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21/09/2022 | FRANCE | N°20-21470

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2022, 20-21470


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 septembre 2022

Cassation

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 977 F-D

Pourvoi n° A 20-21.470

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

M. [L] [N], domicilié [Adresse 2],

a formé le pourvoi n° A 20-21.470 contre l'arrêt rendu le 2 juillet 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale A, section 1), dans le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 septembre 2022

Cassation

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 977 F-D

Pourvoi n° A 20-21.470

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

M. [L] [N], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 20-21.470 contre l'arrêt rendu le 2 juillet 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale A, section 1), dans le litige l'opposant à la société Delaunay Nationale, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [N], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Delaunay Nationale, après débats en l'audience publique du 22 juin 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 2 juillet 2020), M. [N] a été engagé le 28 octobre 2013 par la société Delaunay Nationale, en qualité de boulanger.

2. Contestant le refus de l'employeur de lui payer un certain nombre d'heures supplémentaires qu'il aurait effectuées, il a démissionné le 12 novembre 2016.

3. Il a saisi la juridiction prud'homale le 12 juin 2017 de demandes liées à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, et qu'au vu de ces éléments et de ceux présentés par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, pour débouter le salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires, la cour d'appel s'est bornée à juger que les éléments produits par le salarié étaient dénués de valeur probatoire ou étaient insuffisants ; qu'en statuant ainsi, tandis qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, et d'autre part, que ce dernier ne produisait pas d'élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le seul salarié et, partant, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

5. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition des membres compétents de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

6. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

7. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

8. Pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient que le salarié produit un tableau récapitulatif des horaires qu'il indique avoir effectués par jour, semaine, mois et années ainsi que des décomptes montrant que certains jours il travaillait du lundi au vendredi jusqu'à 19 heures et parfois 19 heures 30. Il ajoute qu'en dehors d'un tableau ne mentionnant qu'une douzaine de lignes quasi illisibles et ne comportant pas le relevé mensuel des heures qu'il prétend avoir accomplies, le salarié ne produit que deux attestations imprécises et parfois en contradiction avec son propre décompte. Il en déduit que le salarié ne fournit pas d'éléments suffisamment précis à l'appui de sa demande pour permettre à l'employeur de répondre, de sorte encore qu'il ne peut être retenu de faute suffisamment grave de l'employeur pouvant justifier une rupture du contrat de travail à ses torts, la démission du salarié ayant été exprimée en termes clairs et non équivoques.

9. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 juillet 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne la société Delaunay Nationale aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Delaunay Nationale et la condamne à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour M. [N]

