL que Mme [P] refuse d'approuver et sur la circonstance que les sommes imputées sur le compte courant sont sujets à litige dès lors que Mme [P] indique que c'est sans son accord que les sommes lui étant dues par l'EARL du Montrond au titre de fermages avaient été portées par celui-ci à son compte courant, quand la créance dont Mme [P] avait demandé le remboursement le 25 octobre 2017 et dont la compensation avec la créance de l'EARL était sollicitée, consistait dans le solde du compte courant tel qu'il résultait des propres documents comptables de l'EARL et dont la certitude n'était dès lors pas contestée par cette dernière, la Cour d'appel a statué par un motif impropre à exclure la compensation en violation des articles 1347 et 1347-1, anciennement 1289, 1290 et 1291 du code civil et L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-23346
Date de la décision : 29/09/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 17 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 29 sep. 2022, pourvoi n°20-23346


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 11/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.23346
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