LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 juillet 2022
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 606 F-D
Pourvoi n° Z 21-10.226
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 JUILLET 2022
M. [S] [J], domicilié [Adresse 2]), a formé le pourvoi n° Z 21-10.226 contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant à Mme [I] [R], veuve [J], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [J], de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [R], après débats en l'audience publique du 8 juin 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 octobre 2020), [D] [J] est décédé le 12 mai 2016, en laissant pour lui succéder Mme [R], son épouse séparée de biens, et M. [J], son fils issu d'une précédente union, et en l'état d'un testament olographe daté du 30 août 2012, instituant Mme [R] légataire universelle et lui léguant ses quotités indivises dans un appartement, ainsi que d'un codicille daté du même jour, précisant que ce testament ne révoquait pas les dispositions qui auraient pu être prises en France.
2. Par acte notarié du 12 septembre 2005, [D] [J] avait consenti à son épouse une donation portant, soit sur la pleine propriété de la quotité disponible ordinaire, soit sur un quart en pleine propriété et trois quarts en usufruit, soit sur l'usufruit, de tous les biens composant sa succession.
3. Selon un acte de notoriété du 20 juillet 2016, Mme [R] a déclaré opter pour un quart en toute propriété et trois quarts en usufruit.
4. M. [J] a assigné Mme [R] aux fins de réduction du legs.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
5. M. [J] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant au paiement par Mme [R] d'une indemnité de réduction correspondant à la valeur de ses droits réservataires dans la succession de son père, alors « que l'arrêt constate que Mme [R] veuve [J] a bénéficié, au titre du legs universel, de la totalité des biens du testateur, sous réserve des droits éventuels du légataire particulier ; qu'en rejetant la demande d'exécution de la réduction en valeur au seul motif inopérant que Mme [R] veuve [J] avait opté pour l'une des quotités permises par la loi, la cour d'appel a violé l'article 924 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 924 du code civil :
6. Selon ce texte, lorsque la libéralité excède la quotité disponible, le gratifié, successible ou non successible, doit indemniser les héritiers réservataires à concurrence de la portion excessive de la libéralité, quel que soit cet excédent.
7. Pour rejeter la demande de M. [J] en réduction du legs universel dont Mme [R] était bénéficiaire, l'arrêt retient que celle-ci a opté pour l'une des quotités disponibles de l'article 1094-1 du code civil et a ainsi d'elle-même opéré la réduction des libéralités reçues à l'une des quotités permises par la loi.
8. En statuant ainsi, tout en constatant que Mme [R] contestait avoir renoncé à son legs universel, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de réduction du legs, l'arrêt rendu le 21 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne Mme [R] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [R] et la condamne à payer à M. [J] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [J].
M. [S] [J] reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande tendant au paiement par Mme [R] d'une indemnité de réduction correspondant à la valeur de ses droits réservataires dans la succession de son père ;
1/ ALORS QUE l'objet de la demande était l'exécution de la réduction en valeur ; que la cour d'appel n'a statué que sur le principe et la quotité de la réduction qui ne faisaient l'objet d'aucune contestation entre les parties ; qu'ainsi la cour d'appel a méconnu les termes du litige violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE l'arrêt ne comporte aucun motif de nature à justifier le rejet de la demande d'exécution de la réduction en valeur formulée par M. [S] [J] ; qu'ainsi la cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile et privé sa décision de base légale au regard de l'article 924 du code civil ;
3/ ALORS QUE l'arrêt constate que Mme [R] veuve [J] a bénéficié, au titre du legs universel, de la totalité des biens du testateur, sous réserve des droits éventuels du légataire particulier ; qu'en rejetant la demande d'exécution de la réduction en valeur au seul motif inopérant que Mme [R] veuve [J] avait opté pour l'une des quotités permises par la loi, la cour d'appel a violé l'article 924 du code civil.