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. [N] de l'intégralité de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE 1 - sur la demande de requalification de la démission. La démission ne se présume pas et ne peut, résulter que d'une manifestation de volonté claire et non équivoque du salarié de mettre un terme à la relation contractuelle. Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur. En l'espèce la lettre de démission du 12 novembre 2016 ne comporte en son sein aucune ambiguïté et est ainsi rédigée : « Par cette lettre, je vous informe de ma démission du poste de boulanger que j'occupe depuis le 21 octobre 2013 au sein de votre entreprise « Honoré le boulanger». Comme l'indique la convention collective de la boulangerie pâtisserie, applicable à votre entreprise, je respecterai un préavis de départ d'une durée de 2 semaines. La fin de mon contrat sera donc effective le 27 novembre 2016. A cette date, je vous demanderai de bien vouloir préparer les documents nécessaires à ma démission tels qu'un certificat de travail, une attestation Pôle emploi ainsi qu'un reçu pour solde de tout compte que je récupérerai le dernier jour de mon travail ». Monsieur [N] remet en cause sa démission en indiquant qu'auparavant il avait sollicité de son employeur le paiement d'heures supplémentaires et que c'est devant le refus de ce dernier de les payer qu'il a décidé de le quitter. Par courrier du 19 octobre 2015, le salarié s'était en effet plaint auprès de son employeur de ce qu'il n'était pas rémunéré de la totalité de ses heures de travail, et notamment des heures supplémentaires, conformément à la loi et aux termes de la convention collective. Il évoquait notamment un remplacement au mois de mars, un autre au mois de juillet, et un travail le dimanche lors de la braderie de [Localité 3]. Il indiquait à son employeur : « C'est pourquoi je me tourne vers vous, puisque cette situation me cause un réel préjudice et je vous demande de mettre à ma disposition au moment du salariale à réception de la présente. Si la situation devait perdurer, je me verrai contraint de saisir les autorités compétentes afin de faire valoir mes droits » Monsieur [N] explique que son employeur n'a pas voulu donner de suite à cette réclamation et que c'est la raison pour laquelle il a présente sa démission. Il convient cependant de relever qu'ensuite de ce courrier, auquel l'employeur n'a pas donné de suite, signifiant ainsi son refus de le prendre en considération, Monsieur [N] n'a formulé aucune autre réclamation auprès de son employeur. Sa démission n'est intervenue que plus d'une année plus tard. Elle ne fait aucune référence à une quelconque difficulté l'ayant poussé à démissionner et est parfaitement claire. Il ne peut dès lors être considéré qu'il existait des circonstances antérieures ou contemporaines pouvant donner un caractère équivoque à cette démission. Lors de sa saisine, de la juridiction prud'homale intervenue 7 mois après sa démission, et sans réclamation préalable a son employeur de ce fait, Monsieur [N] a fait état d'heures supplémentaires non totalement rémunérées. Il doit dès lors être examiné si les faits invoqués par le salarié peuvent justifier une prise d'acte de rupture, c'est à dire s'il s'agit de manquements suffisamment graves de l'employeur qui empêchent la poursuite du contrat de travail. Dans son courrier du 19 octobre 2015 le salarié invoquait le non-paiement intégral de son temps de travail au cours de deux remplacements en mars et juillet, de même que l'insuffisance de sa rémunération concernant une journée de travail le dimanche lors de la braderie de [Localité 3]. Dans sa saisine du conseil de prud'hommes il invoque plus généralement un problème de non-paiement intégral d'heures supplémentaires qu'il n'avait pas jusqu'alors réclamé à son employeur. 2 - sur les heures supplémentaires Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1er , L. 3171-3, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant. A l'appui de sa demande réitérée en cause d'appel, M. [N] a versé au débat : - un premier tableau d'heures supplémentaires (pièce n° 4) comportant 12 lignes et un total de 111,35 heures sans aucune explication ni indication de date ; ? un autre tableau récapitulatif des horaires qu'il indique avoir effectués par jour, semaines, mois et années (pièce n° 6). - ses bulletins de salaire ; ? trois attestations dont deux de Mme [G] et une de Mme [O]. Concernant le remplacement d'un salarié, Monsieur [Z], qui effectuait du travail de nuit, du 9 au 21 mars 2015, Monsieur [N] est parfaitement taisant et ne revendique aucun paiement, sa pièce n° 9 mentionnant en face de chaque jour : 0. Son bulletin de paie mentionne qu'il lui a été payé son salaire de base, des heures supplémentaires à 25 %, une primé exceptionnelle et une majoration pour travail Concernant le remplacement du mois de juillet 2015 du même Monsieur [Z], il ressort de la lecture de son bulletin de paie qu'il lui a été versé son salaire de base, des heures supplémentaires à 25 %, une prime de remplacement, une prime exceptionnelle et des majorations pour travail de nuit. Le tableau récapitulatif verse au débat ne tient pas compté ni des primes, ni surtout de la majoration pour heure de travail de nuit. Concernant le jour de braderie, le 6 septembre 2015, Monsieur [N] prétend avoir effectué 8,5 heures de travail. Son bulletin de paie de ce mois mentionne le paiement d'une majoration "heures dimanche". En dehors du tableau produit, Monsieur [N] n'apporte aucun élément concernant cette journée. Les deux attestations de Madame [G] mentionnent : - pour l'une, d'une part qu'elle a travaillé pour cet employeur entre le 28 septembre 2011 et le 5 avril 2014 (M. [N] a travaillé d'octobre 2013 à novembre 2016) et que durant la période où elle a été présente il aurait occupé son poste de 10 ou 11 heures 45 (le chiffre est raturé) jusqu'à 19 heures 30 du lundi au samedi, - et pour l'autre, d'autre part, qu'il travaillait du lundi au vendredi de 11h45 à 19h30 et le samedi de 10h30 à 19 heures et parfois jusqu'à 19h30. Or l'examen des décomptes produits par Monsieur [N] pour la période, montre que certains jours il travaillait du lundi au vendredi jusqu'à 19h00 et parfois jusqu'à 19h30. Ces deux attestations sont en outre muettes sur les temps de repos lors de la pause méridienne. Ces attestations, compte tenu de la durée de quelques mois durant laquelle Madame [G] a côtoyé Monsieur [N], de l'imprécision résultant de la rature sur la première et de leur contradiction avec le propre décompte de l'intimé, ne sauraient avoir de valeur probatoire sur les heures d'arrivée et de départ de Monsieur [N] et sur l'amplitude horaire de ses journées de travail. Mme [O], dans son attestation produite au débat par Monsieur [N], précise qu'il travaillait du lundi au vendredi de 11h45 à 19h00, voire 19h30 et le samedi de 10h30 à 19h et qu'il pouvait être amené à exécuter des heures supplémentaires quand l'entreprise en avait besoin, "comme lors des remplacements du matin avec [I] où [L] finissait plus tard que [I] habituellement". De son côté l'employeur verse au débat les attestations de Monsieur [I] [Z], de Monsieur [F] [Y] et de Monsieur [D] [W] qui affirment que les horaires de travail étaient de 11h45 à 19h00 du lundi au vendredi et le samedi de 10h30 à 19h00 avec une heure de pause de 15h30 à 16h30. Ces attestations viennent corroborer celle de Madame [O] quant à l'amplitude horaire. En dehors de son tableau communiqué en pièce n° 6 et de l'attestation imprécise de Madame [O] concernant les jours où il pouvait effectuer des heures supplémentaires, Monsieur [N] ne fournit pas d'éléments suffisamment précis. S'il fait état du fait qu'il « n'a pas manqué de noter sur un carnet les heures supplémentaires qu'il a effectuées chaque mois », le tableau qu'il verse à l'appui de cette affirmation (pièce n° 4) est insuffisant, ne mentionnant que 12 lignes quasi illisibles et certainement pas le relevé mensuel de ses heures, rappel étant fait qu'il est resté 37 mois dans l'entreprise et que le tableau devrait donc comporter 37 lignes. En outre cette réclamation doit être remisé dans son contexte : pour affirmer que sa démission est due à la faute de son employeur, Monsieur [N] invoque un non-paiement d'heures supplémentaires qu'il n'a pourtant pas réclamées, son courrier du 19 octobre 2015 ne visant que le paiement des remplacements de Monsieur [Z] d'avril et juillet 2016 et le paiement de la journée de braderie. A aucun moment durant l'année qui a suivi il n'a réclamé quoique ce soit, ni à propos de son courrier du 19 octobre 2015, ni à propos d'autres heures supplémentaires. Le non-paiement intégral de ses heures de travail n'a pas empêché la poursuite de l'exécution du contrat. Il en résulte que sa démission ne peut être considérée comme ayant été donnée de manière équivoque, étant en outre exprimée de manière claire et qu'il ne peut être retenu de faute suffisamment grave de l'employeur pouvant justifier une prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié. Celui-ci sera dès lors considéré comme démissionnaire. 3 - sur les conséquences Monsieur [N] sera en conséquence débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires et, par voie de conséquence, tant de sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimule que de ses demandes en paiement d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

