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28/09/2022 | FRANCE | N°21-16400

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2022, 21-16400


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1026 F-D

Pourvoi n° K 21-16.400

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Mme [T] [U], domiciliée [Adresse 1], a fo

rmé le pourvoi n° K 21-16.400 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2021 par la cour d'appel de Bastia (chambre sociale), dans le litige l'opposant à ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1026 F-D

Pourvoi n° K 21-16.400

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Mme [T] [U], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-16.400 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2021 par la cour d'appel de Bastia (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Sagec, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme [U], de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société Sagec, après débats en l'audience publique du 29 juin 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 7 avril 2021), Mme [U] a été engagée par la société Sagec (la société) en qualité d'architecte - niveau H - position cadre, suivant contrat à durée indéterminée à effet du 1er juillet 2015. La salariée a été licenciée, le 23 décembre 2016, pour faute grave.

2. Contestant ce licenciement, la salariée a saisi, le 9 juin 2017, la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination d'une salariée enceinte, alors :

« 1°/ qu'elle sollicitait dans le dispositif de ses écritures d'appel la condamnation de la société à des dommages-intérêts pour discrimination d'une femme enceinte", faisant valoir la concomitance entre l'annonce de son état de grossesse, ses demandes de régularisation de sa fiche de paie refusées, et la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, outre les propositions pressantes de rupture conventionnelle faites peu après l'annonce de sa grossesse et la coupure subséquente de ses accès informatiques ; que la demande d'indemnisation pour discrimination d'une femme enceinte concernait donc tant la rupture du contrat de travail que sa période d'exécution concomitante à l'annonce de la grossesse ; qu'en affirmant que sa demande était fondée sur un licenciement discriminatoire, la cour d‘appel a dénaturé ses conclusions d'appel en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°/ que constitue une discrimination le fait d'appliquer un traitement différencié à un salarié sur la base d'un critère prohibé par la loi, tel que l'état de grossesse ; que lorsque survient un litige en raison d'une discrimination, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation pour discrimination d'une femme enceinte motif pris que la salariée ne présentait pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination liée à son état de grossesse sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la concomitance existant entre l'annonce dudit état par la salariée, ses demandes de régularisation d'une fiche de paie refusées, et la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, ni sur les propositions pressantes de rupture conventionnelle formulées par l'employeur peu après l'annonce de sa grossesse et la coupure de ses accès informatiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. C'est par une interprétation nécessaire des conclusions ambiguës de la salariée devant la cour d'appel que celle-ci a constaté que la demande de la salariée de dommages-intérêts pour discrimination d'une femme enceinte était fondée sur un licenciement discriminatoire.

6. La cour d'appel a accueilli par ailleurs la demande de la salariée de dommages-intérêts au titre d'un licenciement nul en raison de son état de grossesse et indemnisé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, le préjudice subi du fait de la perte injustifiée de l'emploi.

7. Le même préjudice ne pouvant être réparé deux fois, il en résulte que le moyen, non fondé en sa première branche, est inopérant en sa seconde branche.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [U] ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme [U]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme [D] [P] reproche à l'arrêt attaqué de l'AVOIR déboutée de sa demande de paiement de dommages et intérêts pour licenciement abusif en raison de son caractère brutal et vexatoire ;

1°) ALORS QU'en matière prud'homale, la preuve est libre ; que rien ne s'oppose à ce que le juge prud'homal retienne une attestation établie par un ancien salarié de l'entreprise, licencié et qu'il appartient seulement à ce juge d'en apprécier la valeur et la portée; qu'en retenant, pour débouter Mme [D] [P] de sa demande d'indemnisation pour licenciement vexatoire et brutal, que l'attestation de M. [B] (production n° 5), ancien salarié de l'entreprise, ne pouvait être prise en compte par la cour faute de certitude sur l'impartialité de l'attestant lui-même licencié, la cour d'appel a écarté d'office l'attestation litigieuse au regard de la seule qualité de salarié licencié de son auteur ; qu'en statuant ainsi, elle a violé le principe de liberté de la preuve en matière prud'hommale, ensemble les articles 201 et 202 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que pour débouter Mme [D] [P] de sa demande d'indemnisation pour licenciement vexatoire et brutal, la cour d'appel a retenu que l'attestation de M. [I] ne correspondait pas à la réalité factuelle car le licenciement datait du 23 décembre 2016 tandis que l'entretien antérieur à la procédure disciplinaire datait du 17 novembre 2016 – laissant entendre que pour le témoin, le licenciement et l'entretien auraient eu lieu le même jour ; qu'en statuant ainsi, quand l'attestation litigieuse (production n° 4) indiquait seulement que le jour où Mme [D] avait essayé de joindre le service RH au sujet des jours de RTT, elle avait été convoquée par M. [W] pour un entretien et que celui-ci avait abouti à un licenciement, de sorte que M. [I] n'avait pas dit que l'entretien litigieux et le licenciement avait été prononcé le même jour, mais que le licenciement avaient été prononcés par la suite, ce qui n'est pas contestable en l'absence de rupture conventionnelle conclue entre les parties, la cour a dénaturé l'attestation en cause et violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les éléments de la cause ;

3°) ALORS QU'en tout état de cause les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'au soutien de ses demandes tenant notamment à l'existence d'un licenciement brutal et vexatoire, Mme [D] [P] produisait, outre les attestations de MM. [I] et [B], des échanges de courriels avec la direction entre les 15 et 21 novembre 2016 (production n° 6) faisant état de demandes pressantes de rupture conventionnelle formulées par sa hiérarchie sans délai de réflexion suffisant, de l'absence de reproche professionnel formulé sur le travail fourni dans le cadre des entretiens ayant précédé la procédure disciplinaire, et de la coupure brutale de son accès au réseau informatique de l'entreprise avant même la notification de sa mise à pied à titre conservatoire; qu'en ignorant les pièces susvisées qui justifiaient du caractère brutal et vexatoire du licenciement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Mme [D] [P] reproche à l'arrêt attaqué de l'AVOIR déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination d'une salariée enceinte ;

1°) ALORS QUE Mme [D] [P] sollicitait dans le dispositif de ses écritures d'appel (p.25) la condamnation de la société Sagec à « des dommages et intérêts pour discrimination d'une femme enceinte », faisant valoir la concomitance entre l'annonce de son état de grossesse, ses demandes de régularisation de sa fiche de paie refusées, et la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, outre les propositions pressantes de rupture conventionnelle faites peu après l'annonce de sa grossesse et la coupure subséquente de ses accès informatiques ; que la demande d'indemnisation pour discrimination d'une femme enceinte concernait donc tant la rupture du contrat de travail que sa période d'exécution concomitante à l'annonce de la grossesse ; qu'en affirmant que la demande de Mme [D] [P] était fondée sur un licenciement discriminatoire, la cour d‘appel a dénaturé les conclusions d'appel de l'exposante en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE constitue une discrimination le fait d'appliquer un traitement différencié à un salarié sur la base d'un critère prohibé par la loi, tel que l'état de grossesse ; que lorsque survient un litige en raison d'une discrimination, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation pour discrimination d'une femme enceinte motif pris que la salariée ne présentait pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination liée à son état de grossesse sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la concomitance existant entre l'annonce dudit état par la salariée, ses demandes de régularisation d'une fiche de paie refusées, et la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, ni sur les propositions pressantes de rupture conventionnelle formulées par l'employeur peu après l'annonce de la grossesse de Mme [D] [P] et la coupure de ses accès informatiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-16400
Date de la décision : 28/09/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 07 avril 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2022, pourvoi n°21-16400


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Nicolaý, de Lanouvelle

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.16400
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