1°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, et qu'au vu de ces éléments et de ceux présentés par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, pour débouter M. [N] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, la cour d'appel s'est bornée à juger que les éléments produits par le salarié étaient dénués de valeur probatoire ou étaient insuffisants (cf. arrêt attaqué p. 6) ; qu'en statuant ainsi, tandis qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, et d'autre part, que ce dernier ne produisait pas d'élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le seul salarié et, partant, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le versement de primes ne peut tenir lieu de paiement d'heures supplémentaires ; qu'en l'espèce, en déboutant M. [N] de ses demandes au titre des heures supplémentaires au motif que son tableau récapitulatif ne tenait pas compte des primes versées par l'employeur (cf. arrêt attaqué p. 6), la cour d'appel a violé les articles L. 3123-17 et L. 3121-22 du code du travail ;

3°) ALORS QUE l'absence de réclamation d'un salarié ne vaut pas renonciation à se prévaloir d'un droit ; qu'en l'espèce, en retenant, pour rejeter la demande formée par M. [N] au titre des heures supplémentaires, que celui-ci invoquait un non-paiement d'heures supplémentaires qu'il n'avait pourtant pas réclamées, son courrier du 19 octobre 2015 ne visant que le paiement des remplacements de M. [Z] d'avril et juillet 2006 et le paiement de la journée de braderie, et qu'à aucun moment durant l'année qui a suivi il n'avait réclamé quoique ce soit, ni à propos de son courrier du 19 octobre 2015, ni à propos d'autres heures supplémentaires (cf. arrêt attaqué p. 6), la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-21470
Date de la décision : 21/09/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 02 juillet 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2022, pourvoi n°20-21470


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.21470
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